Les Intégrales - Volume 21 - Les pactes d'affaires - 1re - 58

LES PACTES D'AFFAIRES
La clause repose sur le mécanisme de la promesse de contrat : le potentiel sortant
consent aux autres signataires une promesse unilatérale de vente sous condition suspensive
de réalisation des événements auxquels les parties souhaitent lier le départ de
l'actionnaire. La promesse prévoit un prix déterminé ou déterminable, le cas échéant par
un expert (le tiers de l'article 1592 ou l'expert de l'article 1843-4 du Code civil75
), qui
varie en fonction de l'événement considéré. Lorsque l'un des événements visés se
réalise, les bénéficiaires de la promesse peuvent lever l'option et ainsi contraindre le
sortant de leur céder ses titres au prix convenu. La clause peut prévoir une promesse
unilatérale d'achat consentie au sortant soit conclue sous condition suspensive de la
réalisation de certains événements (par exemple révocation sans juste motif) soit au
contraire sous condition résolutoire de la réalisation d'autres (par exemple, révocation
pour faute grave ou lourde). La76
la liste des événements77
l'éventuelle procédure à78
La validité de ces clauses est admise de longue date par la jurisprudence, pour autant
que les conditions de validité de la promesse soient respectées. À l'égard du droit des
sociétés, la Cour de cassation a considéré que les articles L. 225-206 et suivants du
Code de commerce, qui encadrent les conditions du rachat par la société de ses propres
actions, n'affectaient pas la validité d'une clause de bad leaver prévoyant une promesse
de cession permettant à la société de racheter les titres d'un dirigeant en cas de révocation
pour faute grave79
leaver rédigées sous la forme de promesses de vente à des clauses d'exclusion, ce qui
aurait imposé, notamment, le respect du contradictoire80
rédaction de la clause, en particulier en ce qui concerne
visés, les modalités de détermination du prix de cession et
respecter, doit être particulièrement soignée.
. Par ailleurs, la Cour refuse d'assimiler les clauses de good ou bad
. Quant au droit du travail, il
n'est pas par nature opposé à ce type de clauses. Dans une espèce où un pacte extrastatutaire
prévoyait que le salarié d'une filiale détenant des actions de cette société s'engageait
irrévocablement à les céder à la société mère en cas de perte de sa qualité de
salarié, pour quelque cause que ce soit, avec une décote de 0,5 sur le prix évalué à dire
d'expert en cas de licenciement autre que pour faute grave ou lourde, la Cour de cassation
a considéré que « une telle clause ne s'analyse pas en une sanction pécuniaire
prohibée, en ce qu'elle ne vise pas à sanctionner un agissement du salarié considéré par
l'employeur comme fautif, dès lors qu'elle s'applique également dans toutes les
hypothèses de licenciement autre que disciplinaire »81
. Dans le même arrêt, la Cour a
validé le principe des clauses de bad leaver au regard de l'ancienne notion de cause, en
affirmant que « la clause prévoyant la décote de la valeur des actions en cas de
licenciement participait de l'équilibre général du contrat et s'inscrivait dans un
processus d'amélioration de la rémunération de l'intéressée mais également
d'association à la gestion et d'intéressement au développement de la valeur de
(75) La plupart des auteurs se prononcent en faveur de la possibilité de recourir volontairement à l'expert de
l'article 1843-4 en dehors des hypothèses visées par le texte (renvoi par la loi, prévision par les statuts de la
cession des droits sociaux d'un associé ou le rachat de ces droits par la société sans que leur valeur soit ni déterminée
ni déterminable), en particulier dans un pacte extrastatutaire : A. COURET et A. REYGROBELLET, « La disponibilité
de l'article 1843-4 du Code civil », D. 2014, p. 2005 ; N. BORGA, « Clause de good/ bad leaver», précit. ; H. LE
NABASQUE, « Dispositions relatives à la valorisation des droits sociaux en cas de cession : réforme de l'article 1843-4
du Code civil », Rev. sociétés 2014, p. 647, spéc. nº 21 et s. En revanche, en l'absence de renvoi à l'expert de
l'article 1843-4 dans le pacte extrastatutaire, son application est exclue : Cass. com., 11 mars 2014, nº 11-26915,
Bull. civ. IV, nº 48 ; Rev. sociétés2014 p. 366, note J. Moury ; AJCA 2014, p. 127, obs. I. Urbain-Parléani.
(76) Cass. com., 3 févr. 2015, nº 13-28164, Bull. Joly Sociétés2015, p. 188, note S. Schiller.
(77) Pour un exemple de contentieux autour de la notion révocation résultant d'une « inconduite grave » : CA Paris,
14 déc. 2010, nº 10/11125 ; BRDA 2011, nº 2, inf. 6. Pour une clause prévoyant une sortie en cas de cessation
des fonctions de salarié et/ou de mandataire : CA Paris, 11 févr. 2014, nº 12/20835 ; BRDA 2014, nº 8, inf. 1.
(78) Pour une clause prévoyant une mise en demeure du dirigeant de remédier aux manquements reprochés : CA Paris,
pôle 5, 8e
ch., 19 mars 2013, nº 12/03448 ; Bull. Joly Sociétés2013, p. 489, note B. Marpeau et F. Dietrich.
(79) Cass. com., 11 mars 2014, nº 12-12074 ; Bull. Joly Sociétés2014, p. 387, note J.-J. Ansault.
(80) Cass. com., 6 mai 2014, nº 13-17349 et 13-19066 ; Dr. sociétés 2014, comm. 182, note R. Mortier ; JCP E 2014,
1317, note B. Dondero ; Rev. sociétés 2015, p. 36, note M. Michineau. V. infra nº 55.
(81) Cass. com., 7 juin 2016, nº 14-17978, Bull. civ. IV, nº 82 ; D. 2016, p. 2042, note D. Baugard et N. Borga ;
Dr. sociétés 2016, comm. 180, note R. Mortier ; Bull. Joly Sociétés2017, p. 23, note E. Schlumberger. En revanche
la perte de la faculté, pour un salarié, de lever les options de souscription d'actions attribuées et déjà acquises en
cas de licenciement pour faute grave constitue une sanction pécuniaire prohibée : Cass. soc., 21 oct. 2009, nº 0842026,
Bull. civ. V, nº 227 ; Dr. sociétés 2010, comm. 26, note D. Gallois-Cochet.
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