Bibliothèque de droit public - Tome 318 - Le principe de liberté en droit public français - 359

LA LIBERTÉ DE PRINCIPE AU FONDEMENT DU DROIT

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contrôle de constitutionnalité a priori, les dispositions contestées « font peser une
incertitude sur la licéité de la consultation de certains services de communication
au public en ligne et, en conséquence, de l'usage d'internet pour rechercher des
informations » (cons. 15). Le juge constitutionnel intervient donc pour restreindre
là aussi un élan de limitation de la liberté dans une optique de sécurité et de protection, potentiellement dangereuse pour le principe de liberté.
801.  Le dernier exemple présenté est tiré d'une proposition de loi, déposée
en 2017, par les députés du groupe socialiste, écologiste et républicain et apparentés, qui ont considéré que certains sites Internet « indui[sent] délibérément en
erreur, intimid[ent] et/ou exerc[ent] des pressions psychologiques ou morales afin
de dissuader de recourir à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) », et ont
donc proposé d'étendre le délit d'entrave à l'IVG, institué par la loi du 27 janvier
1993. La proposition initiale a connu beaucoup de discussion et a été finalement
adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat sous la forme suivante à l'article L. 2223-2 du Code de la santé publique : « - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de
pratiquer ou de s'informer sur une interruption volontaire de grossesse ou les actes
préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 par tout moyen, y compris
par voie électronique ou en ligne, notamment par la diffusion ou la transmission
d'allégations ou d'indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans
un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse : 1° Soit en perturbant l'accès aux établissements
mentionnés à l'article L. 2212-2, la libre circulation des personnes à l'intérieur de
ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ; 2° Soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou
tout acte d'intimidation à l'encontre des personnes cherchant à s'informer sur une
interruption volontaire de grossesse, des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans les établissements mentionnés au même article L. 2212-2, des femmes
venues recourir à une interruption volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces
dernières ». Cette loi posait problème surtout en son deuxième point, concernant
les pressions morales et psychologiques, puisque se pose alors la question de
savoir si l'opinion exprimée par certaines personnes sur des sites internet doit être
considérée comme des pressions morales et psychologiques. Selon l'intention de
cette loi, il faudrait répondre par l'affirmative, mais se crée ou se conforte alors
une forme de délit d'opinion65. La double logique présentée se retrouve ici, d'une
part la volonté de protéger, par le droit, le sujet contre une certaine opinion, et
d'autre part, le non-respect de l'opinion d'autrui différente de soi, ce qui n'est pas
respectueux du principe de liberté. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs été saisi,
dans le cadre du contrôle a priori de la loi, et déclare la loi constitutionnelle avec
réserve d'interprétation. Le Conseil précise d'abord, « d'une part, la seule diffusion d'informations à destination d'un public indéterminé sur tout support,
notamment sur un site de communication au public en ligne, ne saurait être regardée comme constitutive de pressions, menaces ou actes d'intimidation au sens des
65. Pour une argumentation en ce sens v. B. Mathieu, Le droit contre la démocratie, LGDJ, Coll.
Forum, 2017, pp. 171-184. L'auteur cite la loi du 17 mai 2008 portant diverses disposition d'adaptation
du droit communautaire dans le domaine de la lutte contre la discrimination, et la loi 27 avril 2017
relative à l'égalité et à la citoyennneté, ainsi que les loi sur la presse. Dans ce même sens, d'une
définition de ce que le citoyen doit croire, penser, exprimer, écrire : V. G. Carcassonne, « Société de
droit contre Etat de droit », Mélanges Braibant, Dalloz, 1996, pp. 37-45.

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