Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté - 39

Pour l'essentiel donc, être « non- inscrit » c'est, en réalité, admettre de n'avoir quasiment aucune influence
dans les débats ni aucun poids dans les votes. C'est un lourd tribut résultant du fait qu'en 1959, les
présidents des groupes avaient estimé que les députés isolés ne contribuaient pas à la « configuration
politique de l'Assemblée ».
À titre d'exemple, lors de la session 2008-2009, le temps de parole des non- inscrits étant proportionnel
à leur nombre, ils ne disposaient que d'une minute dans un débat prévu pour durer cinq heures. Dans la
session 2019-2020, lors des questions au gouvernement, un non- inscrit ne pouvait intervenir qu'une fois
toutes les huit séances en moyenne. Et encore, à condition d'être réactif puisque lorsque l'opportunité
se présente, est retenu le député qui est le premier à répondre au service de la Séance.
Une forme associative. L'existence des groupes a été reconnue dans le Règlement le 1er
juillet 1910.
À l'époque, la Chambre des députés avait décidé que les « bureaux des groupes » seraient associés à la
composition des membres des commissions permanentes. Puis, par une seconde résolution datée du
10 juin 1932, fut définie la procédure de leur constitution, donnant lieu au dépôt d'une déclaration
politique. En 1946, ce fut la consécration constitutionnelle avec l'article 11 qui indiqua que « chacune
des deux Chambres élit son bureau chaque année, au début de la session, à la représentation proportionnelle
des groupes ».
Pour autant, rien n'était prévu sur leur statut. À l'époque, le Règlement se contentait de préciser que
les groupes pouvaient « assurer leur service intérieur par un secrétariat administratif dont ils règlent euxmêmes
le recrutement et le mode de rétribution » et que « le statut, les conditions d'installation matérielle
de ces secrétariats et les droits d'accès et de circulation de leur personnel dans le Palais de l'Assemblée
sont fixés par le Bureau de l'Assemblée sur proposition des questeurs et des présidents des groupes ».
Les groupes s'organisèrent donc comme ils l'entendaient, certains choisissant de rentrer dans le cadre
de la loi de 1901, d'autres revendiquant un statut particulier de personnes morales de droit privé. Une
situation incertaine que l'on retrouvait aussi dans les autres parlements européens : associations publiques
en Allemagne et en Belgique, associations privées aux Pays- Bas ou au Danemark, groupements dépourvus
de personnalité juridique au Royaume- Uni, associations de fait en Italie.
En 2014, sur proposition de Claude Bartolone, après une concertation avec les trois questeurs et l'ensemble
des présidents concernés, le Bureau de l'Assemblée décida à l'unanimité de clarifier cet aspect
afin de garantir la bonne gestion et la transparence des finances des groupes. En effet, depuis 1954, ils
reçoivent de l'Assemblée une contribution financière afin de couvrir leurs frais de secrétariat sans que
ne soit ensuite effectué un quelconque contrôle sur leur usage de la part de l'institution. En parallèle,
ils peuvent aussi encaisser des participations consenties par leurs membres, sous forme de cotisations.
À la suite de polémiques liées à l'octroi en 2012 d'un prêt de trois millions d'euros par un groupe parlementaire
à un parti politique proche, les députés estimèrent qu'il était devenu indispensable de fixer des
règles solides liées à l'adoption d'une structure juridique commune et déterminée. Les pierres angulaires
de la démocratie représentative qu'ils étaient devenus se devaient d'être encadrées par le droit.
Ainsi depuis le 17 septembre 2014, l'article 20 du Règlement impose aux groupes de se « constituer
sous forme d'association présidée par le président du groupe et composée des membres du groupe et
apparentés ». Saisi conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 61 C, le Conseil constitutionnel
ne releva aucune contrariété à la Constitution (16 oct. 2014, n° 2014-702 DC, § 1).
Un tel choix n'était cependant pas si évident. Ainsi Pierre Avril et Jean Gicquel écrivaient, dans leur
manuel de droit parlementaire que les groupes, « formations intérieures des assemblées (...) sont des
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