Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté - 112

possibilités de délégation lors des scrutins publics ordinaires ont été strictement encadrées par l'ordonnance
n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique. La fraude au scrutin vise les différentes
entorses à l'interdiction des délégations de vote, même si les sanctions à ce sujet sont inexistantes. Sans
exemple, le sens de cette disposition reste difficile à saisir. Toujours est- il que les peines sont sévères,
le député encourt une privation, pendant un mois, du quart de l'indemnité parlementaire (environ
1 810 euros) et, en cas de récidive pendant la même session, la durée est portée à six mois.
Pas moins hypothétique que les deux précédents dispositifs, celui de l'article 78 vise le cas d'un député
qui commettrait un fait délictueux dans l'enceinte du Palais Bourbon à un moment où l'Assemblée
délibère en séance. Le délit doit être suffisamment grave pour emporter la suspension de la délibération
en cours à l'Assemblée, d'où la référence au droit pénal. Des propos, même sexistes ou racistes,
n'emporteraient application de cet article qu'à la condition d'être accompagnés de violence. Le fait
est porté à la connaissance de l'Assemblée par le président, soit immédiatement, soit à la reprise de la
séance ou au début de la suivante lorsqu'il est commis lors d'une suspension ou d'une levée de séance.
Afin de respecter le principe du contradictoire, le député est admis à s'expliquer en séance, devant ses
collègues. Le président lui donne ensuite l'ordre de quitter la salle des séances, le député étant retenu
dans le Palais. Concomitamment, le Bureau informe sur- le- champ le procureur général qu'un délit a été
commis. Cette procédure, très formelle, débouche sur une communication au parquet, dessaisissant
l'Assemblée de la question. Le député ne bénéficie pas ici de l'immunité parlementaire qui profite aux
élus dans l'exercice de leurs activités, ceci s'expliquant par la gravité du délit commis dans l'enceinte du
Palais, justifiant la sévérité du régime.
L'immunité parlementaire. L'article 80 précise les modalités d'application de l'article 26 alinéa 3 C
relatif aux immunités parlementaires. Cet article a été profondément remanié par la révision constitutionnelle
du 4 août 1995 et dispose désormais :
« Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion
des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions. / Aucun membre du Parlement ne
peut faire l'objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d'une arrestation ou de toute autre mesure
privative ou restrictive de liberté qu'avec l'autorisation du Bureau de l'assemblée dont il fait partie.
Cette autorisation n'est pas requise en cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation définitive.
/La détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la poursuite d'un membre du Parlement
sont suspendues pour la durée de la session si l'assemblée dont il fait partie le requiert. /L'assemblée
intéressée est réunie de plein droit pour des séances supplémentaires pour permettre, le cas échéant,
l'application de l'alinéa ci- dessus ».
Les immunités parlementaires sont caractéristiques du régime représentatif et d'une certaine lecture
de la séparation des pouvoirs. Elles conditionnent l'exercice d'une action judiciaire privative de liberté
contre l'un de ses membres à l'autorisation préalable de l'Assemblée nationale ou de l'un de ses organes.
D'un côté, les députés doivent exercer librement leurs fonctions sans craindre d'être perturbés par les
pressions du pouvoir exécutif, des poursuites ou arrestations arbitraires ou bien les recours abusifs de
citoyens mécontents, ce qui réduit ainsi le risque d'instrumentalisation de la justice pour des mobiles
politiques. D'un autre côté, les députés doivent être justiciables des crimes et délits qu'ils commettent en
dehors de l'exercice de leur fonction, ce privilège ne devant pas devenir une impunité portant atteinte
à l'État de droit ou à la lutte contre la corruption. Il est souvent reconnu à l'inviolabilité le mérite de
protéger les députés contre l'instrumentalisation de la justice en période pré- électorale ou électorale ainsi
que l'opposition parlementaire vis- à-vis du pouvoir exécutif. Cet équilibre entre politique et justice est
112 · RÈGLEMENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE COMMENTÉ

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