Hors collection - Règlement de l'Assemblée nationale commenté - 78

Les décisions ainsi prises par la Conférence des présidents s'agissant de l'attribution des temps de parole
sont diffusées et rendues publiques sur le site internet de l'Assemblée au sein d'un document consacré
à l'organisation de la discussion des textes. Pour ce qui est de l'ordre des orateurs et de leur nom, il faut
se référer au dérouleur de séance (ou « feuille jaune »).
b) Le temps législatif programmé. Le temps législatif programmé est l'outil pensé et élaboré pour faire
obstacle à l'obstruction parlementaire41
. Cette dernière consiste dans le dépôt massif d'amendements
afin que le temps nécessaire à leur discussion excède ce qui est acceptable pour le gouvernement, et
dans l'activation complémentaire de tous les instruments de procédure aptes à ralentir les débats parlementaires.
Afin de limiter cette pratique, le constituant de 2008 a renvoyé à la loi organique et aux
règlements des assemblées le soin de définir les conditions d'exercice du droit d'amendement (art. 44 C).
C'est la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 qui y procède dans ses articles 13 à 19, ainsi que
le Règlement de l'Assemblée nationale. En effet, le Sénat n'a pas souhaité mettre en œuvre dans son
Règlement cette possibilité.
La loi organique autorise les règlements des assemblées à instaurer une procédure impartissant des délais
pour l'examen d'un texte en séance. Pour le dire autrement, cette procédure, que l'on dénomme « temps
législatif programmé », vise à garantir que la discussion d'un texte sera achevée dans un délai connu à
l'avance (par exemple, à l'issue de vingt, de trente ou de cinquante heures de débats). Pour ce faire, ce
temps de débat est réparti entre les groupes politiques selon des critères qui seront détaillés ci- dessous
et les amendements sont mis aux voix sans discussion, lorsque le temps de parole du groupe concerné
est épuisé. De la sorte, le temps de discussion d'un texte n'est plus corrélé au nombre d'amendements
déposés, lesquels donnent normalement droit à un temps de parole de deux minutes au bénéfice de
leur auteur, et il devient inutile de déposer des quantités importantes d'amendements dans le seul but
de paralyser la procédure législative. Bien entendu, cette procédure de temps programmé doit être
entourée de garanties pour ne pas empêcher l'expression des députés, en particulier de l'opposition.
La procédure du temps législatif programmée est relativement simple dans sa philosophie : chaque groupe
politique se voit attribuer un temps de parole qu'il peut utiliser comme bon lui semble à l'occasion de la
discussion du texte (par exemple en le réservant pour quelques amendements stratégiques ou en contraire
en intervenant fortement dans la discussion générale) mais, une fois ce temps de parole épuisé, les
députés du groupe ne peuvent plus prendre la parole et, le cas échéant, leurs amendements sont mis aux
voix sans débat. Ainsi, le temps programmé ne restreint aucunement le droit d'amendement des députés,
qui demeurent libres de déposer autant d'amendements qu'ils le souhaitent, mais il limite le temps de
parole des groupes politiques. Par conséquent, les limitations qui encadrent normalement chaque prise
de parole (sur un amendement, sur une motion, etc.) ne sont pas applicables dans ce cadre : un orateur
peut parler autant qu'il le souhaite, quelle que soit la phase de la discussion, sous réserve que le temps
maximal accordé à son groupe politique ne soit pas atteint. En contrepartie, toutes les procédures qui
ont pour effet de « faire gagner du temps » sont incluses dans le décompte du temps du groupe. Ainsi,
la durée des rappels aux règlements des membres du groupe est décomptée dès lors qu'ils sont artificiels,
de même que celle des suspensions de séance demandées par le groupe politique considéré. Chaque
groupe est donc titulaire d'un temps global, qu'il peut organiser comme il le souhaite. Les présidents
de groupe disposent également d'un temps de parole qui leur est personnel, d'une durée d'une heure.
Ils ne peuvent en déléguer que la moitié à un autre orateur unique de leur groupe. Les temps de parole
41. R. sChenberg et E. thiers, « Le temps législatif à l'Assemblée nationale. Regards sur la révision constitutionnelle de 2008 et ses
effets », Débats du LIEPP 2017.
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