La justice en voie de déshumanisation « dégradée », mais leur chant est si doux que personne ne réagit. D'ailleurs, qui oserait publiquement désavouer une nouveauté technologique au nom de la protection d'un principe ancestral ? Personne. Le progrès technique ne se discute pas. Il est ontologiquement positif et donc souhaitable. La visioconférence ? Un scandale selon le Conseil d'État... en 1998 Un projet d'ordonnance est rédigé par la Chancellerie qui prévoit donc le recours à cette nouvelle technique à l'audience pour Saint-Pierre-et-Miquelon mais également la possibilité d'expérimenter et d'étendre le dispositif. Laurence Dumoulin et Christian Licoppe racontent les réactions à l'époque. Elles sont édifiantes. « Vous portez atteinte à des principes fondamentaux, c'est invraisemblable qu'on propose un truc aussi fou », lance un magistrat du Conseil d'État à son collègue de la Chancellerie, sidéré alors par la violence de la réaction. Car les membres de la haute juridiction administrative aperçoivent immédiatement l'énorme atteinte aux principes contenue dans le texte. Pour le président de la section du Conseil d'État saisi, la comparution physique devant son juge relève en effet d'un principe constitutionnel. Les spécialistes des questions de justice parlent de « scandale ». Mais la Chancellerie ne désarme pas et finit par obtenir que le Conseil d'État valide le texte ; toutefois, celui-ci limite sa portée à Saint-Pierre-et-Miquelon et en encadre par ailleurs sévèrement l'usage. Ainsi est publiée l'ordonnance nº 98-729 du 20 août 1998. 166