Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 121

Le cadre de l'action commerciale collective

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217.  De même, le comte de Pontchartrain reçoit en 1705 les plaintes de marchands de l'échelle de Larnaca contre le consul François Luce qui n'a pas respecté
le principe majoritaire au sein de l'assemblée90. Les ministres saisis de ces affaires
se contentent le plus souvent d'envoyer des rappels à l'ordre à leurs agents, sans
toutefois les révoquer.
218.  Une fois cette procédure accomplie, les marchands réunis dans l'assemblée du corps de la nation adoptent d'une délibération qui s'impose à l'ensemble
des membres. Ces délibérations peuvent néanmoins avoir plusieurs objets qui permettent de distinguer une ébauche de typologie des décisions.

SECTION II
LA TYPOLOGIE DES DÉLIBÉRATIONS
DE L'ASSEMBLÉE
219.  Trois catégories de résolutions de l'assemblée peuvent être distinguées,
en fonction de leurs finalités : des délibérations financières (I), des délibérations
commerciales (II) et des délibérations ayant pour objet d'élire des députés (III).
I. LES DÉLIBÉRATIONS FINANCIÈRES
220.  L'assemblée procède à des délibérations afin de lever des subsides pour
acquitter les avanies imputées au corps de la nation (A) et consentir les nombreux
présents imposés par les autorités de l'échelle, appelés « donatives » (B).
A. L'IMPUTATION DES AVANIES
221.  L'assemblée du corps de la nation lève régulièrement des fonds pour soutenir les avanies91. Ce terme d'avanie, « particulièrement en usage dans le Levant et
dans tous les États du grand seigneur », est défini par Savary des Bruslons, comme
« les présens, ou les amendes, que les pachas et douaniers Turcs exigent des marchands chrétiens, ou leur font payer injustement et sous de faux prétextes de contravention »92. Les avanies reposent dès lors sur un principe de solidarité. En cela, elles
90. À ce sujet, voir la Lettre du comte de Pontchartrain à François Luce, consul à Larnaca, 11 mars
1705 (éd.  A.  Pouradier Duteil-Loizidou, Consulat de France à Larnaca..., op.  cit., t.  IV,
p. 190-191).
91. Ce terme apparaît dans la première moitié du xive siècle, mais son étymologie n'est pas
clairement établie : il pourrait provenir du terme italien avania (imposition, vexation), du grec médiéval
abania (calomnie, délation), de l'arabe dialectal khawân (traitres) ou du turc avan (vexation), comme le
relève G. Bertrand, v° Avanie, Dictionnaire étymologique des mots français venant de l'arabe, du turc
et du persan, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 31. Au sujet des avanies, voir notamment F. Charles-Roux,
Les échelles de Syrie et de Palestine..., op. cit., p. 51-56 ; P. Masson, Histoire du commerce français dans
le Levant au XVIIe siècle, op. cit., p. 1-23.
92. J. Savary des Bruslons, v° Avanie, Dictionnaire universel de commerce (éd. cit., t. I, col. 184).
Voir aussi la définition du terme contenue dans les Observations de la Chambre du commerce de
Marseille sur les avanies du Levant, 23 décembre 1761 : « On entend au Levant par avanie, une insulte
dont on n'obtient la réparation qu'à force d'argent, parce qu'elle est faite essentiellement dans le
dessein d'en exiger ; une prétention extraordinaire, injuste, que le gouvernement ou les pachas forment
indifféremment contre les étrangers ou les sujets du grand seigneur ; enfin, les vexations et les affronts
auxquels on est exposé dans un pays où celuy qui commande exerce le pouvoir le plus absolu, le plus
illimité et où l'autorité elle même est souvent trop foible pour réprimer la licence des soldats ou

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