Bibliothèque d'histoire du droit et droit romain - Tome 38 - Les échelles du Levant et de Barbarie - 220

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LES ÉCHELLES DU LEVANT ET DE BARBARIE

résidence, originairement fixée à dix ans par l'ordonnance du 21 mars 1731, pour
permettre aux marchands installés dans les échelles d'y liquider leurs affaires84. Par
conséquent, le nombre de maisons dans chaque échelle est fixé en 1742 par le
ministre85. Les commissionnaires surnuméraires sont en outre sommés de quitter
l'Empire ottoman, à l'exception des négociants agréés par la Chambre qui jouissent
d'une dérogation leur permettant de continuer leur activité pendant cinq années
supplémentaires86. À cet effet, le comte de Maurepas charge l'ambassadeur et les
consuls de renvoyer dans le royaume tous les autres marchands87.
416.  L'entrée en vigueur de cette mesure soulève immédiatement d'innombrables critiques88. Dans les échelles, les commissionnaires se répandent en supplications auprès des consuls, expliquant que la conjoncture ne se prête pas à leur
retour89. À Marseille, les commettants répètent inlassablement les mêmes arguments en faveur de la suppression de la limitation : le volume considérable du
commerce franco-ottoman nécessite de nombreux opérateurs commerciaux pour
l'exploiter90 ; la limitation comporte un caractère oligopolistique préjudiciable au
84. On ne trouve pas de témoignage de cette prorogation dans la correspondance administrative.
Elle est néanmoins clairement évoquée dans les procès-verbaux des assemblées du corps de la nation
et notamment dans une intervention du consul de La Canée, transcrite dans le Procès-verbal de
l'assemblée de la nation à La Canée, 18  juillet  1741 : « Sa majesté renvoye à l'année prochaine
l'exécution de son ordonnance du 21 mars 1731. Concernant la résidence de ses sujets en Levant et la
réduction des maisons des négociants qui y sont établies qui devoit avoir lieu cette année, je préviens
ceux qui sont dans le cas et je les avertis conformément à mes ordres de se mettre en estat de repasser
en France l'année prochaine » (Nantes, CADN, 328 PO, série 1, 191).
85. Les instructions à ce sujet du comte de Maurepas semblent avoir été perdues. On trouve cependant
des indications sur le nombre de maisons dans des témoignages indirects, comme dans le Procès-verbal de
l'assemblée de la nation à La Canée, 12 décembre 1783 : « Messieurs, depuis l'arrangement qu'il a plu au roy
de faire par la fixation des cinq maisons de commerce que sa majesté vous a accordé pour cette échelle... »
(Nantes, CADN, 328 PO, série 1, 191). Le quota de maisons a par ailleurs fait l'objet de modifications dans
les années qui ont suivi, comme en témoigne la Lettre de Maurepas à la Chambre de commerce de Marseille,
22 septembre 1748 : « Le roy, à qui j'en ay rendu compte, a approuvé que le nombre des maisons de cette
échelle [de Tunis] fût réduit à six pour l'avenir » (Marseille, ACCIM, J 59, fol. 1).
86. Lettre de Maurepas à la Chambre de commerce de Marseille, 31  août  1742 (Marseille,
ACCIM, J 59, fol. 1v-2).
87. Lettre de Maurepas à la Chambre de commerce de Marseille, 31  août  1742 (Marseille,
ACCIM, J 59, fol. 1).
88. J.-P.  Farganel, « Négociants marseillais au Levant et dirigisme commercial : l'émergence
d'une contestation nouvelle de l'autorité monarchique », Provence historique, Marseille, 1996, n° 183,
p. 10 et s.
89. Pour un exemple, voir le Procès-verbal de l'assemblée de la nation à La Canée, 12 décembre 1783 :
« Lesdits sieurs représentent très respectueusement à M. le consul que le bruit qui c'est répendu sur le païs
que la pluspart des négociants françois sont sujets à repasser en France dans peu de tems, leur fait un tort
inexprimable à l'égard de leurs fonds dispersés depuis quelques années. Comme tout le commerce des
François sur ce royaume consiste dans les levées d'huile, ils sont obligez de donner beaucoup d'argeant à
l'avance, soit pour les achats que l'on fait, soit en placement au change pour se procurer les huiles. Ils ont
essuyés en 1740 et  1741 deux pestes consécutives qui ont durée environ dix mois chacunes. Les deux
dernières récoltes ont esté très médiocres et la plus part des huiles ont esté enlevées pour la Turquie par les
gens du païs à des prix exorbitants » (Nantes, CADN, 328 PO, série 1, 191).
90. Mémoire des négocians de Marseille tant sur les réductions des maisons du Levant que sur tous
les autres arrangements de ce commerce, 1742 : « Un commerce qui par son grand volume et ses
immenses détails, a absolument besoin d'un nombre considérable d'établissements capables de
procurer, par les différentes rellations que chaque [sic] étably, une [sic] plus grande débouchés aux
marchandises d'entrée [et] de sortie, paroissant morallement impossible aux négociants que
l'expérience authorise, de pouvoir continuer ce comerce avec la même vigueur et le même avantage
pour l'État.  [...] On n'y pourra plus employer autant de testes et de bras que la nécessité de son
exploitation en exige » (Marseille, ACCIM, J 59, fol. 1-1v).

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