Contextes - Penser l'ancien droit public - 263

Conclusions générales
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du monde social « ordinaire »3
. Pour n'en prendre qu'un exemple, il est tout à
fait envisageable, probable aux yeux de certains, que les ressorts jusnaturalistes
soient beaucoup plus présents en pratique qu'en théorie. Or, tous les juristes
en conviendront, contre certains sociologues mêmes, cela ne signifiera pas
que les pratiques seules, dans leurs manifestations les moins réflexives - la
coutume ? le procès- verbal ? - donnent le « la » de la signification juridique. Elles
n'en constituent jamais qu'une facette ou une modalité particulière, locale et
temporaire. De même, il est très différent de distinguer les formes historiques
du jusnaturalisme et du positivisme comme doctrines4
, d'en faire les deux faces
d'un clivage fondamental du droit ou de tenter de tracer les contours du droit
objectif dans un contexte donné5
.
Enfin, l'ambivalence vis- à-vis des méthodes est peut- être aussi ancienne que le
droit. À Rome, deux ruptures fondatrices sont introduites lorsque la loi des XII
Tables arrache le droit au pouvoir des consuls, puis lorsque sont publiées les
formules des actions de la loi que les pontifes conservaient jalousement6
. Il perd
alors un peu de ce mystère qui le préserve et, à travers lui, ceux qui en ont la
maîtrise. Un nouveau mystère surgit pourtant autour des méthodes d'interprétation.
Dès l'Empire et depuis, les juristes commencent à cultiver avec la méthode
une relation qui tient de la valse- hésitation. Règles, formalisme, institutionnalité,
pouvoir, réflexivité dogmatique, enseignement : autant de manifestations du
droit qui portent à préciser les méthodes. Mais celles- ci divergent quant à la
3. Outre l'institution dogmatique chère à P. Legendre, v. notamment : M.-A. Hermitte, « Le
droit est un autre monde », Enquête. Anthropologie, histoire, sociologie, 7 (Les objets du droit), 1999,
p. 17-37 (en ligne).
4. Le jusnaturalisme et le positivisme peuvent désigner des courants philosophiques ou doctrinaux
historiquement situés. Ils peuvent désigner aussi des positions épistémologiques - et morales - indépendantes,
en elles- mêmes, des phénomènes juridiques auxquels elles sont appliquées. Par suite,
jusnaturalisme et positivisme relèvent à la fois d'un plan historique et d'un plan anhistorique ;
v. par ex. : S. Goyard- Fabre, Les fondements de l'ordre juridique, Paris, PUF, coll. « L'interrogation
philosophique », 1992 ; C. Grzegorczyk, F. Michaut, M. Troper (dir.), Le Positivisme juridique,
Bruxelles/Paris, LGDJ/Story Scientia, coll. « La pensée juridique moderne », 1992 ; M. SaintHilaire,
Les positivismes juridiques au xxe
siècle. Normativismes, sociologismes, réalismes, Québec,
Presses de l'Université Laval, coll. « Dikè », 2020 ; G. Bligh, N. Sild (dir.), Actualité du droit naturel.
De la vitalité des doctrines aux impensés du droit positif, colloque (en ligne), UPEC, MIL, 28 janvier,
4, 5, 11 et 12 février 2021.
5. Pour une perspective à la fois historique et comparée, v. B. Dupret, Positive Law from the
Muslim World. Jurisprudence, History, Practices, Cambridge, CUP, coll. « Law in Context », 2021.
6. M. Humbert, « La crise politique du ve
siècle et la législation décemvirale », Crise et transformation
des sociétés archaïques de l'Italie antique au ve siècle av. J.-C., Rome, École française de Rome, coll.
« Publications de l'ÉFR », 1990, p. 263-287 ; M. Humm, « La publication des " actions de la loi " et
du calendrier civique », Appius Claudius Caecus. La République accomplie, Rome, École française de
Rome, coll. « Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome », 2005, chap. 9, p. 441-480
(en ligne).
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