Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e - 219

L'option des héritiers
B. Délai de réponse à une sommation d'opter
441. Utilité d'une action interrogatoire. - Tant que le titulaire de l'option n'a pas
manifesté son choix, l'incertitude règne. Les créanciers ne savent pas qui les payera, les
cohéritiers, dans l'attente de savoir qui fait partie de l'indivision, ne peuvent rien faire des
biens successoraux et ne peuvent procéder au partage, les successibles de rang inférieur
qui accéderaient à la succession en cas de renonciation assistent impuissants à la dégradation
des biens par suite de l'inaction de celui qui garde le silence... Antérieurement à la
loi du 23juin 2006, seuls les créanciers pouvaient débloquer la situation. Ils pouvaient
tirer les conséquences de la dévolution légale automatique et poursuivre en paiement
l'héritier désigné par la loi. Celui-ci était alors contraint de prendre parti, puisque pour
éviter d'avoir à payer la dette sur ses biens personnels il devait soit accepter sous bénéfice
d'inventaire, soit renoncer. Toutefois, la loi protégeait l'héritier contre l'obligation de faire
un choix dans la précipitation. Le mécanisme était le suivant. À partir de l'ouverture de la
succession, l'héritier disposait d'un délai de trois mois pour faire, s'il le jugeait bon, inventaire
de la succession. Au bout de ces trois mois, ou à dater de la clôture de l'inventaire si
elle avait lieu plus tôt, s'ouvrait un délai de réflexion de quarante jours (art. 795 ancien).
Jusqu'àl'expiration de ce délai, l'héritier ne pouvait être obligé d'opter. S'il était poursuivi
par des créanciers du défunt, il faisait suspendre leur action. Une fois passé le délai pour
faire inventaire et délibérer, si des créanciers du défunt réclamaient leur paiement, l'héritier
était obligé de prendre parti. Mais rien n'était prévu pour permettre à d'autres intéressés,
en particulier aux cohéritiers, de provoquer l'exercice de l'option du successible
qui gardait le silence. Ainsi, à défaut d'initiatives des créanciers, il fallait attendre l'écoulement
du délai de prescription (qui était alors de trente ans) pour pouvoir procéder au
règlement définitif de la succession. La loi du 23juin 2006 s'est heureusement employée à
corriger ce système. La réduction du délai de prescription de trente à dix ans étant insuffisante,
une procédure destinée à provoquer l'exercice de l'option a été organisée.
442. La provocation à l'exercice de l'option. - Les articles 771
et 772 prévoient le système suivant.
1o
Pendant un délai de quatre mois à compter de l'ouverturedela succession,
l'héritier ne peut être contraint à opter.
2o
Unefois expirécedélai, l'héritier peut être sommé de prendre parti. La
sommation est faite par acte extrajudiciaire (acte d'huissier). Ont qualité pour
faire adresser cette sommation : un créancier de la succession, un cohéritier,
un héritier subséquent, l'État.
3o
Dans les deux mois suivant la sommation, l'héritier doit opter. S'il peut
justifier de difficultés l'empêchant de prendre une décision, comme l'impossibilité
de terminer à temps l'inventaire de la succession, il peut demander au
juge un délai supplémentaire.
4o
Àl'expiration du délai de deuxmois ou du délai supplémentaire judiciairement
accordé, si l'héritier n'a pas pris parti, il est réputé acceptant pur
et simple.
Cette dernière solution peut être jugée satisfaisante lorsqu'elle sanctionne la passivité
de l'héritier sommé de prendre parti par un créancier de la succession : tout le patrimoine
de l'héritier est alors exposé à la saisie du créancier (c'était la solution du droit antérieur
lorsque, sur les poursuites d'un créancier, l'héritier se laissait condamner comme héritier).
Elle paraît moins opportune quand c'est après sommation par un cohéritier ou un
héritier subséquent que l'héritier silencieux est réputé acceptant pur et simple, car son
inertie risque de se prolonger alors que son concours actif serait nécessaire pour régler
la succession ; il faudra sans doute recourir à la désignation judiciaire d'un mandataire
successoral (v. infra, no
l'option dans le délai légal aboutit à des conséquences inverses selon qu'il y a eu
219
502). Quoi qu'il en soit, il faut remarquer que le non-exercice de

Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e

Table des matières de la publication Manuel - Droit civil. Tome 2 - 32e