Bibliothèque de droit privé - Tome 604 - L'impartialité de l'arbitre - 164

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L'IMPARTIALITÉ DE L'ARBITRE

185. Traitement de cette incertitude. Le souci d'efficacité de l'arbitrage
milite pour que l'évaluation de l'impartialité ne se fasse qu'à partir des liens
apparents et superficiels alors que le souci de garantir l'impartialité pousse à
plus de scepticisme et rigueur en incitant l'organe d'évaluation de l'impartialité
à approfondir l'examen du lien de l'arbitre afin de vérifier qu'il n'y a pas, derrière le lien apparent, un lien plus intense faisant naître une tentation de partialité. L'arbitrage entre efficacité et impartialité dépendra des préférences de l'organe d'évaluation de l'impartialité. Les circonstances de l'espèce seront aussi
déterminantes. Si, par exemple, le lien apparent concerne l'arbitre unique dans
une affaire particulièrement importante, les différentes dimensions de ce lien
mériteraient d'être éclairées214.

§ 5. LE CRITÈRE DE L'ÉQUILIBRE DU LIEN :
LA QUESTION DU LIEN DE SUBORDINATION

Après avoir exposé le concept de l'équilibre du lien (A), quelques illustrations
seront données (B).
A. CONCEPT
186.  L'existence d'un lien important entre l'arbitre et l'une des personnes
intéressées par l'issue du litige ne doit pas faire automatiquement présumer la
partialité de l'arbitre. Ce qui peut faire craindre la partialité de l'arbitre, c'est la
tentation qu'il peut avoir de rendre une décision satisfaisant la personne intéressée par l'issue du litige (notamment de peur de nuire à ce lien ou dans la volonté
de renforcer celui-ci). Cette tentation existe notamment lorsque le lien est déséquilibré en faveur de cette personne (ex. : l'arbitre est le salarié d'une des parties ;
l'existence d'un lien de subordination quelconque de l'arbitre à l'égard de l'une
des parties215). Dans cette hypothèse, nous pouvons présumer que l'arbitre craint
la réaction de cette personne à une sentence qui lui serait défavorable à tel point
que sa crainte puisse influencer son raisonnement.
La tentation de partialité est présente, mais moins pressante, lorsque le lien
est égalitaire et équilibré, c'est-à-dire lorsque l'arbitre et la personne à laquelle il
est lié se trouvent au même niveau (ex. : collègues ; voisins) ou lorsque l'arbitre
n'a pas à craindre les effets de sa sentence sur ce lien (ex. : perte d'un petit client).
Lorsque le lien est déséquilibré en faveur de l'arbitre (ex. : l'arbitre est l'employeur d'une des parties), l'arbitre est en position de force. Il n'a pas a priori
« intérêt » à satisfaire les attentes de la personne à laquelle il est lié, car c'est lui
qui contrôle principalement l'existence et la pérennité du lien en cause. Nous pouvons même penser que l'existence de ce lien soit un facteur augmentant la légitimité et l'acceptabilité de la sentence. Toutefois, la proximité qu'est susceptible de
214. Si cet arbitre est « ami » avec une partie sur Facebook, l'organe d'évaluation de l'impartialité
devrait à notre avis demander à l'arbitre de fournir des explications sur la naissance de cette relation
et son étendue. Il pourrait recueillir des informations objectives telles que le nombre « d'amis » de
l'arbitre. En effet, plus le nombre d'amis sur le réseau social est restreint, plus il y a des chances qu'il
y ait, derrière cette amitié virtuelle, une amitié réelle.
215. Sur le lien de subordination, V. C. Castres Saint-Martin, Les conflits d'intérêts en arbitrage
commercial international, op. cit., p. 43 et s.

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