Hors collection - 150 ans de la faculté de droit de Bordeaux, quel héritage doctrinal ? - 29

Benoît Joyeux et Bernard Saintourens
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où il est transmis, celui où il disparaît peuvent commander la liquidation d'un
régime matrimonial ou influencer un règlement successoral. L'intérêt fiscal est
aussi présent dans la mesure où la mutation d'un fonds de commerce entraîne la
perception de droits bien différents de ceux qui sont dus à l'occasion de la cession
d'éléments qui sont détachés du fonds sans le faire disparaître. Le droit pénal se
trouve également concerné lorsqu'un texte punit la création ou l'ouverture illégale
d'un fonds de commerce »19
.
Plus loin, dans cette même contribution, Jean Derruppé attirait l'attention
des praticiens sur l'importance qu'il y a de savoir si un fonds de commerce existe
ou non, parce que la nature de l'opération juridique en cause, et donc de l'acte à
recevoir, en dépend. Par exemple, « celui qui loue un hôtel, un cinéma, un moulin
ou une station- service a- t-il loué un fonds de commerce ou un immeuble à usage
commercial »20
car, ajoutait- il, « s'il l'a été par le propriétaire des immeubles,
. Force est de constater que des conséquences
. Dans le premier cas, c'est un contrat de location- gérance qu'il
faut établir, alors que, dans le second cas, c'est un bail commercial qui doit être
conclu. Il incitait également les professionnels du droit à vérifier « quand et par qui
le fonds a été créé »21
le locataire n'est qu'un gérant libre qui n'a droit ni au renouvellement de son
bail, ni à indemnité d'éviction »22
juridiques et économiques très importantes pour l'exploitant du fonds résultent
de cette vérification préalable préconisée.
En outre et comme la Cour de cassation23
, Jean Derruppé a toujours considéré
que la clientèle est un élément essentiel du fonds de commerce parce qu'elle
commande à la fois l'existence et la propriété du fonds.
Sur la question relative à l'existence même du fonds d'activité, et plus précisément
de son apparition, il se rallia à l'avis d'Alfred Jauffret pour qui il n'était pas
nécessaire qu'il y ait une véritable exploitation d'une certaine durée, il suffisait qu'il
y ait ouverture du fonds au public. En revanche, il n'a jamais été convaincu par les
partisans de la thèse de la clientèle potentielle ou espérée. Il considérait que « s'engager
sur cette voie risque de conduire fort loin. Toute location d'un immeuble
spécialement aménagé (hôtel, casino, cinéma, moulin, clinique...) deviendra une
19. V. J. Derruppé, « Fonds de commerce et clientèle », in Études offertes à Alfred Jauffret, faculté de
droit et de science politique d'Aix- Marseille, 1974, § 3, p. 232.
20. V. J. Derruppé, op. cit., § 3, p. 233.
21. Idem.
22. En effet, l'article L. 145-1 du Code de commerce exige de l'occupant de l'immeuble qu'il soit
propriétaire du fonds de commerce pour pouvoir prétendre bénéficier du statut des baux commerciaux.
Or, tel n'est pas le cas du locataire- gérant qui exploite le fonds de commerce appartenant à autrui.
23. V. not. la formule employée par la chambre des requêtes, dans son arrêt du 15 février 1937 : « De
tous les éléments, la clientèle représente le plus essentiel, celui sans lequel un fonds ne saurait exister »,
D. 1938.1.13, note Cordonnier ; Rev. gén. Dr. com. 1938.164 note Lagarde.
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