Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 153 - Les normes de concrétisation dans la jurisprudence du Conseil Constitutionnel - 22

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LES NORMES DE CONCRÉTISATION DANS LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Conseil constitutionnel, cette recherche se propose donc d'établir une définition
de ce que sont ces normes de concrétisation, d'en démontrer l'utilité mais aussi
d'en formuler la critique. Ces normes de concrétisation se situent, en effet, au sein
d'un équilibre instable entre le pouvoir créateur du juge constitutionnel et l'autolimitation dont ce dernier fait preuve.
2. Institution encore jeune, juridiction naissante, le Conseil constitutionnel n'a
pas de très longues années d'expérience derrière lui. Moins de soixante ans constituent l'étendue de la jurisprudence du juge constitutionnel, étendue qui peut être
réduite à quarante-cinq ans de réelle pratique si le point de départ considéré est fixé à
la décision dite « Liberté d'association » du 16 juillet 19713 qui a permis un élargissement considérable des normes de référence du contrôle de constitutionnalité. La délimitation de sa compétence au contrôle du respect de la distinction des articles 34 et 37
de la Constitution, souhaitée par les rédacteurs de la Constitution du 4 octobre 1958,
prenait alors définitivement fin4. Plus encore que le Conseil d'État et la Cour de cassation, qui poursuivent une longue tradition jurisprudentielle, le juge constitutionnel
français élabore toujours ses méthodes de jugement. En effet, outre le fait que le
contrôle de conformité des lois à la Constitution n'est pas dans la tradition française5,
aucune continuité ne peut véritablement être relevée entre le contrôle aujourd'hui en
vigueur et les contrôles de constitutionnalité mis en place timidement avant la
Ve République6. Même sous la IVe République, avec la création du Comité constitutionnel, aucun contrôle n'existait vraiment, notamment parce que la Constitution du
27 octobre 1946 restreignait l'examen des textes aux titres I à X du texte constitutionnel, excluant alors un contrôle des lois au regard dispositions du Préambule7. Par
ailleurs, le Comité ne s'est réuni qu'une seule fois, en 19488.
3. Le développement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel s'est
opéré de deux manières. D'abord a eu lieu l'évolution auto-proclamée, par
l'extension des normes de référence du contrôle de constitutionnalité le 16 juillet 19719. Puis est arrivée l'évolution constitutionnalisée, en premier lieu par la
révision du 29 octobre 197410 permettant la saisine du juge constitutionnel par
3. Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la
loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.
4. Le Conseil constitutionnel ne s'était, en effet, pas auto-restreint dans son contrôle, comme en
témoigne la décision n° 60-6 DC du 15 janvier 1960, Loi organique portant promotion exceptionnelle
des Français musulmans dans la magistrature et modifiant l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958,
dans laquelle le juge constitutionnel affirme bien contrôler la loi organique à partir de toutes les
dispositions de la Constitution.
5. Est-il utile de rappeler que, selon l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du
Citoyen de 1789, « La Loi est l'expression de la volonté générale » ?
6. Sur l'histoire du contrôle de constitutionnalité en France avant 1958, cf. G. Drago,
Contentieux constitutionnel français, PUF, coll. Thémis Droit, 4e éd., 2016, pp. 141 à 177.
7. Sur l'évolution du contrôle de constitutionnalité en France, cf. J.-L. Debré, « Contrôle de
constitutionnalité : entre tradition et modernité », Discours lors du colloque « Séparation des Pouvoirs
et justice constitutionnelle », 6 mai 2014, disponible en ligne à l'adresse suivante : www.conseilconstitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/documentation/contributions-et-discours/2014/
controle-de-constitutionnalite-entre-tradition-et-modernite.141543.html.
8. B. Fargeaud, « Présentation des archives Raymond Janot », Jus Politicum, n° 12, juillet 2014,
p. 1, disponible en ligne à l'adresse suivante : juspoliticum.com/article/Presentation-des-archivesRaymond-Janot-892.html.
9. Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la
loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.
10. Loi constitutionnelle n° 74-904 du 29 octobre 1974 portant révision de l'article 61 de la
Constitution, Article unique, JORF du 30 octobre 1974, p. 11035.

http://www.conseil http://www.constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/documentation/contributions-et-discours/2014/ http://www.juspoliticum.com/article/Presentation-des-archives

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