Précis Domat - Droit des contrats spéciaux civils et commerciaux - 14e - 558

DROIT DES CONTRATS SPÉCIAUX CIVILS ET COMMERCIAUX
aucun revenu et perdra même le capital investi : son titre est une « action » (ou part
sociale) qui procure un « dividende ».
Claire dans le principe, la distinction est parfois délicate à appliquer. Notamment
lorsque le contrat prévoit un intéressement du prêteur aux bénéfices : par
exemple la même remise d'argent pour acheter un bien en vue de partager la
plus-value à la revente a été jugée constituer tantôt un prêt2
, tantôt un apport en
société3
.
L'évolution contemporaine du droit des sociétés a d'ailleurs nuancé l'opposition
en créant toute une série d'instruments intermédiaires en vue de drainer
l'épargne privée vers les entreprises : prêts participatifs (le prêteur reçoit à la fois
un faible intérêt fixe et une participation aux bénéfices, mais n'aqu'une créance de
dernier rang en cas de « faillite » de la société)4
, actions à dividende prioritaire
(sans droit de vote, mais conférant une priorité dans le paiement des dividendes et
dans le remboursement en cas de « faillite »).
De plus, il arrive souvent que prêt et apport en société coexistent : c'est la pratique
des « comptes courants d'associés » par laquelle ces derniers laissent des
fonds à la disposition de la société (par exemple en ne percevant pas leurs dividendes).
Ces comptes courants constituent des prêts5
.
mais dispensés de la formalité de
la stipulation écrite pour les intérêts (infra, no 839) et remboursables à tout moment6
et sans le tempérament secourable de l'article 19007
825 Prêt et opération de crédit. S'il est évident que le prêt est une opération de
crédit, il est loin d'épuiser cette catégorie plus large, définie par l'article L. 313-1
du Code monétaire et financier (qui en réserve aux banques l'exercice habituel)
comme « tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet
de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ou prend dans l'intérêt de
celle-ci un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement ou une
garantie ».
Il existe entre banques et entreprises de nombreuses techniques juridiques de
crédit qui ne sont pas des prêts parce que, si la banque avance de l'argent, ce
n'est pas l'entreprise elle-même qui le remboursera : ainsi tous les moyens de
mobilisation des créances à terme de l'entreprise (cession « Dailly », affacturage,
escompte d'effets de commerce : le banquier paie immédiatement à l'entreprise des
créances qu'il recouvrera à l'échéance sur des tiers, le client n'étant que garant de
ce recouvrement).
Il en existe d'autres qui, sous diverses dénominations, constituent au contraire
de véritables prêts : facilités de caisse, avances en découvert, crédits relais, crédits
de campagne, avances en compte courant, etc.
■ 2. Cass. com., 8janv. 1969, Bull. IV, no
■ 3. Cass. 1re
11.
civ., 27 févr. 1973, Bull. I, no
73.
■ 4. Comme ce n'est pas un véritable prêt, il n'entre pas dans le champ d'un cautionnement garantissant
les prêts en général du débiteur : Cass. com., 9juin 1992, Bull. IV, no
233.
■ 5. V. URBAIN-PARLEANI, Les comptes courants d'associés, LGDJ, 1986 - DANET, RTD com. 1993.55 -
Cass. com., 18 nov. 1986, Bull. IV, no
■ 6. Cass. com., 8 déc. 2009, no
216 - 24juin 1997, Bull. IV, no
■ 7. Cass. com., 10 mai 2011, Bull. IV, no
558
207.
08-16418 - Cass. com., 10 mai 2011, nº 10-18749.
73 ; D. 2011.2383, note BLOUD-REY.
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