198 La confiscation des avoirs criminels n'évite pas la confiscation en montrant que le bien ne provient pas de l'infraction pour laquelle il est condamné ou qu'il a été acquis avant que l'infraction ait été commise9. Le jeu de cette présomption est ainsi particulièrement redoutable puisqu'elle joue facilement et qu'on ne peut que très difficilement la renverser. Le risque est alors que la confiscation s'applique trop largement à des biens dont le lien avec le crime est distant voire inexistant. Le recouvrement des avoirs criminels dépasserait alors les avoirs criminels, mais il est vrai que Me Daoud a relevé que la notion d'avoir criminel n'est pas légalement définie et que cette imprécision peut fonder toutes les audaces. On pourrait penser qu'il s'agit en réalité de viser non pas tout avoir tiré du crime mais tout avoir du criminel. Pourtant notre droit pénal ne se limite ni objectivement, ni subjectivement : au choix de faire jouer cette arme automatique qu'est donc la présomption d'illicéité s'ajoute que la confiscation peut affecter les droits de personnes qui n'ont rien à voir avec la commission de l'infraction. Au choix de l'arme automatique s'ajoute donc une certaine indifférence aux dommages collatéraux. 2. L'indifférence aux dommages collatéraux Les solutions utilisées pour élargir le champ des confiscations posent problème en ce que, comme nous l'avons vu, elles peuvent affecter d'autres personnes que l'auteur de l'infraction. Il est frappant d'abord que les principes de responsabilité du fait personnel et de personnalité des peines ne soient pas invoqués pour tenter de faire échapper les tiers aux effets des saisies et confiscation10. Cet aveuglement semble toutefois assez général puisque l'on relève également une indifférence certaine du législateur à l'encontre de la situation des tiers comme l'a bien montré notre collègue Marc Segonds qui a expliqué que, à rebours du principe de personnalité des peines, le Code pénal ne s'est pas vraiment (sous l'ancien Code pénal) ou mal (sous le code actuel) préoccupé de cette question11. On peut tout d'abord comprendre cette atteinte aux droits des tiers en ce qui concerne les biens dangereux puisqu'elle est alors explicitement envisagée et apparaît fondée sur la dangerosité du bien confisqué. Il est 9. V. supra, J.-H. Robert et les décisions citées. 10. V. en ce sens supra M. Bourassin, spéc. n° 4, s'étonnant à juste titre que le principe de personnalité des peines ne soit pas soulevé par les QPC formées en matière de confiscations et passé sous silence par de nombreux travaux doctrinaux sur la question. 11. L'article 131-21 du Code pénal n'évoque ainsi la protection des droits des tiers - de bonne foi - qu'à ses alinéas 2 et 10.