Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 25 - Le principe d'égalité entre créanciers - 85

L'AMBIVALENCE DE L'ÉGALITÉ ENTRE CRÉANCIERS
73
collective. Dès le prononcé du jugement d'ouverture, les partenaires économiques
du débiteur perdent toute confiance en lui. La caractérisation d'un état de cessation
des paiements ou l'existence de difficultés que le débiteur n'est pas en mesure
de surmonter seul183
seurs et la rupture des concours bancaires »184
« entraîne quasi-automatiquement la perte du crédit fournis.
Il est alors primordial de rassurer les
partenaires économiques puisque l'absence de trésorerie mène inévitablement à
l'arrêt de l'activité. Or, les chances de redressement sont fortement réduites si
l'activité est paralysée. Il est alors nécessaire de trouver de nouveaux fonds pour
continuer la production.
Selon le Professeur Vasseur, l'égalité formelle et la discipline collective qui en
, car « aucun autre créan.
résulte,
assurent aux créanciers la possibilité de recevoir un paiement, au moins
partiel de la créance, en cas de défaillance du débiteur185
cier, grâce à sa plus grande diligence ou à sa proximité du débiteur, ne pourra se faire
payer à son détriment, voire rendre son droit inefficace, en absorbant l'actif »186
Ainsi, l'interdiction des paiements et ses corollaires, généralisés à l'ensemble des
créanciers, permettent l'obtention de nouveaux fonds. L'absence de cause de préférence
prémunit les créanciers des actions en paiement des autres cocontractants.
Ils sont alors certains de récupérer une partie des sommes avancées, aucun autre
créancier ne pouvant obtenir la totalité des actifs en paiement, à leurs dépens. L'espoir
d'obtenir un désintéressement minimum renforce la confiance des dispensateurs
de crédits, qui seront plus enclins à accorder de l'argent frais à l'entreprise en
difficulté. L'égalité des créanciers et la recherche de crédit sont donc indissociables :
« la règle de l'égalité, c'est le crédit envisagé du point de vue juridique et (...) le crédit,
c'est la règle de l'égalité envisagée au point de vue économique »187
.
112. Cette théorie doit toutefois être relativisée. L'égalité formelle en procédure
collective peut certes aboutir à l'obtention de nouveaux crédits mais le résultat
ne sera probablement pas à la hauteur des enjeux de la restructuration. Selon
la théorie exposée, le traitement uniforme des créanciers renforce le crédit général
du débiteur188
. Or, cela se révélera souvent insuffisant pour inciter les principaux
investisseurs à participer au sauvetage de l'activité. Lorsqu'un créancier accorde
de nouveaux fonds à une entreprise, celui-ci veut être assuré de récupérer sa mise,
voire davantage grâce à la production d'intérêts. La promesse d'un partage égal
des pertes ne sera pas suffisante pour l'inciter à investir dans une entreprise en
difficulté, seule la garantie d'être intégralement payé l'incitera à consentir de nouveaux
crédits. Or, le risque de défaillance est d'autant plus important quand le
débiteur est en procédure collective, puisqu'il se trouve soit en état de cessation
des paiements, soit face à des difficultés qui nécessitent l'intervention du pouvoir
judiciaire pour être résolues. L'ouverture d'une procédure collective affiche aux
yeux de tous que le débiteur rencontre des problèmes et qu'un passif plus ou
moins important n'est pas réglé. La discipline collective appliquée à tous les
créanciers après le jugement d'ouverture n'est pas non plus en mesure de rassurer
183. Article L. 620-1 du Code de commerce
184. P. Darrousez, « Le financement de la période d'observation. L'article 40 et les difficultés
de sa mise en œuvre », RPC 1990, p. 32.
185. M. Vasseur, Le principe de l'égalité entre les créanciers chirographaires dans la faillite,
éd. Rousseau et Cie, 1949, spéc. n° 5
186. Ibid. spéc. n° 5
187. Ibid. spéc. n° 4, p. 17
188. Ibid. spéc. p. 19

Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 25 - Le principe d'égalité entre créanciers

Table des matières de la publication Bibliothèque de droit des entreprises en difficulté - Tome 25 - Le principe d'égalité entre créanciers