CONCLUSION DU CHAPITRE 2 279. Maîtriser les risques est pour toute société un enjeu majeur. Au xviiie siècle, il est d'autant plus difficile d'y parvenir que ces risques sont souvent mal ou peu appréhendés. Certes, les associés savent toute l'importance qu'il faut accorder au choix des signataires d'engagements et les mesures qui peuvent être prises afin d'éviter qu'ils en fassent un mauvais usage. Ils sont conscients aussi du risque de trésorerie auquel ils sont exposés quotidiennement avec un équilibre toujours incertain entre les entrées et les sorties de fond. Ils sont également capables d'apprécier les risques de leur portefeuille de créances mais ils ne connaissent pas les possibilités éventuelles de le céder dans des conditions leur permettant de faire face au risque de liquidité. Ils sont mal armés pour faire face à un retournement inopiné ou brutal de leurs affaires. La maîtrise des engagements se résume à la confiance que leur inspirent, à plus ou moins bon escient, leurs contreparties. Il est d'autres risques plus insidieux qui peuvent les menacer. Ils ne se présentent pas à découvert mais se manifestent sournoisement. Alors que la société en nom collectif s'est construite sur l'honneur de son nom, l'usage permet à chacun d'emprunter un nom de fantaisie pour entrer dans l'arène. Les jeux ne sont pas égaux. Ils ne le sont pas non plus lorsque les rumeurs sont entretenues pour avilir un nom, flétrir une réputation ou l'usurper à son profit. Il n'est pas jusqu'au secret des affaires qu'il faut défendre sans que la loi y donne une protection suffisante. C'est le cas notamment pour les inventions mais aussi pour les transactions commerciales. Les associés en nom collectif ne sont pas épargnés dans les confusions qui en résultent. Les moyens de financement sont nombreux. L'utilisation des lettres de change et des billets est largement répandue. Les bourses de commerce ont été développées et la circulation d'une monnaie « papier » sous forme d'effets est devenue courante. Les associés en nom collectif sont à même d'en connaître tous les ressorts. Parallèlement, les prêts à intérêt pour le commerce sont largement admis. Les conditions semblent réunies pour assurer les financements souhaités. La réalité est cependant différente. La société en nom collectif n'a pas accès aux importants capitaux qui animent les marchés boursiers. Elle doit s'en tenir à l'argent qu'elle peut réunir dans son cercle immédiat ou à l'occasion de rencontres fortuites. Les risques d'infortune ne sont pas rares et il faudra attendre la fin du siècle pour que les sociétés en nom collectif puissent accéder à des formes plus institutionnelles de financement. Face à ces risques, il faut pouvoir mesurer concrètement les résultats de ses activités et assurer par là-même la gestion de la société. 978-2-275-08824-2__DOCFILE__4e_couverture.indd 253 16/12/2020 11:58:37