Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 165

Le développement de l'institution consulaire

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l'inspecteur Xavier d'Ortières contraint par exemple simplement le consul,
-Balthazard Sauvan, à déclarer publiquement dans une assemblée extraordinaire
du corps de la nation qu'il renonce définitivement au commerce95. Malgré l'interdiction royale, il semble qu'aucun consul n'ait vu son office révoqué pour avoir
-illégalement exercé le commerce96. Dans certaines échelles, comme à Smyrne, les
inspecteurs se rendent même complices des consuls qui se livrent au commerce, en
dissimulant les plaintes des marchands97. En effet, les autorités chargées du
contrôle se révèlent parfois corrompues, ainsi qu'en témoigne une affaire impliquant l'inspecteur du commerce de Marseille. En 1753, le consul de Seyde,
Honoré-Antoine Mossony de Verrayon, expédie à l'inspecteur Pignon une caisse
censée renfermer, d'après la police de chargement, plusieurs armes de contrebande qu'il aurait saisie sur un navire. La caisse, retenue en douane et ouverte par
erreur, contient en réalité une cargaison de soie destinée à la revente98. Si les dispositions relatives à l'exclusion du commerce sont largement transgressées,
d'autres qui imposent aux consuls de résider en personne dans le ressort de leur
consulat, paraissent toutefois mieux respectées.
2. L'obligation de résidence dans le consulat
308. En 1592, le Conseil de la ville de Marseille signale au duc de Mayenne
qu'une grande partie des consuls établis dans l'Empire ottoman ne résident plus
dans leurs consulats et préfèrent déléguer leurs fonctions à « des lieutenants et
vice-consuls qui n'ont point de sermens du roy et sont le plus souvent personnes
de basse qualité qui avilissent l'auctorité de la charge et sert plustost d'opression
que [de] soulagement »99. En pratique, les détenteurs d'offices concluent un
contrat d'affermage avec leurs délégués, par lequel ces derniers jouissent des droits
pécuniaires attachés à la fonction en contrepartie du paiement d'une rente
annuelle100. Dans des lettres patentes du 20 mai 1618, Louis XIII fustige les fermiers comme « tous incapables et ignorans »101 et interdit aux consuls d'affermer
leurs charges, sous peine et révocation de l'office pour le bailleur et de mort pour
le fermier. Il contraint par ailleurs ces officiers à résider en personne dans le ressort de leur consulat, sauf autorisation expresse du roi102. Si ce texte semble avoir
95. Procès-verbal de l'assemblée de la nation de Larnaca, 12 avril 1688 (éd. A. Pouradier DuteilLoizidou, Consulat de France à Larnaca..., op. cit., t. I, p. 147).
96. D'après les dépouillements opérés, aucun document ne fait mention d'une telle révocation.
97. Mémoire concernant l'eschelle de Smyrne, 20 mai 1688 : « Ledit consul a part dans le commerce
que les Frèves font à Smirne, il est le caissier. Ledit sieur d'Ortières a dissimulé cette plainte. Les
marchands soutiennent que ledit Fabre est consul luy mesme, et que pour s'attirer toutes les affaires de
l'eschelles il met tout en usage pour pénétrer dans celles d'autruy, ayant contraint les capitaines de luy
donner des manifestes de leur chargement quand ils arrivent avec les marques de chaque balle et les noms
des chargeurs, ce qui ne s'estoit jamais pratiqué jusques à présent. Il n'est rien de si important pour le
bien publique de remédier à cet abus » (Paris, AN, AE, BIII 235, pièce 18, fol. 2v).
98. Procès verbal de la Chambre de commerce de Marseille, 14 janvier 1754 (Marseille, ACCIM,
J 20) ; Procès verbal de la Chambre de commerce de Marseille, 15 janvier 1754 (Marseille, ACCIM,
J 20).
99. Mémoires et instructions baillées par la ville de Marseille à MM. les deputtés vers M. de
Mayenne, 1592 (cités par Y. Debbasch, La nation française en Tunisie..., op. cit., p. 174).
100. Cette pratique est notamment décrite par P. Ariste, Traicté des consuls de la nation françoise
aux pays estrangers, 1667 (Paris, BNF, ms. fr., 18595, p. 123-124).
101. Lettres patantes faisant deffences entre autres aux consuls établys aux eschelles du Levant de
négossier et traffiquer, 20 mai 1618 (Marseille, ACCIM, J 20, fol. 1).
102. Lettres patantes faisant deffences entre autres aux consuls établys aux eschelles du Levant de
négossier et traffiquer, 20 mai 1618 (Marseille, ACCIM, J 20, fol. 1v).

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