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PARTIE 1. TITRE 2 - LA PERSONNE JURIDIQUE
moins l'intérêt de faire prendre conscience que les rapports de l'homme à la nature peuvent
être pensés autrement que dans une relation d'appartenance, de sujet à objet, autrement
dit dans un antagonisme entre l'humain et le non humain.
2. Les animaux
Le droit ne regarde plus les animaux comme il les appréhendait avant la loi du 16 février 2015.
L'article 515-14 du Code civil, qui en est issu, dispose que « les animaux sont des êtres vivants
doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au
régime des biens ». Jusqu'à ce texte, les animaux existaient dans la ruralité du Code civil qui
les appréhendait comme des meubles par nature. La loi du 16 février 2015 n'a pas seulement
rafraîchi le code pour tenir compte de l'évolution sociale dans les rapports de l'être humain
avec les êtres animaux ; elle a opéré un changement de paradigme dans la représentation
de l'animal en droit commun. L'être a pris le pas sur l'avoir dans l'organigramme du droit,
même s'il est bien évident que l'animal demeure, entre les mains des hommes, un objet de
propriété. C'est une nouvelle architecture qui se dégage, l'application du régime des biens
étant conditionnée au respect des lois protectrices des animaux, expression d'un ordre public
animalier. Le droit animaliste, qui s'est développé ces dernières décennies davantage dans
une démarche anthropocentrée que dans une perspective zoocentrée, pourrait se renforcer
dans une approche axiologique de la condition juridique animale. Pour certains, la reconnaissance
d'une personnalité juridique aux animaux pourrait s'inscrire dans ce mouvement.
L'expérience étrangère montre que le débat sur la personnalité juridique des animaux n'est
pas seulement académique. Le 4 décembre 2014, la division d'appel de la Cour suprême
de l'État de New York, se prononçant sur le sort d'un chimpanzé vivant en captivité, a
considéré que celui- ci n'était pas une personne susceptible de bénéficier des droits et
protections garantis par l'habeas corpus. Pour les juges, les chimpanzés n'ayant aucun
devoir, n'étant soumis à aucune responsabilité sociale et ne pouvant être tenus légalement
pour responsables de leurs actes contrairement aux êtres humains, ils ne peuvent prétendre
aux mêmes droits que ces derniers. En revanche, en Argentine, une juridiction a décidé,
le 21 décembre 2014, d'appliquer une ordonnance d'habeas corpus (droit de ne pas être
emprisonné sans jugement) à un orang- outan enfermé dans le zoo de Buenos Aires, qu'elle
a qualifié de personne non humaine. La Cour suprême de Colombie, dans une décision du
26 juin 2017, a également fait application de l'habeas corpus à un ours à lunettes enfermé
dans un zoo.
Dans une perspective de reconnaître une personnalité juridique aux animaux, l'essentiel
demeurerait qu'une hiérarchie soit opérée entre les titulaires de la personnalité, hiérarchie
reposant sur un ordre de valeur lui- même déduit de la dignité qui est le propre des personnes
humaines. Celle- ci leur confère une position non seulement dominante mais surtout inégalable
qui se manifeste, notamment, dans le rapport de propriété de l'homme vis- à-vis de
l'animal. L'exemple suisse n'en serait dès lors pas un, une loi fédérale du 16 décembre 2005
sur la protection des animaux énonçant qu'elle « vise à protéger la dignité et le bien- être
de l'animal ». La dignité des animaux, et plus encore la dignité de l'animal au singulier qui
l'associe à un genre animal dans son ensemble, élève l'animal à un niveau de considération
équivalent au respect dû au genre humain en dépréciant celui- ci. L'esprit d'équivalence
cautionne le fanatisme antispéciste qui s'exprime aujourd'hui, comme il a cautionné par
le passé les législations favorables à la protection des animaux adoptées par des régimes
totalitaires.
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