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PARTIE 1. TITRE 1 - À L'ORIGINE DES DROITS DE L'HOMME ET DES DROITS FONDAMENTAUX : LES GRANDS TEXTES FONDATEURS
à l'intérieur de laquelle son exercice est légitime, mais au- delà de laquelle il devient injuste.
Que ces chartes aient fait l'objet de tractations, voire de marchandages, entre les gouvernants
et leurs « sujets », que l'étendue des libertés reconnues par les princes ait été bien
souvent déterminée par un rapport de forces, c'est l'évidence. Reste l'essentiel : pour les
hommes du Moyen Âge, les Anglais comme les autres, le pouvoir n'est légitime que s'il est
circonscrit dans des limites précises et exercé selon des modalités claires permettant de
concilier l'intérêt du prince et celui de la communauté dont il est le « chef » - la tête. Le
« corps » politique apparaît ainsi comme « hérissé » de libertés dont les plus courantes
sont la franchise personnelle, la limitation des charges fiscales et de l'obligation militaire,
le principe du contradictoire, la liberté sous caution, le jugement par les pairs : on retrouve
les libertés anglaises, diversement combinées selon les lieux. Ces libertés concrètes, que
l'on n'appelle pas encore « fondamentales », mais qui néanmoins « fondent » l'organisation
politique tout entière, ne sont pas dépourvues de sanctions. La plus remarquable figurera
en 1789 à l'article 2 de la DDHC, dans la « courte liste » des droits naturels et imprescriptibles
de l'homme, après la liberté, la propriété et la sûreté : c'est le droit de résistance, considéré
dès le Moyen Âge comme un principe de droit naturel.
§ 2. Droits fondamentaux et droit naturel
En effet, les droits et libertés énoncés dans les chartes de franchises ne résultent pas
seulement des rapports de force entre princes et sujets, ils s'inscrivent aussi dans un
contexte philosophique. En affirmant que la fin du pouvoir - au sens aristotélicien du mot
« fin » - ne pouvait être que le bien commun, philosophes, théologiens et (plus timidement)
juristes définissent les fondements de l'ordre institutionnel. Fût- il « souverain », le pouvoir est
toujours conditionné par un ordre plus vaste que celui de la politique : l'ordre de la Création,
l'ordre du monde, régi par la loi divine et naturelle - « ordre juste » par définition. La justice
naturelle s'impose donc aux puissants et leur interdit de tirer leurs droits de la seule force :
selon Thomas d'Aquin, les droits du prince sont nécessairement limités par la « loi de nature »,
et toutes les lois positives, quelle qu'en soit la source (peuple, prince ou Sénat) ne méritent
le nom de « lois » que par leur conformité à l'ordre naturel. Aussi bien la loi de nature (ou
le « droit de nature ») est- elle parfois expressément alléguée par le législateur. C'est ainsi
qu'en 1315, lorsque le roi Louis X décide d'affranchir les serfs de son domaine et demande
aux seigneurs d'en faire autant chez eux, il définit la liberté (« franchise ») comme un droit
naturel : « Comme, selon le droit de nature, chacun doit naître franc..., Nous, considérant que
notre royaume est dit et nommé le Royaume des Francs, et voulant que la chose en vérité
soit accordant au nom..., avons ordonné et ordonnons que [les serfs seront affranchis]... ».
Même si cet acte n'était pas totalement désintéressé, même s'il n'a concerné, en pratique,
que les serfs du domaine royal, il reste que le principe d'une liberté personnelle fondée sur
le droit naturel était très clairement posé.
Que les sujets du prince soient libres « par nature » implique évidemment qu'ils ne peuvent
pas être gouvernés sans un minimum de règles. On considérait en effet que la loi naturelle
imposait aux monarques le respect de certaines pratiques de gouvernement qui, inscrites
en coutume, ont « constitué » les différents royaumes européens : c'est le point de départ de
la théorie constitutionnelle. Par- delà la diversité des institutions, l'essentiel est qu'il y avait
des règles, et que ces règles posaient des limites - plus ou moins contraignantes selon les
pays - à la puissance royale. C'est ce critère, selon les théologiens, qui permet justement
de distinguer le roi du tyran - et Montesquieu ne fera que reprendre cette vieille idée : dans
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