Contextes - Penser l'ancien droit public - 37

Aurore Gaillet
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pas moins discutée38
; ou, pour le dire avec les mots de Michel Troper, « l'on
sent bien ce que peut avoir d'absurde l'emploi de concepts comme " État " ou
" constitution " à propos des sociétés antiques. La seule limite est le caractère
opératoire des concepts. Permettent- ils ou non de rendre compte [...] d'une
réalité différente de celle pour laquelle ils ont été d'abord pensés ? »39
. Quelques
indications suffiront ici, tant la discussion est vaste et d'ores et déjà intensément
alimentée.
Peut- être peut- on commencer par rappeler que ces réflexions se situent dans
le cadre d'un système spécifique, celui du constitutionnalisme occidental, qui est
aussi une histoire de l'État démocratique et libéral, associé à la quête d'un progrès
de l'État de droit et des garanties des droits et libertés, notamment individuels40
.
Pareil système n'est toutefois pas « sans concurrence » et suppose au contraire
d'être observé au prisme de conditions politiques et juridiques particulières41
.
Dans ce cadre, adopter un réflexe d'histoire constitutionnelle comparée
permet d'identifier les termes « État » et « constitution » comme des phénomènes
historiques42
.
État. - S'agissant de l'État, on sait combien son histoire est aussi celle de la
puissance publique, de l'organisation du pouvoir et des structures de domination43
.
L'organisation politique du Saint- Empire romain
, de la souveraineté aussi - terme si difficile à concevoir dans les structures
composées et multipolaires44
allemande « Dreh- und Angelpunkt » (« drehen » signifiant tourner, pivoter ; « Angel » renvoyant à
« gond », forme de charnière donc).
38. C. Gusy, « Verfassungs(ge)schichten », in M. Stolleis, Verfassungs(ge)schichten, op. cit., 75.
(« Die noch immer nicht abgeschlossenen Diskussionen [...:], ob Begrifflichkeiten wie " Staat " oder
" Verfassung " für die Vormoderne überhaupt angemessene Beschreibungs- und Deutungsmuster
sein können »).
39. M. Troper, « Sur l'usage des concepts juridiques en histoire », loc. cit., p. 1182.
40. Parmi d'autres : R. C. Van Caenegem, An Historical Introduction to Western Constitutional
Law, Cambridge University Press, Cambridge 1995 ; B. Ackerman, « The Rise of World
Constitutionalism », Virginia Law Review, 771, 1997, p. 779-780 ; C. M. Herrera, « Ce que le
postcolonialisme ferait au constitutionnalisme. Pour une critique de la raison constitutionnelle »
in A. Geslin, C. M. Herrera, M.-C. Ponthoreau (dir.), Postcolonisme et droit : perspectives épistémologiques,
Paris, Kimé, 2020, p. 133-158.
41. C. Gusy, « Verfassungsgeschichte », loc. cit.
42. M. Stolleis, « Concepts, Models and Traditions of a Comparative European Constitutional
History », loc. cit.
43. W. Reinhard, Geschichte der Staatsgewalt. Eine vergleichende Verfassungsgeschichte Europas von
den Anfängen bis zur Gegenwart, 1999.
44. A. Gaillet, « La souveraineté en Allemagne - perspectives historiques d'un parcours
compliqué », in F.-V. Guiot (dir.), La souveraineté européenne. Du discours politique à une réalité
juridique ?, Paris, Mare et Martin, à paraître, 2022 (avec des renvois aux écrits de référence sur cette
question).
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