Hors collection - Les États d'exception, un test pour l'État de droit (Revue du Droit Public - Numéro spécial) - 210

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XAVIER DUPRÉ DE BOULOIS
desdites mesures. Les premières ont vocation à se situer en amont de
l'édiction de la mesure. Dans le contexte français, et au regard de la jurisprudence
du Conseil constitutionnel, il semble que ces garanties administratives
sont celles qui existent déjà dans le droit commun, de telle sorte
que leur réitération dans le texte qui définit le régime exorbitant n'est pas
toujours indispensable. Ainsi, le Conseil constitutionnel a rappelé que
celles des mesures de fermeture provisoire des salles de spectacle, débits
de boissons et lieux de réunion qui présentent un caractère individuel
doivent être motivées (33), alors que l'article 8 de la loi de 1955 qui organise
cette compétence ne mentionne pas cette exigence. La loi de 1955
ne comprend qu'une exception en la matière, qui peut se justifier par la
nécessité d'une motivation renforcée et inspirée de la procédure pénale :
elle est mentionnée dans ses dispositions relatives aux perquisitions administratives
(L. 1955, art. 11). Il en est de même des dispositions du Code
de la santé publique relatives à l'EUS qui ne mentionnent l'obligation de
motivation qu'au sujet des décisions préfectorales ayant pour objet la mise
en quarantaine et les mesures de placement et de maintien en isolement
(CSP, art. L. 3131-17, II) (34). En la matière, une autre garantie de nature
administrative a contribué à affermir la constitutionnalité du dispositif aux
yeux du Conseil constitutionnel : l'intervention préalable d'un avis médical
pour le prononcé et la prolongation de ces mesures (35).
Des constats similaires peuvent être opérés au sujet des garanties juridictionnelles,
et en particulier de l'accès à un recours juridictionnel effectif.
La France étant déjà dotée d'un système de voie de recours très complet, le
droit commun semble déjà largement pourvoir aux nécessités des périodes
de crise. Toutefois, l'actualité récente a démontré qu'il ne permet pas toujours
d'assurer de manière effective la protection des droits fondamentaux
dans certaines circonstances (36). En ce qui concerne le régime de la loi
de 1955, il semble que le renvoi opéré par son article 14-1 au droit commun,
en l'occurrence les recours prévus par les dispositions du Code de
justice administrative, suffise pour satisfaire aux exigences constitutionnelles
d'un recours juridictionnel effectif (37). Si ces recours de droit commun
ne sont pas mentionnés par les dispositions pertinentes du Code de la
santé publique, il en est de même dans le cadre de l'EUS (38). En revanche,
(33) Cons. const., 19 févr. 2016, n° 2016-535 QPC.
(34) Également, Cons. const., 5 août 2021, préc. pour la décision du préfet relative à
l'application du passe sanitaire aux centres commerciaux.
(35) Cons. const., 11 mai 2020, n° 2020-800 DC, préc., § 37.
(36) On pense par exemple à la situation des détenus soumis à des conditions de
détention indignes.
(37) Cons. const., 22 déc. 2015, n° 2015-527 QPC ; Cons. const., 19 févr. 2016,
n° 2016-535 QPC, préc.
(38) Cons. const., 11 mai 2020, n° 2020-800 DC, préc., § 21.
REVUE DU DROIT PUBLIC - N° Spécial-2021

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