Manuel - Instruments de crédit et de paiement - 14e - 306

INSTRUMENTS DE CRÉDIT ET DE PAIEMENT
faite aux établissements d'enregistrer des paris sans encaisser préalablement
les enjeux correspondants65
.
318. Le chèque ainsi créé est émis lorsque le tireur s'en dessaisit au
profit du bénéficiaire ou d'un tiers chargé de le lui remettre66
. Il faut à cet
égard distinguer la création du chèque, opération matérielle réalisée en
principe par le tireur consistant à remplir les mentions de la formule de
chèque et à le signer, et l'émission du chèque qui suppose « à la fois en sa
création et en sa mise en circulation ». Si la date de l'émission peut, en fait,
coïncider avec celle qui est mentionnée sur le chèque, elle peut aussi s'en
distinguer et doit être prouvée, par tous moyens, par celui qui l'invoque67
.
La chambre commerciale de la Cour de cassation considère même que la
date d'émission n'est pas présumée être celle de la création (bien que
celle-ci puisse, à notre avis, en constituer un indice sérieux), et qu'elle
doit être prouvée par le bénéficiaire qui a présenté le chèque à l'encaissement
le jour de l'ouverture de la liquidation judiciaire du tireur, date qui
marque le début de l'interdiction de payer les créanciers antérieurs ;
seule cette preuve lui permettra d'encaisser le chèque en échappant à
l'interdiction, grâce au transfert de la provision dont il a profité avant l'ouverture
de la procédure collective du tireur68
. Il reste qu'en sens inverse,
l'article L. 131-32 prévoit que le point de départ des délais de présentation
qu'il instaure « est le jour porté sur le chèque comme date d'émission », ce qui
nous semble poser au moins la présomption simple qu'écarte la jurisprudence.
65.
Cass. 1re civ., 13mars 2019, n 18-13856, D : RDC 2019, nº 116c7, p. 40, note Bénabent (les enjeux correspondants
aux paris doivent être réglés en espèces et au comptant ou par débit d'un compte PMU).
66. On peut de ce fait hésiter pour savoir s'il y a émission en cas de chèque à soi-même (chèque de retrait,
établi à l'ordre du tireur) ; il semble que la réponse soit négative lorsque le chèque est présenté au guichet
de l'agence qui tient le compte du tireur, le chèque équivalant alors à un simple récépissé ; lorsque le
chèque, dit de dépannage,est établi à l'ordre d'une autre agence, l'émission n'est pas douteuse ; en ce
sens, J. Stoufflet, no
190-1 ; le chèque de dépannage peut aussi être établi à l'ordre du tireur, puis remis
endossé à une autre agence ; l'endossement réalise alors l'émission.
67. Cass. com., 18 déc. 1990, Bull. no
326 ; D. 1991. Somm. 216, obs. Cabrillac ; Banque 1991.870, obs. RivesLange
; V. aussi Cass. com., 3 déc. 1991, RTD com. 1992.423, obs. Cabrillac et Teyssié ; solution appliquée
aussi à un chèque de banque non remis au bénéficiaire et qui n'avait donc pu lui transférer la provision :
Cass. com., 18 oct. 1994, RTD com. 1995. 165, obs. Cabrillac ; alors que sa présentation à l'encaissement
implique le dessaisissement du bénéficiaire, même si elle est faite par le tireur lui-même : Cass. com.,
18juin 1996, Bull. no
177 et les obs. crit. Cabrillac, RTD com. 1996. 697.
Ceci dit, pour résoudre les conflits qui peuvent résulter de travaux sur un ouvrage, la Cour de cassation
décide qu'il convient de retenir la date de l'émission, qui est celle de la remise du chèque, et si la preuve de
celle-ci ne peut être rapportée, la date de son encaissement : Cass. 1re
civ., 1er
Defrénois flash 14 avr.2021, nº 200b2, p. 6.
68. Cass. com., 31janv. 2006, no
04-15315, Bull. no
avr. 2021, nº 19-25563, P :
18 ; GPC 2006, no 2, obs. Bonhomme ; D. 2006. AJ. 573,
obs. Avena-Robardet et 756, obs. DRM ; RDBF mai 2006. 14, obs. Crédot et Samin ; JCPE 2006. 2134, n.
Guerchoun. V. Youego, « Retour sur une notion controversée, la date d'émission du chèque », RDBF sept.
2008. 22 ; déjà, Cass. com., 17 oct. 1995, no
11 déc. 1990, no 88-12.716, Bull. no
285 et 22janv. 2002, no 99-10078, Bull. no
93-14707 (v. la divergence des autres chambres : Cass. 1re
18 : il appartient à une compaciv.,
22janv. 2004, no
16 nov. 2006, no 05-18768, 22janv. 2009, no 08-10682, inédits) ; sur le transfert de la provision, infra nº 323.
306
civ.,
gnie d'assurance qui, après mise en demeure, a accepté puis encaissé un chèque destiné au paiement
d'une prime, échue, et portant une date antérieure au sinistre, de démontrer que cet effet lui a été remis
ou adressé à une date postérieure à celui-ci ; dans le même sens, Cass. 2e
02-20408,
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