Bibliothèque de droit public - Tome 322 - La théorie de l'accessoire en droit administratif - 70

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LA THÉORIE DE L'ACCESSOIRE EN DROIT ADMINISTRATIF
ce domaine requiert le renoncement de l'Administration à exiger la remise en
l'état des terrains occupés, ce transfert est également conditionné par l'abandon
de l'ouvrage concerné par son propriétaire. Pour comprendre ce point, il est intéressant
d'effectuer une comparaison avec la situation qui prévaut en droit privé.
Si à l'issue d'un bail, le propriétaire du fonds souhaite récupérer la propriété des
ouvrages construits par le preneur, il est obligé de rembourser à ce dernier « soit
une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux
et le prix de la main-d'œuvre estimés à la date du remboursement, compte tenu
de l'état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages »124
.
Dès lors, si en cours de contrat, il sera parfois dans l'intérêt du preneur de procéder
à la démolition de ses constructions, notamment afin d'améliorer la productivité
ou l'utilité du fonds loué, une fois le bail expiré en revanche, il sera toujours
plus rentable pour lui de se faire indemniser ; si le bailleur le lui propose, son
éventuel refus ne pourrait en conséquence être interprété que comme une volonté
de nuire125
le preneur perd sa liberté de démolir dès l'échéance du bail126
proche de ladite échéance127
. Le propriétaire du fonds dispose alors formellement
du pouvoir de s'opposer à l'enlèvement des constructions. Il en résulte, comme
l'explique Jean-Gabriel Sorbara, que « le jeu de l'accession ne naît pas d'un accord
de volontés mais de la décision unilatérale du propriétaire qui décide de l'avenir du
bien en cause selon qu'il souhaite le conserver ou non. Le constructeur n'ayant jamais
à donner son accord, il est difficile d'admettre qu'il puisse s'agir d'une cession volontaire
et encore moins d'une vente. »128
62. La situation est en revanche très différente en ce qui concerne les
ouvrages construits sur le domaine public. En effet, à l'inverse de ce qui prévaut
en droit civil, l'occupant privatif du domaine public n'a en principe droit à aucune
indemnité. Certes, l'option de la remise gracieuse restera tout de même bien souvent
avantageuse pour ce dernier, car si par le passé il pouvait apparaître profitable
de récupérer des matériaux de constructions nobles, tels que des pierres de
taille ou des poutres en bois massif, l'intérêt semble bien moins évident lorsqu'il
s'agit de démonter une construction en béton et en tôle. L'abandon des ouvrages
peut donc apparaître comme une sorte de « gagnant-gagnant » : la personne
publique récupère sans frais une construction qui pourra ultérieurement lui être
utile ; la personne privée se débarrasse sans frais d'un ouvrage dont la destruction
pourrait être fort coûteuse. Il peut néanmoins arriver que la démolition demeure
plus rentable que l'abandon. En pareil cas, accorder au propriétaire du domaine
le pouvoir de s'opposer à cette démolition reviendrait en réalité à lui octroyer un
pouvoir d'expropriation à titre gratuit ; ce qui serait évidemment contraire à l'article
17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen129
. Ainsi, à l'inverse
124. Article 555 du Code civil.
125. William Dross, Le mécanisme de l'accession. Éléments pour une théorie de la revendication
en valeur, Thèse Nancy II, 2000, p. 146-147, n° 145.
126. Cass. soc., 31 juillet 1950, Hennequin c/ époux Lagarde : Bull. civ. III, n° 716.
127. Cass. soc., 29 janvier 1954, Geddo c/ Tosi : Bull. civ. IV, n° 71 : « qu'en application de l'article 555
du Code civil, lorsque le preneur a fait des plantations ou constructions, le bailleur peut, au moment où le
contrat de louage touche à sa fin, s'opposer à leur enlèvement aux conditions prévues par cet article ».
128. Jean-Gabriel Sorbara, « L'apport de la théorie civiliste au droit de propriété des
constructions sur un fonds public », RFDA 2017, p. 341.
129. « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la
nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable
indemnité. »
. La chambre sociale de la Cour de cassation en déduit logiquement que
, et même à l'ap
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