Bibliothèque de droit social - Tome 79 - La charge de travail - 187

Une obligation implicite de prévention de la surcharge de travail

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concerne désormais que six des dix facteurs de pénibilité154. Le port de charges
lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et l'exposition aux agents
chimiques sont désormais exclus du dispositif. Les professeurs Sophie FantoniQuinton et Franck Héas relèvent que l'« assouplissement de la réglementation
concerne principalement les contraintes physiques marquées, alors que ce sont
celles qui sont le plus subies par les salariés »155. Des seuils d'expositions, inchangés par rapport à ceux anciennement en vigueur156, sont fixés pour les six facteurs
maintenus, au-delà desquels le salarié peut bénéficier de points sur son compte de
prévention157. L'acquisition et l'utilisation des points restent soumises aux mêmes
règles que celles applicables à l'ancien compte pénibilité. Un salarié obtient quatre
points s'il est exposé, sur l'année civile, à un facteur de risque au-delà du seuil et
huit points en cas de polyexposition. Il peut obtenir jusqu'à 100 points sur l'ensemble de sa carrière. S'agissant de leur utilisation, un point ouvre droit à la prise
en charge de 25 heures de formation, tandis que dix points permettent d'obtenir
soit un complément de rémunération pour financer un passage à mi-temps pendant trois mois, soit un trimestre de majoration de durée d'assurance vieillesse158.
Si la prévention de la pénibilité est censée être au centre de ce dispositif, c'est bien
le « rachat » de trimestres de cotisations qui constitue, depuis l'origine, son leitmotiv159. La Cour de cassation a démontré que les dispositions des articles
L. 4121‑1 et suivants du Code du travail aurait pu être suffisantes pour enjoindre
aux employeurs de prévenir ces risques pour la santé des salariés160. Malgré son
nom, le compte professionnel de prévention demeure un outil de compensation de
la pénibilité au travail et s'inscrit dans une logique purement réparatrice qui apparaît aujourd'hui anachronique. Comme le fait remarquer le professeur Franck
Petit, « s'il est acquis que le travail fatigue, on ne peut se satisfaire de l'idée qu'il
doit nécessairement accélérer l'usure du corps humain »161.
282. Accord de prévention des risques professionnels. Sans être centrale, la
prévention n'est pas complètement absente du traitement juridique de la pénibilité au travail. En effet, indépendamment des règles relatives au compte professionnel de prévention, les entreprises d'au moins 50 salariés employant au moins
25 % de salariés exposés à un ou plusieurs facteurs de pénibilité, ou dont le taux
154. M. Véricel, « La quasi-disparition du compte de prévention de la pénibilité », RDT 2017,
p. 649. Il est à noter que pour les quatre facteurs exclus du compte, les conditions pour bénéficier d'un
départ anticipé à la retraite ont été allégées pour les travailleurs qui justifient d'un taux d'incapacité
entre 10 % et 20 % et qui ont été exposés à ces facteurs (CSS, art. L. 351‑1‑4 ; art. D. 351‑1‑8 et s.).
155. S. Fantoni & F. Héas, « Les réformes en droit du travail : affaiblissement ou opportunité
pour le droit de la santé au travail ? », Dr. soc. 2018, p. 202.
156. Par exemple, un salarié est exposé au risque constitué par le travail de nuit s'il travaille au
moins une heure entre minuit et 5 heures, 120 nuits ou plus par an.
157. C. trav., art. D. 4163‑2.
158. C. trav., art. R. 4163‑9 à R. 4163‑11. Les vingt premiers points obtenus sont réservés au
financement d'actions de formation professionnelle pour accéder à un emploi moins pénible.
159. P. Brocheton & P.‑Y. Verkindt, « Théorie et pratique du compte personnel de prévention de
la pénibilité », Cahiers sociaux 2015, p. 117.
160.
Le Code du travail distingue clairement la « pénibilité » des risques classiques :
l'article L. 4163‑3 (entrant en vigueur le 1er janvier 2019) dispose en effet que « le seul fait pour
l'employeur d'avoir déclaré l'exposition d'un travailleur aux facteurs de risques professionnels
mentionnés au I de l'article L. 4163‑1 dans les conditions et formes prévues au même article ne saurait
constituer une présomption de manquement à son obligation d'assurer la sécurité et de protéger la
santé physique et mentale des travailleurs résultant du titre II du présent livre ».
161. F. Petit, « Travailler et bien vieillir », Dr. ouvr. 2016, p. 355.

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