Bibliothèque de droit privé - Tome 604 - L'impartialité de l'arbitre - 344

326

L'IMPARTIALITÉ DE L'ARBITRE

recherches alléguées sont tirées du site internet de Sofregaz », « qu'elles sont
publiques et aisément accessibles et qu'elles auraient pu être menées le jour même
de la réception du courriel du 26 juillet 2007 »109. L'arrêt exprime une idée latente
dans les décisions susmentionnées : s'il est facile pour la partie d'obtenir des informations établissant un risque de partialité de l'arbitre, elle devrait le faire le plus tôt
possible et ne pas attendre la reddition d'une sentence contraire à ses attentes. Le
devoir de se renseigner des parties découlerait de leur obligation d'agir de bonne foi.
Bien que le critère de l'accessibilité soit devenu -  au fil d'une jurisprudence
constante  - de droit positif, le terme « notoriété » n'a pas disparu de la jurisprudence même si son contenu a été vidé de son sens. Ainsi, un arrêt du 14 février
2017 de la Cour d'appel de Paris a jugé certaines informations notoires « pour
figurer [...] sur des sites internet publics aisément consultables »110.
Dans le même sens, un arrêt du 14 mars 2017 de la même juridiction a indiqué que l'information litigieuse relative au conseil d'une partie est consultable sur
le site d'une fédération au terme d'une recherche qui, contrairement à ce que
prétend la recourante111, est d'une grande simplicité112.
Finalement, l'arrêt du 15 juin 2017113 susmentionné a clairement montré sa
préférence pour le critère de l'accessibilité après l'avoir distingué du critère de la
notoriété. Cet arrêt reflète, nous semble-t-il, l'état du droit positif français114.
Bien que ne mentionnant ni la notoriété ni l'accessibilité, un arrêt de la
cour d'appel de Paris du 28 novembre 2017 adopte de facto le critère de l'accessibilité115. En 2018, deux arrêts116 (dont l'un a été confirmé par la Cour de
109. CA Paris, 12 avr. 2016, Avax c. Tecnimont, n° 14/14884.
110. CA Paris, 14 févr. 2017, SAS 20 Minutes France c. B, préc.
111. Celle-ci soutenait que l'information en cause « n'était nullement notoire » et « ne pouvait
être découverte que par une complexe recherche sur le site internet de la Fédération ».
112. CA Paris, 14 mars 2017, SNC Forézienne d'entreprise c. SAS Guintoli, préc.
113. Cass. 1re civ. , 15 juin 2017, République de Guinée équatoriale c. Sté Orange Middle East and
Africa, préc. Commentant cet arrêt, M. Loquin écrit que la condition de la notoriété n'est pas exigée
et que l'accessibilité aisée de la source suffit à justifier l'obligation faite à la partie concernée de la
consulter. Il juge enfin l'extension du devoir de curiosité des parties « très excessive » (E. Loquin,
« L'essor de l'obligation de curiosité des parties au moment de la constitution du tribunal arbitral »,
RTD com. 2017, p. 842).
114. Outre le fait qu'il n'a pas été contredit, cet arrêt a été publié au Bulletin.
115. CA Paris, 28  nov.  2017, Sheikh Mohamed Bin Issa Al Jaber c. Sheikh Salah Ibrahim
Al-Hejailan, n° 16/00194, Rev. arb. 2018, p. 289 : « [U]n article de doctrine publié en 2001 et une note
sous arrêt publiée en 2006, dans lesquels M. X prendrait parti en faveur de l'extension des clauses
compromissoires dans les groupes de contrats, sont des éléments d'information qui étaient publics à la
date de désignation de cet arbitre ».
116. CA Paris, 30 janv. 2018, Thalasso c. Société de Transport et de Tourisme Al Jazira et autre,
préc. ; CA Paris, 27 mars 2018, Sté Saad Buzwair Automotive (SBA) c. Sté Audi Volkswagen Middle
East (AVME), préc. : « Considérant que si des informations publiques et très aisément accessibles,
que les parties ne pouvaient manquer de consulter avant le début de l'arbitrage, sont de nature à
caractériser la notoriété d'un conflit d'intérêts, en revanche, il ne saurait être raisonnablement exigé,
ni que les parties se livrent à un dépouillement systématique des sources susceptibles de mentionner le
nom de l'arbitre et des personnes qui lui sont liées, ni qu'elles poursuivent leurs recherches après le
début de l'instance arbitrale » ; « Considérant que si l'existence d'un contrat exécuté en 2010 par le
cabinet H&M pour la Volkswagen Bank doit être regardée comme notoire du fait de sa publication
avant le début de l'arbitrage dans un annuaire professionnel connu de tous les cabinets d'avocats
d'affaires allemands, en revanche, Z n'était pas tenue de poursuivre ses recherches après le début des
opérations d'arbitrage et il incombait à l'arbitre d'informer les parties de toute circonstance susceptible
d'affecter son indépendance ou son impartialité survenant après l'acceptation de sa mission ».

978-2-275-07838-0__DOCFILE__978-2-275-07838-0_corpus.indd 326

30/06/2020 10:55:35
Bibliothèque de droit privé - Tome 604 - L'impartialité de l'arbitre

Table des matières de la publication Bibliothèque de droit privé - Tome 604 - L'impartialité de l'arbitre
