Bibliothèque de droit privé - Tome 612 - La relation entre l'arbitre et les parties - 219

LA FORMATION DE LA RELATION
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À notre sens, cette position qui consiste à attribuer un effet contractuel à
l'acceptation de l'arbitre risque de conduire à méconnaître son effet principal,
c'est-à-dire son effet procédural.
2. Prévalence de l'effet procédural de l'acceptation
244. Sur un plan théorique, l'interprétation contractuelle de l'acceptation
tirée de la spécificité du contrat d'arbitre apparaît contestable à plusieurs égards.
En premier lieu, l'affirmation selon laquelle la formation du contrat d'arbitre est
soumise à une condition suspensive de saisine du tribunal souffre d'une certaine
approximation. En effet, seule une obligation est affectée d'une condition suspensive
lorsque son effectivité est suspendue jusqu'à la réalisation d'un événement
futur et incertain31
. Ainsi, il nous semble que si l'obligation pour l'arbitre d'accomplir
sa mission peut assurément être retardée à une date ultérieure, en
revanche, son « consentement au contrat d'arbitre » ne peut être « donné sous la
condition que le tribunal soit effectivement saisi du litige »32
. L'échange des consentements
entraîne bien la formation d'un contrat, lequel ne produit simplement
pas son effet principal - obliger les parties à s'exécuter - par le jeu de la condition
suspensive.
Certes, on comprend que ce raisonnement contractuel s'explique parce qu'il
est fréquent, en pratique, que les arbitres acceptent leur mission en émettant certaines
réserves afin d'avoir le temps de pouvoir « rédiger en toute prudence l'acte
de mission »33
sans risquer de déclencher le délai de l'arbitrage. Il peut, également,
arriver que ce délai ne soit pas déclenché parce que l'arbitre n'a pas encore été
confirmé. Cette situation renvoie à la pratique de la confirmation des arbitres
effectuée par les institutions d'arbitrage34
. Dans cette hypothèse, l'arbitre a bien
accepté sa mission mais il doit attendre que l'institution procède à un certain
nombre de vérifications telles que le contenu de sa déclaration d'indépendance et
en particulier lorsque l'arbitre a émis des réserves, pour être saisi du litige.
Au demeurant, la transposition du raisonnement contractuel à des problématiques
propres à la procédure arbitrale n'apparaît pas adaptée. Il est nécessaire
de faire une distinction entre l'effet de l'acceptation et l'effet de la saisine. Voyons
justement, en second lieu, que la lettre de l'article 1456, alinéa 1er
, du Code de
procédure civile s'oppose à ce que la saisine du tribunal puisse être strictement
regardée comme une condition suspensive au sens de l'article 1304 du Code civil.
l'article 1456, alinéa 1er
245. Constitution et saisine du tribunal arbitral. Rappelons qu'en vertu de
, Code de procédure civile, le tribunal arbitral est constitué
lorsque les arbitres qui le composent ont accepté leur mission. L'acceptation a
alors pour effet d'achever la constitution du tribunal arbitral et d'emporter sa
saisine lorsqu'il est composé d'un arbitre unique. En présence d'un tribunal collégial,
il est acquis, depuis un arrêt Rambour35
, que la dernière acceptation permet
31. F. Terre, Ph. Simler, Y. Lequette, op. cit., p. 1261, n° 1218. Sur l'ensemble de la question
v. M. Latina, Essai sur la condition en droit des contrats, LGDJ, Bibliothèque de droit privé, 2009,
spéc. p. 20 et s.
32. Th. Clay, thèse préc., p. 514, n° 648.
33. J. Pellerin, note sous Cass. 1re
civ., 30 mars 2004, Rev. arb., 2005, n° 4, p. 979, spéc. 985.
34. V. par ex. art. 13 du règlement d'arbitrage de la CCI.
35. Cass. 1re
civ., 30 mars 2004, Rambour, n° 01-11.951, Bull. civ. I, n° 98, note J. Pellerin,
Rev. arb., 2005, n° 4, p. 979 ; JCP G, 2004, p. 179, obs. J. Ortscheidt ; obs. Th. Clay, D., pan., 2004,
3183.
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