Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté - 238

En revanche, dans la mesure où la procédure répond à une logique de bicamérisme égalitaire, cette
hypothèse reste peu probable. On saisit mal, en effet, comment le Sénat pourrait adopter une telle
motion à la majorité requise après transmission par l'Assemblée nationale alors même qu'elle n'a pas
réussi à obtenir la majorité des trois cinquièmes lorsqu'elle a été déposée devant lui. Elle n'est appelée
que si la présence effective en séance des signataires est constatée au moment de l'appel. Par ailleurs,
elle ne peut être assortie d'aucune condition ou réserve, ni comporter d'amendement au projet de loi.
Cette dernière exigence découle de la prééminence du pouvoir exécutif dans la conduite des relations
internationales et de l'obligation d'adoption de la motion en termes identiques par les deux assemblées.
L'article 51 du Règlement, qui ouvre la possibilité de siéger en comité secret, est applicable en
dépit du silence gardé par le Règlement. Il faut, en effet, retenir cette interprétation dès lors que son
application n'est pas explicitement écartée168
. À la différence de l'article 122, la motion déposée sur
le fondement de l'article 88-5 C est renvoyée à la Commission des affaires étrangères, compétente en
vertu de l'article 36 du Règlement pour les traités et accords internationaux. Cela tend à atténuer la
spécificité procédurale des motions, qui ne sont normalement pas soumises à l'examen préalable en
commission. Toutefois, compte tenu des conséquences que l'adoption d'une telle motion emporte,
puisqu'elle dessaisit le peuple, il apparaît essentiel de pouvoir éclairer la décision de l'Assemblée par
un rapport de la commission. Par ailleurs, en cas d'adoption de la motion dans les conditions requises
par les deux Assemblées, et si le président décide d'emprunter la voie parlementaire, le projet de loi
sera soumis au Congrès sans faire l'objet d'un examen dans chaque assemblée, de telle sorte que le
rapport sur la motion vaudra en réalité rapport sur le projet de loi. L'alinéa 3 de l'article 126 précise
que le rapport de la commission ne peut conclure qu'à l'adoption ou au rejet de la motion sans pouvoir
l'amender, ce qui est encore destiné à faire respecter la prévalence du pouvoir exécutif dans la conduite
des relations internationales. La combinaison des délais prévus aux alinéas 2 et 3 de l'article 126 permet
de ne pas excéder trente jours. Ces délais relativement brefs, qui sont suspendus entre les sessions,
sont destinés à rationaliser le processus et à éviter le dépôt, voire la discussion, de motions alors que
la voie du référendum a été engagée.
Examen en séance. Pour les mêmes raisons, la motion doit être inscrite à l'ouverture de la plus
proche séance, sous réserve des priorités établies par l'article 48 alinéas 2 et 3 C qui ont également
pour effet, lorsqu'elles sont mises en œuvre, de suspendre les délais. Pour l'organisation de la discussion,
la Conférence des présidents met en œuvre les règles prévues par l'article 49, alinéas 1 à 5, du
Règlement. Peuvent donc seuls intervenir dans la discussion l'un des signataires pour une durée qui ne
peut excéder trente minutes, le gouvernement et le président ou le rapporteur de la Commission des
affaires étrangères. À la différence des motions référendaires, ces motions ne peuvent pas être utilisées
à des fins d'obstruction. Dès lors, le Règlement autorise un orateur de chaque groupe à prendre la
parole pour cinq minutes avant le vote.
Pour être adoptée, la motion doit recueillir la majorité des trois cinquièmes, ce qui la distingue des autres
motions. Cela tient encore une fois aux conséquences que l'adoption d'une telle motion emporte. Le
règlement ne précise pas s'il s'agit des trois cinquièmes des membres composant l'Assemblée nationale
ou des suffrages exprimés. Deux arguments plaident en faveur de la seconde interprétation. D'une part,
dans le silence du Règlement, il faut considérer que c'est la règle la plus souple qui s'applique. D'autre
168. Rapport n° 1630 de M. Jean- Luc Warsmann fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de
l'administration générale de la République sur la proposition de résolution (n° 1546) de M. Bernard Accoyer tendant à modifier le
Règlement de l'Assemblée nationale, enregistré à la présidence le 30 avr. 2009, p. 222.
238 · RÈGLEMENT DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE COMMENTÉ

Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté

Table des matières de la publication Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté