Les Intégrales - Droit de l'intelligence artificielle - 2e - 241

Cha p i t r e 7 - I n t e l l i gence a r t i f i ci el l e et j u s t i c e : une a pp r oche i n t er huma n i s t e
Pour l'Europe, le RGPD (règlement UE 2016/679), dans son article 22, prévoit explicitement
la possibilité pour la personne concernée de refuser de faire l'objet d'une décision
fondée exclusivement sur un traitement automatisé, sauf exception. La loi PGJ prévoit
cependant une possibilité de médiation en ligne organisée par les legaltechs pour les
petits litiges.
Il est indiqué en annexe de la loi programmation de la justice du 23 mars 2019 : « Pour
la plupart des citoyens, l'accès au droit sera en effet facilité avec la dématérialisation
progressive des procédures de justice, la possibilité de saisir en ligne la justice, le développement
de l'offre en ligne de résolution amiable des différends, l'open data. Mais il
conviendra de veiller à ce que les personnes les plus éloignées du numérique trouvent
également une réponse dans les points d'accès au droit et soient accompagnées dans
leurs contacts avec la justice pour que la dématérialisation ne devienne pas, pour elle,
un obstacle vers le juge et la justice ».
La loi PGJ indique qu'àl'article 4 de la loi nº 2016-1547 du 18 novembre 2016 de
modernisation de la justice du XXI
e siècle, sont insérés : « les personnes physiques ou
morales proposant, de manière rémunérée ou non, un service en ligne de conciliation ou
de médiation, telle que définie à l'article 21 de la loi nº 95-125 du 8 février 1995 relative
àl'organisation des juridictions et à la procédure civile, administrative et pénale, sont
soumises aux obligations relatives à la protection des données à caractère personnel et,
sauf accord des parties, de confidentialité. Le service en ligne délivre une information
détaillée sur les modalités selon lesquelles la résolution amiable est réalisée ».
§ III - L'adjudication en ligne
396 Système expert et IA. - L'utilisation de systèmes experts dans le domaine de la justice a
été tentée dans les années 1970, mais a, jusqu'à présent, échoué. C. Thomasset écrivait
ainsi en 1996 : « La plupart des SE (systèmes experts) qui ont pu déboucher sur des applications
réelles (LDS de Waterman et Peterson ; TaxAdvisor de Robert Michaelson ; Latent
Damage System, de Richard Susskind et Philipp Caper, etc.) ont plutôt cherché à représenter
l'expertise de l'avocat spécialiste d'un domaine du droit. Ces systèmes non seulement
doivent représenter les sources écrites du droit propres au domaine représenté, mais
ils doivent aussi tenir compte des normes issues de la pratique du droit ainsi que des stratégies
et des processus mentaux des avocats qui interviennent dans ce domaine. Ces
systèmes informatisés d'aide à la décision ne peuvent se substituer à la décision prise par
un juge, mais peuvent contribuer à éclairer l'avocat qui veut tester sa stratégie ou ses
connaissances dans le domaine. Cependant, la faiblesse de ces systèmes vient du modèle
décisionnel simplifié qui s'appuie sur l'équation RxF=D, où R représente les règles juridiques
applicables, F les faits de la situation litigieuse et D la décision qui en résulte.
Sergot présente les limites de ces systèmes de représentation qui ne tiennent pas compte
de facteurs subtils comme la personnalité des juges ou les caractéristiques socio-économiques
des parties ou le contexte particulier de chaque litige »74
.
Cette phrase pourrait être reprise aujourd'hui sans beaucoup de modifications pour
décrire les faiblesses de l'intelligence artificielle appliquée à la décision judiciaire qui
repose sur l'équation BdxF=D, où Bd représente les solutions issues des bases de
données, F les faits et D la décision. Or, ce processus décisionnel ne prend toujours pas
en compte les émotions, l'inconscient et les intuitions du juge (l'ensemble constituant
avec sa raison, la personnalité du juge) et des parties, pas plus qu'il ne prend en
(74) C. THOMASSET, « Modélisation ou formalisation du savoir juridique : l'emprise des informaticiens sur le droit », in
D. BOURCIER et C. THOMASSET (dir.), L'écriture du droit face aux technologies de l'information, Diderot éd., 1996,
p. 371 et s., spec. p. 387.
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