Hors collection - La confiscation des avoirs criminels - 146

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La confiscation des avoirs criminels

troisième alinéa leur confère seulement « la faculté de provoquer le partage
au nom de leur débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui ».
Pourquoi une telle interdiction des saisies, y compris conservatoires46,
de la quote--part indivise avant le partage, alors que cette part représente
déjà une valeur dans le patrimoine du débiteur indivisaire ? La doctrine
civiliste explique cette insaisissabilité imposée aux créanciers personnels
par trois raisons essentielles : d'abord, l'impossibilité de matérialiser la part
du débiteur avant le partage ; ensuite, la protection des créanciers personnels contre le risque que la quote--part indivise saisie ne se vende mal et
en deçà de sa valeur vénale ; enfin, par la juste exigence de protection des
coïndivisaires du débiteur insolvable contre l'intrusion d'un tiers au sein
de leur communauté.
30. Même si l'article 815-17, alinéa 2, ne le prévoit pas expressément, la
jurisprudence civile étend l'insaisissabilité aux biens indivis eux--mêmes.
Plusieurs arguments sont avancés en ce sens : le premier réside dans
l'absence de droit exclusif du débiteur coïndivisaire sur les biens indivis
eux--mêmes ; le deuxième a trait à la protection des créanciers personnels
qui risqueraient de voir leurs poursuites remises en cause si le bien indivis
saisi était attribué, lors du partage, à un autre indivisaire que leur débiteur ; un troisième argument est tourné vers la protection des coïndivisaires
non débiteurs sur lesquels on ne saurait faire peser le poids d'une dette à
laquelle ils sont étrangers. Cette dernière explication de l'insaisissabilité
des biens indivis par les créanciers personnels d'un indivisaire traduit l'un
des principes cardinaux gouvernant le passif en matière civile, celui de
l'individualisation des dettes, empêchant d'exercer des mesures d'exécution
forcée et même des mesures conservatoires sur des biens n'appartenant pas
en propre au débiteur47.
31. En matière pénale, là où règne le principe voisin de personnalité des
peines, on aurait pu s'attendre à ce que l'insaisissabilité des parts indivises et
des biens indivis fondée sur l'article 815-17, alinéa 2, du Code civil entrave
le recouvrement des avoirs criminels. Nous avons montré qu'il n'en est
rien : loin d'être un obstacle aux saisies et confiscations pénales, l'indivision
représente un vecteur de propagation d'atteintes patrimoniales nombreuses

46. Cass. 1re civ., 15 juill. 1999, n° 97-14361, a étendu l'interdiction énoncée par l'article 815-17, alinéa 2, à toute mesure ayant pour effet de rendre la part indivise indisponible.
Tel n'est pas le cas, en revanche, de l'inscription d'une sûreté judiciaire (Cass. 1re civ.,
20 oct. 1982, n° 81-15560 ; Cass. 2e civ., 17 févr. 1983, n° 81-15566 ; Cass. 3e civ., 2 nov.
1983, n° 82-11547).
47. Principe que les spécialistes des voies d'exécution rattachent à l'article 2284 du Code
civil et aux articles L. 111-2 et L. 521-1 du Code des procédures civiles d'exécution (cf.
N. Cayrol, Droit de l'exécution, 3e éd., LGDJ, Précis Domat, 2019, n° 217).

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