Bibliothèque de droit privé - Tome 612 - La relation entre l'arbitre et les parties - 176

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LA RELATION ENTRE L'ARBITRE ET LES PARTIES
§ 2. RÉFLExIONS SUR LA SOURCE DE L'OBLIGATION DE PAIEMENT
187. Il peut sembler de prime abord paradoxal de considérer que le principe
de l'obligation du paiement pesant sur les parties puisse découler de la convention
d'arbitrage puisque les arbitres n'y sont pas parties. L'utilisation du contrat d'arbitre
est sans doute la voie la plus commode afin d'expliquer que l'arbitre est
titulaire d'une créance sur les litigants. Le versement des honoraires étant sans
conteste une opération économique, il est normal de lui attribuer son support
privilégié, le contrat. Pourtant, la réalité qui vient d'être exposée, à savoir que les
parties consentent dès la conclusion de la convention d'arbitrage à verser aux
arbitres une rémunération, peut selon nous trouver une autre traduction juridique
que la figure du contrat d'arbitre.
188. Principe du paiement consubstantiel à l'engagement de recourir à l'arbitrage.
Nous avons rappelé que la conclusion d'une convention d'arbitrage engendrait,
à l'égard des parties, un effet positif les contraignant à soumettre leur
différend à un tribunal arbitral. Cet effet positif ne peut s'analyser en une obligation
stricto sensu, à savoir celle de porter le litige devant l'arbitre137
. En réalité, les
parties ne sont pas créancière et débitrice l'une de l'autre ; elles agissent dans leur
propre intérêt et non dans celui de l'autre. Cela tient au fait que la convention
d'arbitrage, en ce qu'elle permet aux parties de limiter l'exercice de leur droit
d'agir, les contraint à porter leur litige que devant un tribunal arbitral138
, lequel est
le plus souvent, pour ne pas dire toujours, rémunéré. Il en résulte qu'en souscrivant
une convention d'arbitrage, les parties renoncent à la justice publique et,
partant, à sa gratuité. Dans la mesure où le recours à l'arbitrage est par usage
onéreux, la restriction du droit d'action des parties est aussi d'ordre pécuniaire139
.
Cela revient, en d'autres termes, à admettre que le principe du paiement est
consubstantiel à l'engagement de recourir à l'arbitrage.
189. Modification du caractère non obligationnel de l'effet positif de la convention
d'arbitrage ? Notre réflexion commande de revenir sur le caractère non obligationnel
de l'effet positif de la convention d'arbitrage. En effet, nous avons
précédemment admis que la convention d'arbitrage était dépourvue de tout
contenu obligationnel dans la mesure où elle avait pour effet de créer, à l'égard des
parties comme des arbitres, d'autres effets de droit que ceux de créer, modifier,
transmettre ou éteindre des obligations au sens de l'article 1101 du Code civil. Il
faut alors se poser la question de la pertinence de cette position si l'on admet que
la source de l'obligation de paiement des honoraires des arbitres se trouve dans la
convention d'arbitrage. En première analyse, la reconnaissance d'un effet obligationnel
s'imposerait pour deux raisons.
D'abord, il peut être soutenu que, par la convention d'arbitrage, les parties
s'engagent l'une envers l'autre à régler leur part de provisions sur honoraires. En
effet, que l'arbitrage soit institutionnel ou non140
, les parties sont généralement
137. V. supra, n° 24 et s. et n° 37 et s.
138. Sous la seule réserve de leur faculté de renoncer à la convention d'arbitrage.
139. En ce sens, F.-X. Train, « Impécuniosité et accès à la justice dans l'arbitrage international
(à propos de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 17 novembre 2011 dans l'affaire LP c/Pirelli) »,
Rev. arb., 2012, n° 2, p. 267, spéc. p. 280 et s.
140. Dans l'arbitrage ad hoc, il arrive que les arbitres imitent les règles relatives aux frais et
honoraires de l'arbitrage prévues par les règlements institutionnels.

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