Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 174

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LES ÉCHELLES DU LEVANT ET DE BARBARIE

juridictions royales158. Le parlement de Provence estime toutefois, dans un arrêt
du 18 mars 1679, que les actes passés devant les chancelleries consulaires dérogent
à cette règle159. Les consuls des échelles, en leur qualité d'officier, reçoivent en effet
un sceau aux armes royales, leur permettant de sceller directement les actes
authentiques rédigés par les chanceliers et de les rendre ainsi exécutoires160.
À l'instar des notaires établis dans le royaume161, les contrats formés devant les
chanceliers des échelles confèrent donc aux créanciers une hypothèque générale
portant sur l'ensemble des biens de leurs débiteurs, tant meubles qu'immeubles162.
En pratique, on observe que les actes reçus en chancellerie sont conclus en présence de deux témoins instrumentaires et signés par eux, ainsi que par les parties.
Les chanceliers semblent donc se conformer aux prescriptions de l'article 165 de
l'ordonnance de Blois, promulguée en 1579, qui impose ces formalités aux
notaires, à peine de nullité de l'acte et de sanction pécuniaire arbitraire163.
326.  En raison de leur statut, les chanceliers étaient, à l'origine, entretenus
par les consuls comme de simples domestiques attachés à leurs maisons. L'ordonnance de 1681 met en place une rémunération des chanceliers à l'acte. Le montant
en est fixé par consensus entre le chancelier, le consul, les députés et les quatre
plus anciens marchands de la place, et affiché sous forme de tableau dans chaque
chancellerie164. Pour essayer de réduire les disparités entre les échelles, Louis XIV
fixe en 1692 des droits uniformes prélevés pour chaque catégorie d'acte165 : 6 livres
pour la rédaction d'un testament, 4 livres pour une police d'assurance, 2 livres
pour un contrat de dépôt... Un arrêt du Conseil du roi du 3 mars 1781 en réévalue
le montant et défend aux chanceliers de lever de plus grands droits, sous peine de
destitution de leur emploi, de restitution des deniers et de 1 500 livres d'amende166.
158. Sur ce mécanisme, voir J.-N.  Guyot, v°  Légalisation, Répertoire universel et raisonné de
jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale (éd. cit., t. X, p. 31a-33b).
159. L'arrêt du 18 mars 1679 est rapporté par H. de Boniface, Arrests notables de la Cour de
parlement de Provence, Cour des comptes, Aydes et finances du même païs, VIII, 3, 13 (éd. cit., t. IV,
p. 476).
160. De Lorme, Traité sur la marine. Usage et coutumes du commerce de Marseille, V, 4 (Paris,
BNF, Cinq cents de Colbert, 200, fol. 119v).
161. À propos du notariat sous l'Ancien Régime, voir J. Hilaire, La science des notaires, Paris,
PUF, 2000 ; F. Roumy, « Histoire du notariat et du droit notarial en France », Handbuch zur Geschichte
des Notariats der europäischen Traditionen, éd.  M.  Schmoeckel et W.  Schubert, Baden-Baden,
Nomos, 2009, p. 145-154.
162. De Lorme, Traité sur la marine. Usage et coutumes du commerce de Marseille, V, 4 (Paris,
BNF, Cinq cents de Colbert, 200, fol.  119v-120). L'hypothèque générale est une clause de style,
présente dans tous les actes notariés. Sur ce point, se référer à l'article de M. Vidal, « L'hypothèque
des actes privés reconnus ou vérifiés en justice. De la logique à l'inelegantia iuris (XVIe-XXe siècle) »,
RHD, t. 82/4, 2004, p. 661-676.
163. Ordonnance rendue sur les plaintes et doléances des États-généraux assemblés à Blois en
novembre 1576, relativement à la police générale du royaume, mai 1579, art. 165 (éd. cit., t. XIV, p. 420).
164. Ordonnance de la marine, août  1681, livre  I, titre  IX, art.  17 (éd.  cit., p.  48-49). Voir
également les commentaires de cet article par B.-M. Émérigon, Nouveau commentaire sur l'ordonnance
de la marine du mois d'août 1681 (éd. cit., t. I, p. 167-168) ; et R.-J. Valin, Nouveau commentaire sur
l'ordonnance de la marine du mois d'août 1681 (éd. cit., t. I, p. 261-262). Pour un exemple de tableau,
voir la Liste des tarifs des écritures établie et signée par Dominique Jauna, chancelier, s.  d.
(éd. A. Pouradier Duteil-Loizidou, Consulat de France à Larnaca..., op. cit., t. I, p. 144-145).
165. Estat des droits et émolumens que le roy veut être attribuez et payez aux chancelliers des
échelles de Levant et de Barbarie, 15 juin 1692 (Marseille, ACCIM, J 18). J. Cras, « Une approche
archivistique des consulats... », loc. cit., p. 63-65.
166. Arrêt concernant les droits et émolumens attribués par sa majesté aux chanceliers des consulats
des échelles du Levant et de Barbarie, 3  mars 1781 (éd.  Marseille, Sibié, 1781 [Marseille, ACCIM,
J 18]).

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