Les Intégrales - Volume 21 - Les pactes d'affaires - 1re - 86

LES PACTES D'AFFAIRES
gestion253
. La cour d'appel d'Aix-en-Provence a exprimé ce principe d'organisation
hiérarchique applicable aux SA en énonçant que : « si les statuts peuvent aménager, au
mieux des intérêts sociaux, les modalités de l'administration et de la direction, cette
liberté s'exerce sous la condition expresse d'absence de bouleversement des principes
généraux de hiérarchie et de compétence des divers rouages institués par la loi ; (...) de
même qu'il n'est pas permis à une assemblée générale, fût-elle extraordinaire, d'empiéter
sur le rôle dévolu au conseil d'administration, celui-ci ne peut se dépouiller de ses
attributions propres »254
. En revanche, un simple contrôle de certaines décisions de
gestion grâce à un système d'autorisation préalable est tout à fait possible. Il est même
explicitement prévu par la loi pour les SA à conseil de surveillance et directoire à
l'article L. 225-68 du Code de commerce, qui dispose que : « Les statuts peuvent
subordonner à l'autorisation préalable du conseil de surveillance la conclusion des
opérations qu'ils énumèrent». Il faut enfin prendre garde à ce que la clause soumettant
l'action des dirigeants de droit à la volonté d'un tiers ne fasse pas de ce tiers le véritable
dirigeant de la société, susceptible d'être qualifié de dirigeant de fait255
. Ce dernier
risque vaut pour toutes les formes de sociétés, la qualification de dirigeant de fait
pouvant être retenue à l'égard de toute personne, autre qu'un dirigeant de droit, qui, en
toute souveraineté et indépendance, exerce une activité positive de gestion et de
direction de la société256
.
Dans les SAS, la gouvernance - et donc la limitation des pouvoirs du président et le cas
échéant du ou des DG, seuls organes de direction prévus par la loi - peut être organisée
plus librement. L'article L. 221-5 du Code de commerce prévoit que « les statuts fixent
les conditions dans lesquelles la société est dirigée ». Il est fréquent dans ce type de
société de prévoir que certaines décisions devront faire l'objet d'une approbation à l'unanimité
d'un organe collégial au sein duquel sont représentés les principaux
actionnaires257
, ou être soumises à une autorisation préalable d'un tel organe258
. Cependant,
l'article L. 221-5 du Code de commerce est apprécié restrictivement par la Cour de
cassation qui considère que « seuls les statuts fixent les conditions dans lesquelles la
société est dirigée »259
. Cette affirmation ne devrait pas interdire toute clause statutaire
. En revanche, cet organe ni légal, ni
de limitation des pouvoirs du dirigeant passant par la création d'un comité ou d'un autre
organe d'autorisation préalable ou de contrôle260
statutaire n'aurait pas de reconnaissance « officielle » quelle que soit son appellation et
les conséquences de la violation des dispositions du pacte le concernant demeureraient
strictement contractuelles, entre les signataires du pacte.
83 Violation. - En cas de violation d'une clause limitant ses pouvoirs, le dirigeant engage
sa responsabilité civile à l'égard de la société (si la clause est statutaire ou figure dans un
règlement intérieur) ou des signataires (si la clause figure dans un pacte extrastatutaire).
Il pourra faire l'objet d'une révocation pour juste motif (voire pour faute, si c'est la condition
posée par les statuts ou par un pacte extrastatutaire) et le cas échéant être tenu de
(253) T. com. Marseille, 7 nov. 2001, nº 2001 Rec. 906 ; RJDA 2/02, nº 162, rendu en matière de SA à directoire et
conseil de surveillance.
(254) CA Aix-en-Provence, 28 sept. 1982 ; Rev. sociétés 1983, p. 773, note J. Mestre.
(255) Cass. com., 11 juin 1965, nº 63-10240, Bull. civ. III, nº 361 ; RTD com. 1965, p. 861, obs. R. Houin.
(256) J. HEINICH et L. WATRIN, « Fasc. 45-20 - Le dirigeant de fait », JCl. Sociétés Traité 2019, spéc. nº 6 et s.
(257) M. COZIAN,A. VIANDIER et F. DEBOISSY, Droit des sociétés, op. cit., nº 1453. De manière indirecte, l'exigence
d'unanimité peut être considérée comme offrant un droit de veto à tout membre de l'organe considéré : v. supra
nº 62.
(258) CA Paris, 3e
ch. A, 12 juin 2007, nº 07/05264, G. et autres c/SA Caceis Bank et autres, Bull. Joly Sociétés2007,
p. 1341, note P. LECANNU ; Dr. sociétés 2007, comm. 220, note H. HOVASSE : annulation d'une convention prise en
violation d'une clause statutaire qui prévoyait que toute convention relative au départ d'un membre du directoire
devait faire l'objet d'une autorisation préalable du conseil de surveillance, même si la convention était considérée
comme libre au regard du régime légal des conventions réglementées.
(259) Cass. com., 25 janv. 2017, nº 14-28792, Publié au Bulletin ; Rev. sociétés 2017, p. 631, note L. Godon ; Bull. Joly
Sociétés2017, p. 170, note M. Germain et P.-L. Périn ; Gaz. Pal. 21 mars 2017, nº 12, p. 83, note B. Dondero ;
RLDA 2017, nº 124, note Th. Bonneau ; D. 2017, p. 892, note J. Klein ; LEDC mars 2017, p. 7, obs. M. Caffin-Moi ;
Dr. sociétés 2017, comm. 60, note J. Heinich.
(260) En ce sens B. DONDERO, note précit.
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