Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 72 - Le Ministre des finances sous la Ve République - 278

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LE MINISTRE DES FINANCES SOUS LA Ve RÉPUBLIQUE

participer financièrement, les souverains se sont vus contraints de réunir périodiquement leurs sujets pour qu'ils y consentent d'eux-mêmes. De là sont nés en
France les États généraux et en Grande-Bretagne les premiers parlements dont
leur origine réside dans le consentement de l'impôt et le vote du Budget.  Les
régimes parlementaires sont alors nés de ce nécessaire consentement de l'impôt
par les citoyens, conduisant au principe de légalité en matière financière et fiscale.
Initialement exprimé dans le Décret du 13 juin 1789, ce principe de légalité fiscale
a été repris à l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui
dispose : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs
représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en
suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».
Malgré l'instauration du droit de consentir l'impôt dans les textes au lendemain de la Révolution, l'attribution de la compétence d'adoption des textes financiers au Parlement s'inscrivit progressivement à partir de la Restauration4. Dès
lors, outre la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le droit pour les
représentants de la Nation de consentir aux dépenses publiques fut également
affirmé au sein de la Loi du 17 juin 17915, de la Constitution de l'an III6, et de la
Constitution de l'an  VIII7. Pourtant, il fallut attendre bien des années avant de
connaître les prémices d'une réelle application de ce principe. Si le Parlement votait
les recettes, le vote des dépenses publiques ne lui revint que bien plus tard en raison
de la confusion entre le droit d'ordonner une dépense publique et l'ordonnancement de celle-ci. Autoriser le Parlement à ordonner une dépense publique, donc à
autoriser le ministre à ordonnancer, ne lui donne pas le droit d'ordonnancer une
dépense. Cependant, l'exécutif était frileux et préférait ne pas appliquer cette règle
pourtant ancrée dans les textes. Il fallut attendre la fin de l'Empire pour connaître
réellement la consécration du droit de voter les dépenses publiques comme compétence du pouvoir législatif. Et encore, si la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814
consacrait le libre consentement de l'impôt8, elle ne prévoyait pas l'utilisation des
recettes et donc l'autorité ayant compétence pour fixer le montant des dépenses
publiques. Deux théories s'opposaient : celle des monarchistes estimant que seul le
roi détenait le droit d'appliquer aux dépenses l'impôt consenti par les représentants de la Nation ; et celle des libéraux préférant voir cette compétence attribuée
au Parlement tel un prolongement nécessaire au vote des recettes. Cette dernière
théorie a finalement eu gain de cause en 1816 dès lors que les libéraux obtinrent la
majorité à la Chambre des députés. Cette vision fut inscrite dans la Loi du 25 mars
1817 instaurant le principe de spécialité des crédits et précisant que ces derniers
4. P.  Mansard, Les vicissitudes de la notion de budget de l'Ancien Régime au début de la
Restauration, Thèse pour le doctorat, dactyl., Paris, 1948, 338 p.
5. Loi 17 juin 1791 - Art. 93 : « Le corps législatif fixe les dépenses publiques de l'administration ».
6. Constitution de l'an  III - Art.  317 : « Les commissaires de Trésorerie sont chargés (...)
d'ordonner les mouvements de fonds et le paiement de toutes les dépenses publiques consenties par le
Corps législatif ».
7. Constitution de l'an VIII - Art. 45 : « Le gouvernement dirige les recettes et les dépenses de
l'État, conformément à la loi annuelle qui détermine le montant des unes et des autres (...) » ; Art. 56 :
« L'un des ministres est spécialement chargé de l'administration du Trésor public : il assure les recettes,
ordonne les mouvements de fonds et les paiements autorisés par la loi. Il ne peut rien faire payer qu'en
vertu : 1° D'une loi, et jusqu'à la concurrence des fonds qu'elle a déterminés pour un genre de dépenses ;
2° D'un arrêté du gouvernement ; 3° D'un mandat signé par un ministre ».
8. Charte constitutionnelle du 4 juin 1814 - Art. 48 : « Aucun impôt ne peut être établi ni perçu s'il
n'a été consenti par les deux Chambres et sanctionné par le Roi ».

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