Les Intégrales - Volume 21 - Les pactes d'affaires - 1re - 69

Cha p i t r e 2 - L e con t e nu d e s pac t e s e n t r e a s s ociés
la première chambre civile de la Cour de cassation a pris position en faveur de leur
validité152
, dans des circonstances qui peuvent éclairer la pratique sociétaire. Le
passage important de cet arrêt, manifestement salvateur du droit de veto, est le suivant :
« même s'il peut faire échec à la volonté de la majorité, il ne permet pas à son titulaire de
se substituer à celle-ci et oblige, en réalité, à ce qu'un accord soit trouvé ». En d'autres
termes, le veto bloque, mais ne peut imposer et donc, à travers son exercice, son titulaire
provoque finalement la discussion pour que le déblocage se produise et qu'une solution
amiable soit trouvée. C'est là une version évidemment positive des choses, qui fait peutêtre
un peu vite l'impasse sur quelques avatars possibles, depuis les marchandages
jusqu'au blocage pur et dur, susceptible de mener le groupement à l'impasse et parfois
même à la ruine153
la suite de cet arrêt154
. Mais il reste que, comme l'a observé notre collègue Alain COURET à
, la motivation utilisée par la première chambre civile est d'une
portée assez générale et que les droits de veto qui fleurissent aujourd'hui dans le
domaine des sociétés devraient pouvoir trouver ici une légitimité que certains leur contestent
parfois.
Par ailleurs, pour la chambre commerciale de la Cour de cassation, uniquement saisie ici
d'une question d'expression du droit de veto155
, le veto, parce qu'il a cette singularité de
donner plein effet à la volonté individuelle qui le met en œuvre, ne saurait s'exercer dans
la simple passivité ou même encore par le silence. Il doit très clairement se faire
entendre.
Dernière question, que la jurisprudence ne semble pas avoir été encore amenée à
résoudre : l'exercice du droit de veto est-il susceptible d'abus ? De prime abord, il est
tentant de répondre par la négative, voyant en lui le prototype du droit discrétionnaire.
Autrement dit, l'expression d'une volonté libre et souveraine, perçue en quelque sorte
comme un dernier rempart contre la vision prônée par tous les autres. Mais d'un autre
côté, ne pourrait-il pas y avoir quelque paradoxe à admettre aujourd'hui un possible
abus du droit de vote des minoritaires, via l'abus de minorité, là où l'opposition d'un
seul serait mise à l'abri de toute critique ? Seulement, l'abus de minorité a quand même
une logique sociétaire car il est retenu par les juges en cas de violation flagrante par les
associés minoritaires de l'intérêt social. Or dans le cas d'un pacte d'associés extra-statutaire,
il n'est pas du tout sûr que la prise en compte de l'intérêt social s'impose pareillement
à l'égard des signataires, de sorte que les hésitations peuvent se maintenir, et qu'il
pourrait, au final, être bien utile de clarifier ce point par une précision expresse du pacte.
63 Clause d'information156
. - Le pacte d'actionnaires peut contenir des clauses ouvrant un
droit de consultation (par exemple, sur la nomination du commissaire aux comptes),
d'information ou de contrôle complémentaire au profit de tel ou tel actionnaire (le plus
souvent, minoritaire).
Ces clauses d'information pourront mettre la fourniture des renseignements visés (situation
comptable trimestrielle et détaillée, états financiers prévisionnels, projet de budget,
plan d'investissement, rapport écrit trimestriel sur l'exécution des prévisions budgétaires
et d'investissement, etc.) à la charge des dirigeants sociaux. Elles peuvent également
prévoir la nécessité d'organiser de manière régulière des réunions d'information, notamment
au bénéfice d'investisseurs membres du pacte, avec là encore une fourniture
d'informations sur la marche des affaires sociales par le dirigeant157
(152) Cass. 1re
civ., 17 févr. 2016, nº 15-11304, PB ; Bull. Joly Sociétés 2016, p. 237 et s., note A. Couret.
(153) V. cependant, pour des solutions contractuelles, la possibilité de stipuler une clause de deadlock, couplée le cas
échéant à une clause de buy or sell (v. infra nº 57, 58).
(154) Bull. Joly Sociétés2016, p. 237.
(155) Cass. com., 16 févr. 2016, nº 14-23093, inédit.
(156) V. J. MESTRE, A.-S. MESTRE-CHAMI et D. VELARDOCCHIO, Lamy Sociétés commerciales, op. cit., nº 4225.
(157) V. par ex., pour une telle disposition, CA Paris, 27 mars 2007, RJDA 2008, nº 47.
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. En revanche, ces
http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=14-23093 http://www.lextenso.fr/weblextenso/recherche/?recherche=avancee&requete.checkDocuJuris=on&requete.jurisDecision=14-23093
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