Bibliothèque de droit privé - Tome 605 - La propriété commune - 28

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LA PROPRIÉTÉ COMMUNE

(art. L. 113-3, CPI) relève de la propriété commune car elle repose sur une « réelle
cohérence interne et ne se contente pas d'être une simple addition d'œuvres »43.
La propriété commune est une propriété - sous-entendue une propriété privée,
au sens du Code civil.
La propriété commune diffère en cela des choses communes, qui désignent
des biens non appropriables (art. 714, C. Civ.). Même si dans les deux cas il y a un
usage en commun des choses, les deux notions sont antinomiques. Les choses
communes traduisent le refus du droit d'approprier certaines choses, alors que la
propriété commune permet précisément cette appropriation44.
La propriété commune se distingue ensuite de la propriété publique. Certes,
un courant doctrinal (Planiol, Vareilles-Sommières, Berthélémy) a pu proposer
au début du XXe siècle une analyse de la propriété publique comme la propriété
commune des administrés, l'État n'étant qu'une fiction45. L'assimilation n'en
reste pas moins impossible pour une raison plus radicale, tenant à la nature
différente des deux propriétés. La propriété publique garde toujours l'empreinte de la puissance publique quoiqu'en des proportions variables selon les
domaines46. Rien de tel dans les propriétés communes, qui ne concernent que
des particuliers.
Elle se distingue enfin des " biens communs " ou " communs " , bien que la différence soit plus subtile47. Le mouvement des " biens communs " est sans doute
l'incarnation contemporaine de la grande histoire de la propriété collective. Bien
que les approches au sein de ce mouvement soient diverses, les " biens communs "
sont généralement présentés comme un paradigme alternatif au modèle de la propriété privée. Là où la propriété privée repose sur un pouvoir d'exclusion et un
monopole du propriétaire, les " biens communs " sont des biens appropriés par un
large groupe, où chacun dispose d'un " droit d'accès " 48.
43. G.  SALORD, La propriété collective des œuvres, thèse Paris II, 2007, n° 350. À l'inverse,
l'œuvre collective, définie à l'article L. 113-2 al.  3, est « sauf preuve contraire, la propriété de la
personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des
droits de l'auteur » (art. L. 313-5, CPI).
44. M.-A.  CHARDEAUX, Les choses communes, préf. de G. LOISEAU, LGDJ, 2006.
45. Ph. YOLKA, La propriété publique. Éléments pour une théorie, préf.  d'Y. GAUDEMET,
LGDJ, 1997, p. 187 et s.
46. Cf. N.  Foulquier, Droit administratif des biens, 4e éd., LexisNexis, 2018, n° 145 : « En réalité,
même en ce qui concerne les biens du domaine privé, le droit de propriété publique est innervé par
l'intérêt général et par la raison d'être de l'administration, i. e la satisfaction des administrés et non la
sienne propre. Son droit de propriété n'est jamais individualiste ; il est altruiste ».
47. Le vocabulaire est malheureusement loin d'être fixé. Dans la doctrine française, un consensus
semble s'opérer pour appeler " communs " des ressources gérées au moyen d'une structure collective de
gouvernance. Le terme est plutôt économique. À l'inverse, le terme de " biens communs " désigne une
catégorie de biens dotés d'une forte dimension collective, par-delà leur mode d'appropriation (privé
ou public). L'eau douce en est un exemple. Sur ces points, v. Dictionnaire des biens communs, sous la
dir. de M. CORNU, F. ORSI et J. ROCHFELD, PUF, 2017.
48. 
La littérature sur le sujet croît de manière exponentielle. L'ouvrage fondateur est
E. OSTROM, Governing the commons. The Evolution of Institutions for Collective Action, Cambridge
University Press, 1990, (traduction : E. OSTROM, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle
approche des ressources naturelles, De Boeck, 2010). Plus récemment, v. Repenser les biens communs,
sous la dir. de B. PARANCE et J. de SAINT-VICTOR, CNRS éditions, 2014. Le retour des communs :
la crise de l'idéologie propriétaire, sous la dir. de B. CORIAT, Les liens qui libèrent, 2015. P. DARDOT
et C. LAVAL, Commun. Essai sur la révolution au XXIe siècle, La Découverte, 2014. Dictionnaire des
biens communs, sous la dir. de M. CORNU, F. ORSI et J. ROCHFELD, PUF, 2017.

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