Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 156 - L'écriture des lois constitutionnelles de 1875 - 284

L'irresponsabilité du chef de l'État : l'illusion du monarque constitutionnel

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327.  Du côté monarchiste, la question ne se pose pas vraiment, toutes leurs
propositions visant à organiser le provisoire et se limitant à envisager une vacance
anticipée du pouvoir de Mac Mahon qui entraînerait alors la réunion immédiate
des deux chambres en Congrès136. Le dispositif est du reste conservé dans la loi du
25 février 1875, sans la formulation personnelle137. Victor de Broglie et PrévostParadol, d'obédience orléaniste, envisagent cependant l'hypothèse d'une présidence de la République dans leurs célèbres ouvrages. Le premier explique que
« [q]uant au mode d'élection, cette pierre d'achoppement, la plus redoutable de
celles qui se rencontrent à pas sous la roue du char républicain, il faudrait se garder d'imiter l'exemple du gouvernement des États-Unis, plus encore celui de notre
dernière République, et presque autant celui de la première »138. Il propose alors
un système très théorique un peu étrange : chaque chambre élirait une commission de 5 membres, formant une commission chargée de déterminer une liste de 5
candidats, les membres des deux chambres réunies procédant à l'élection du
-Président (chaque parlementaire devant faire un choix unique) : celui qui obtient
le plus de voix serait élu Président, celui qui arrive deuxième deviendrait Vice--
président139. Assez étonnamment, le second ne dit en revanche rien du mode
d'élection du Président, quoiqu'il semble sous-entendre une désignation parlementaire140. Parmi les membres de l'Assemblée, seul le député du Centre droit
Savary envisage explicitement une élection du Président, qu'il souhaite effectuée
par les chambres pour une durée indéterminée141. Personne ne propose une autre
forme de nomination.
328.  L'adoption de la procédure définitive par l'amendement Wallon n'a, en
tant que telle, guère été discutée. En effet, la portée politique et symbolique de
l'amendement Wallon a largement contribué à faire passer au second plan son
136. La question est tranchée par les Trente lors de leur 62e séance, le 9 juillet 1874 (C II 612614). Ces derniers repoussent de nouveau l'hypothèse d'un Vice-président proposée par certains
monarchistes, qui avait déjà été écartée précédemment (57e séance, 26 juin 1874, ibid.).
137. Art. 7. L'article est adopté sans difficulté par l'Assemblée le 3 février 1875 sur proposition
des Trente qui ont modifié une rédaction de Wallon avec l'accord de ce dernier : « En cas de vacance
pas décès ou pour toute autre cause, les deux Chambres réunies procèdent immédiatement à l'élection
d'un nouveau Président. [Wallon proposait un intervalle d'un mois] Dans l'intervalle, le conseil des
ministres est investi du pouvoir exécutif [Wallon proposait le vice-président du Conseil] ». Le
rapporteur, Paris, explique que le délai d'un mois est « inutile », que l'existence du vice-président du
Conseil « n'est établie que par décret » et de plus que le Conseil des ministres possède une
« responsabilité solidaire » devant les chambres (JO du 4 février 1875, p. 933). La seconde commission
des Trente revient sur la question : sur proposition de Ricard (Centre gauche) adoptée à l'unanimité,
elle prévoit que les chambres se réunissent de plein droit en cas de vacance (5e séance, 1er juin 1875, C
II 616) et adopte sur proposition de Laboulaye la procédure à suivre si la Chambre des députés se
trouve dissoute au moment de la vacance (7e séance, 4 juin 1875, ibid.), l'hypothèse ayant été envisagée
par un amendement du député du Centre gauche Seignobos (« Dans le cas où par l'application de
l'art. 5 de la loi du 25 février 1875, la chambre des députés se trouverai dissoute au moment où la
présidence de la République se deviendrait vacante, il serait, à moins d'une convocation antérieure des
électeurs pour un jour plus rapproché, procédé à l'élection d'une nouvelle chambre, le 3e dimanche qui
suivrait le jour où la vacance serait survenue ») (ibid.). Les dispositifs se retrouvent dans l'article 3
al.3 et 4 de la loi du 16 juillet 1875 (Annexe III. 3.), le projet du gouvernement sur les rapports des
pouvoirs publics n'en disant rien (Annexe V. 22.).
138. Vues..., op. cit., p. 228.
139. Ibid. p. 230-231.
140. Il évoque le Président comme un « chef élu » qui « représente un parti auquel il doit tout »
(op. cit., p. 144), dont probablement son élection. De plus Prévost-Paradol considère que la chute de
1848 résulte d'un conflit entre deux pouvoirs électifs (ibid. p. 329).
141. Op. cit., p. 127 (et préc.).

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