Cours - Libéralités et successions - 6e - 103

Les libéralités spéciales
163 Contestation ; protection de la réserve. - Si les copartagés ne sont pas d'accord sur le partage et se
sentent lésés, outre les actions de droit commun (nullité sanctionnant les conditions de forme ou de fond, révocation,
etc.), ils ne peuvent attaquer l'acte pour cause de lésion35
.
«L'action en complément de partpour cause de lésion nepeut être exercée contre les donations-partages
et les testaments-partages ». (art. 1075-3)
Toutefois, l'héritier réservataire bénéficie d'une actionenréduction spéciale s'il n'a pas reçu un lot égal à sa part
de réserve36
.
Concernant les donations-partages, le régime de cette action est prévu aux articles 1077-1 et 1077-237
avec des
règles particulières d'évaluation des donations à l'article 1078 dérogeant au droit commun des donations entre
vifs en la matière.
«L'héritier réservataire qui n'apas concouru à la donation-partage ou qui a reçu un lot inférieur àsa part
de réserve, peut exercer l'action en réduction, s'il n'existe pas à l'ouverture de la succession des biens
non compris dans le partage etsuffisants pour composer ou compléter sa réserve compte tenu des libéralités
dont il apu bénéficier ». (art. 1077-1)
L'article 107838
et le calcul de la réserve39
prévoit en effet que les biens donnés seront évalués au jour de la donation-partage pour l'imputation
. Ce « gel » des valeurs au jour de la donation-partage40
famille qui demeure néanmoins soumise à des conditions41
.D'abord, tous les héritiers réservataires vivants ou
représentés au décès de l'ascendant doivent avoir reçu un lot dans le partage anticipé et l'avoir expressément
accepté. Ensuite, le bénéfice de cette règle d'évaluation dérogatoire est écarté s'il a été prévu une réserve d'usufruitportant
surune somme d'argent42
. En outre, le texte précise que cette disposition s'applique « sauf convention
contraire » (art. 1078 C. civ.).
Pour les testaments-partages, l'article 1080 renvoie, en ce qui touche l'action en réduction, à l'article 1077-2,
concernant les donations-partages. Cet article dispose que cette action en réduction suit les règles du droit
commun des successions et qu'elle ne peut être introduite qu'après le décès du disposant. Elle est prescrite
par cinq ans à compter du décès43
. Elle est également ouverte à l'héritier présomptif non encore conçu au
moment de la donation-partage.
35. Cass. 1re
est une faveur pour ce pacte de
civ.,22 nov.2005, Bull. civ. I, no 437, citée infra: «Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, que la donation-partage cumulative qui réalise
par un même acte un partage amiable des biens de la succession ouverte et une donation-partage des biens du parent survivant à la condition
que tous les enfants majeurs et capables acceptent ce partage, est soumise aux règles qui gouvernent les partages d'ascendants, et alors,
d'autre part, que l'article1077-2 du Code civil qui renvoie pour ces partages aux règles des donations entre vifs pour ce qui concerne l'imputation,
le calcul de la réserve et la réduction, ne vise pas la rescision pour lésion, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article1075-1 du Code
civil et violépar fausse application les articles887et1077-2dumême Code».
36. Pour une reconstitution de la réserve en présence d'une donation-partage : TGI Carpentras, 4 mai 1999 ; BICC15 févr. 2000, no
195 ; JCP2000.
II. 10380, note F. Sauvage.
37. Cette action constituant un droit attaché à la personne : Cass. com., 2mars 2022, nº 20-20173 ; Dr. fam. 2022, comm. 78, A. Tani.
38. P. Sautjeau et B. Vareille, « Mérites et maléfices de l'article 1078 du Code civil », Defrénois 2014, nº 7, 356.
39. Ce qui n'impose pas pour autant de retenir l'évaluation figurant dans l'acte de donation-partage, seule important la valeur réelle des biens :
Cass. 1re
civ., 4 nov. 2015, nº 14-23662 P ; JCPN. 2015, nº 47, act. 1102 ; Dr. fam. 2016, comm. 9, note Nicod ; RJPF janv. 2016, 28, note Sauvage ;
Cass. 1re civ., 25mai 2016, nº 15-16160 ; JCPN.2016, nº 37,1277, note Nicod ; Dr. fam.2016, comm. 184,note Nicod ; RJPF juill. août 2016, 33 note
Sauvage : «pour le calcul de la réserve, les biens donnés doivent être estimés à leur valeur réelle au jour de la donation-partage, quelles
qu'aientpu être celles énoncées à l'acte».
40. Cette règle dérogatoire ne concerne que le calcul de la réserve et l'imputation, et non le calcul de l'indemnité de réduction, qui, en vertu de
l'article 1077-2, suit le droit commun : Cass. 1re
civ., 17 déc. 1996, Bull. civ.I,nº 462 ; D. 1997, somm. 367, obs. Vareille ; JCP 1998, I, 133, nº 13, obs. Le
Guidec.
41. Concernant l'incorporation d'une donation antérieure à la donation-partage, une réponse ministérielle du 7juin 2016 précise que l'évaluation des
biens nepeut êtreantérieureà la donation-partage : Rép. min. nº 53590, JOANQ 7juin 2016, p. 5113 ; JCPN. 2016, nº 37, 1277, obs. Nicod ; Dr. fam2016,
comm. 184, note Nicod ; RJPF sept. 2016, p. 36, note Sauvage.
42. Cass. 1re
civ., 18mai 1978, D. 1979, IR, 76, obs. Martin ; JCP 1980, II, 19349, note Dagot.
43. Il s'agit d'un délai de prescription et non d'un délai préfix : Cass. 1re civ.,5juill.1989, Bull. civ. I, no 282 ; ce délai ne peut être suspendu que par
des circonstances mettant celui qui l'invoque dans l'impossibilité d'agir : Cass. 1re civ., 3 oct. 2000, Dr. fam. 2001, no
34, et la note.
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