Bibliothèque de droit public - Tome 317 - Sans domicile fixe et droit - 148

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SANS DOMICILE FIXE ET DROIT

situation du demandeur.  Ici aussi, si le législateur prévoit que les commissions
doivent motiver leurs décisions, ni les dispositions législatives, ni les dispositions
réglementaires n'explicitent les critères à prendre en compte.
208. Les critères implicites de l'autonomie suffisante pour accéder au logement
de droit commun. Les critères susceptibles d'être utilisés pour déterminer la capacité à habiter d'une personne SDF sont de deux ordres. Ils portent soit sur des
qualités intrinsèques à l'individu, c'est-à-dire sur sa capacité propre, psychologique et matérielle, à accéder à un logement autonome242, soit sur des critères
extrinsèques, en particulier la saturation du secteur locatif d'un département243
qui reste une contrainte forte pesant sur les acteurs de la prise en charge. L'accès
au logement pourrait alors moins dépendre de la capacité du SDF que de la libération éventuelle d'une place.
209. Les conséquences à l'égard des personnes SDF. Il n'est pas possible de
connaître de façon suffisamment exhaustive les suites données aux demandes des
personnes sans-abri. Il est cependant probable que les SDF qui cumulent plusieurs années de rue, en alternance avec des foyers ou des squats, qui vivent de
maigres expédients et qui se situent dans des zones urbaines en forte tension locative n'aient que peu de chances de pouvoir accéder à un logement autonome. Ces
critères implicites représentent un risque, celui que « les programmes poursuivant
cet objectif ne concernent en premier lieu que les personnes qui sont prêtes à emménager immédiatement dans un logement, dès lors que celles-ci disposent d'un travail
et n'ont pas besoin d'un accompagnement social particulier »244.
Bien que les personnes sans domicile fixe constituent la « cible » de ce dispositif du Logement d'abord, celles-ci ne devraient en bénéficier que de façon aléatoire, si ce n'est exceptionnelle, au regard de son caractère subjectif. Le risque est
que le recours non encadré à la notion d'autonomie pour accéder à un logement
ne provoque, de facto, une exclusion des personnes sans-abri du logement de droit
commun. Et ces risques, décelables in abstracto, semblent se confirmer en
242. Par exemple, un critère de ressources. Ainsi, le Haut comité pour le logement des personnes
défavorisées (HCLPD) a constaté que « dans de nombreuses commissions Dalo, les dossiers des
personnes au RSA sont requalifiés en Daho sur le seul critère des ressources », HAUT COMITÉ POUR
LE LOGEMENT DES PERSONNES DÉFAVORISÉES, Bilan et statistiques 2008-2017, en ligne sur
hclpd.gouv.fr.
243. Ce qui semble être une pratique courante dans le cadre de la procédure DALO puisque
l' « on observe que le taux de décisions favorables est inversement corrélé au nombre de recours reçus par
les départements : plus un département reçoit de recours Dalo, moins il reconnaît de personnes au titre de
ce droit en proportion », COMITÉ DE SUIVI DE LA LOI DALO, Bilan chiffré du droit au logement
opposable 2008-2016, op. cit., 2017, p. 18.
244. C. FERCOT, « Droits sociaux des sans-abri et territoires... », op. cit.
Ce risque est également relevé par un professionnel de la prise en charge. Vicent Montalban
Aroca considère que « des critères tels que l'obtention de l'avis favorable de la commission DAHO
(Droit à l'hébergement opposable) et l'éligibilité pour l'accès à un logement constituent en soi deux
barrières administratives qui ne peuvent être surmontées que par une partie des personnes : celles qui ont
le plus de ressources pour réaliser et persévérer dans les démarches nécessaires. Ces conditions
administratives, présentées comme garantie d'égalité de traitement entre les demandes, sont en réalité fort
restrictives et laissent à l'écart celles émanant des personnes avec le moins de ressources. Un sans-abri
fera rarement un recours DAHO et risquera de ne pas honorer les rendez-vous à régularité fixe avec son
travailleur social, pourtant indispensables aux renouvellements de sa demande d'hébergement. De plus,
l'accent est mis sur la condition presque systématique d'une activité rémunérée pour l'accès à un logement,
au lieu de révéler simplement l'accessibilité de la personne à une forme d'habitat (hébergement ou
logement) », V. MONTALBAN AROCA, « Une juste distribution des places ? ... », op. cit.

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