Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e - 106

DROIT CIVIL : RÉGIMES MATRIMONIAUX - SUCCESSIONS - LIBÉRALITÉS
Si un époux a prélevé sur la communauté les fonds lui ayant permis de payer les
annuités d'un emprunt contracté pour l'acquisition d'un immeuble propre, il doit certes
récompense, mais seulement à raison du remboursement du capital ; le paiement des
intérêts des sommes empruntées ne donne pas lieu à récompense, car il est considéré
comme la contrepartie des revenus de l'immeuble qui entrent dans la communauté
(Cass. 1re
civ., 31 mars 1992, no 90-17202 : arrêt Authier ; Cass. 1re
civ., 3 février 2010, no
0821054
- Cette solution suppose que les revenus des propres soient qualifiés de biens communs
; v. supra, no
communs, les dépenses de la gestion courante, tel le financement du remplacement de
matériel amorti, sont à la charge de la communauté (Cass. 1re
104). De même, les revenus d'une exploitation agricole propre étant
civ., 13 oct. 2021, nº 1924008).
Remarquer que, dans l'hypothèse symétrique de la récompense due à un époux
ayant utilisé des fonds propres pour rembourser un emprunt destiné à l'acquisition d'un
bien commun, c'est l'intégralité des sommes versées qui est à prendre en compte, sans
distinguer entre remboursement du capital et paiement des intérêts, car les revenus du
bien commun ne profitent pas aux propres.
- Un époux a financé avec des deniers communs la conservation ou l'amélioration
d'un propre.
Il en est ainsi lorsque l'amélioration d'un bien propre a été « autofinancée » par les
revenus produits par ce bien, puisque les revenus de propres sont des biens communs
(Cass. 1re
civ., 20 février 2007, no
05-18066).
- Un époux a frustré la communauté de valeurs destinées à l'enrichir, en
consommant frauduleusement ou en négligeant de percevoir les revenus de
ses propres ; mais ce manque à gagner de la communauté n'est pris en considération
que pour les cinq dernières années (art. 1403, al. 2).
En revanche, bien que les produits de l'industrie personnelle des époux
aient vocation à faire partie de la masse commune, la plus-value procurée à
un bien propre par l'activité personnelle de l'épouxpropriétaireou deson
conjoint ne donne pas lieu à récompense au profit de la communauté
(Cass. 1re
civ., 5 avr. 1993, no
91-15139 ; 26 oct. 2011, no
29mai 2013, nº 11-25444 ; Cass. 1re
10-23994 ; Cass. 1re
civ., 13 oct. 2021, nº 19-24008 préc.).
Conséquence : lorsqu'un époux a amélioré une construction propre en travaillant luimême
en employant des matériaux payés par la communauté, la communauté n'a droit à
récompense que pour le prix des matériaux. Il faut donc, dans le calcul de la récompense,
déduire de la plus-value apportée au bien propre la part correspondant à la main-d'œuvre.
191. Cas particuliers : donations ; primes d'assurance-vie. - En ce qui concerne
les donations faites par un époux avec des biens communs, en principe, elles donnent
lieu à récompense au profit de la communauté, bien que le conjoint ait dû donner son
consentement (v. supra, no
136). Toutefois, en cas de constitution de dot (donation faite
- en principe dans le contrat de mariage (v. infra, nº 868) - afin de pourvoir à l'établissement
du donataire), si le gratifié est un enfant commun, il n'y a pas lieu à récompense, à
moins qu'un des époux ait déclaré prendre en charge la libéralité pour plus de la moitié,
auquel cas il devrait récompense à la communauté pour cette partie de la donation
(art. 1439). Cette solution est-elle applicable à toute donation faite à un enfant commun ?
La jurisprudence est en ce sens (Cass. 1re
civ., 1er février 2017, nº 16-11599 - Cass. 1re
civ.,
17 avr. 2019, nº 18-16577). S'il n'y a pas lieu à récompense, cela signifie que les deux
époux ont la qualité de codonateurs, chacun pour moitié (conséquence en matière successorale,
v. infra, nº 583).
Quant aux primes d'une assurance sur la vie destinée à procurer au décès du prémourant
un capital au conjoint survivant, elles ne donnent pas lieu à récompense, bien qu'elles
aient été payées avec des fonds communs, sauf si elles sont manifestement exagérées
eu égard aux ressources de la communauté (C. assur., art. L. 132-16, al. 2). Cette faveur,
justifiée par la nature d'opération de prévoyance de l'assurance-vie, ne vaut que si le
106
civ.,

Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e

Table des matières de la publication Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e