Bibliothèque de droit privé - Tome 613 - La manifestation de la vérité dans le procès pénal : une étude comparée entre la France et les États-Unis - 369

L'eXAMeN CRITIQUe DeS MODeS De PRODUCTION De LA VÉRITÉ
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de démasquer d'éventuelles erreurs1190
. Au contraire, si l'avocat s'acharne alors
que le témoin pense sincèrement dire la vérité, cela renverra une image très négative
de la défense aux jurés et ne fera que renforcer la crédibilité du témoin1191
.
Par ailleurs, d'un point de vue stratégique, lorsqu'un avocat contre-interroge
. Les avocats américains parlent d'un procédé narratif, le
adopter la version de l'avocat le plus convaincant1194
. Ces stratégies sont très efficaces sur les jurés qui finissent par
. Cependant, elles relèvent
. Ces dérives sont d'autant
un témoin, ce qui est important n'est pas tant les réponses qu'il obtient que les
questions qu'il pose1192
story telling1193
davantage de la séduction intellectuelle que d'une approche neutre et objective
favorisant la manifestation de la vérité matérielle1195
plus spectaculaires lorsqu'elles concernent le témoignage des experts.
392. Des experts « saxophones ». Les experts étant rémunérés par les parties,
ils sont poussés à adapter leurs propos aux besoins de leurs employeurs, voire de
répéter ce que leur client leur demande1196
més : les « saxophones1197
, raison pour laquelle ils sont surnom».
La procédure accusatoire peut ainsi déformer la réalité
de l'état des connaissances scientifiques, en accentuant l'importance d'une
théorie soutenue par une minorité de scientifiques au détriment du consensus
établi par la majorité1198
.
Plus précisément, alors que, dans le champ scientifique, l'expert choisi est le
seul à soutenir cette vision (99 v. 1), dans le cadre du procès accusatoire le débat
scientifique devient un duel entre deux professionnels à égalité (1 v. 1)1199
. Il crée
in fine l'illusion d'un désaccord majeur au sein de la communauté scientifique,
1190. K. Roach, « Wrongful Convictions : Adversarial and Inquisitorial Themes », préc.,
p. 394 : « Although cross-examination may often be a powerful instrument to discredit a lying witness, it
is much less effective when a witness is honestly mistaken. Indeed, in such cases, defense lawyers run a risk
of impaling themselves on their bayonets ».
1191. Ibid., p. 387 : « A lawyer who aggressively cross-examines a crime victim or an innocent
bystander can hurt his or her own cause especially in a jury trial. Mistaken eyewitnesses are often not liars
who can be caught by aggressive cross-examination ».
1192. T. e. edelman, « Cross examination as Story-Telling », Clinical Law Review 2005, vol. 12,
p. 113 : « An interpretive framework that sees trial advocacy as story-telling and lawyers as story-tellers
may offer a useful perspective on the trial process, provide a measure for the success of some trial tactics,
and even explain some trial outcomes ».
1193. Ibid.
1194. Ibid., p. 114 : « Jurors naturally rely on story-interpreting techniques, because these
techniques are uniquely suited to the task of sifting through, organizing, and evaluating the information
presented during a trial ».
1195. Ibid., p. 115 : « To begin with, it radically undermines the traditional notion of trial as a
neutral procedure for discerning historical truth and of courtroom justice as a product of a mechanical
and objective process ».
1196. P. Mbongo, R. L. Weaver, Le droit américain dans la pensée juridique française
contemporaine. Entre Américanophobie et Américanophilie, préc., p. 49 ; K. A. Findley, « Adversarial
Inquisitions : Rethinking the Search of the Truth », préc., p. 916 : « Objective truth takes a back seat ».
1197. M. O. Finkelstein, op. cit., p. 141 : « In the US, expert witnesses are sometimes disparagingly
referred to as " saxophones " , instruments playing to the tune of their retaining lawyers ».
1198. R. Haw, « Adversarial economis in Antitrust Litigation : Losing Academic Consensus in
the Battle of the experts », New York University Law Review 2012, p. 1262-63 : « The adversarial
presentation of expert evidence can exaggerate the importance of a minority view on a scientific question.
As long as there is some scientifically legitimate difference of opinion, one side can exploit that difference
by calling an expert from the minority side ».
1199. Ibid. : « If, out of one hundred experts, ninety-nine agree on a proposition, one side may call
the outlier, and the other may call one of the heartland experts. This will make a real-world ratio of 99 :1
appear, in the courtroom, closer to 1 :1 ».

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