Cours - Libéralités et successions - 6e - 145

Le contenu du testament : le legs, le negotium
I. Un objet déterminé
243 Objet incertain, exhérédation. - S'agissant de l'objet du legs, selon le droit commun, il doit être déterminé
Si les dispositions sont ambiguës8
.
volonté réelle du testateur9
et que la désignation de l'objet du legs est incertaine, les juges recherchent la
en s'aidant notamment d'éléments extrinsèques10
lorsque la volonté du testateur est claire, les juges doivent prendre garde à ne pas la dénaturer11
. Comme il a été rappelé ci-dessus,
.
Un testament peut servir à deux choses le plus souvent complémentaires l'une de l'autre : priver un héritier légal
de ce que la loi lui accorderait (exhéréder) et attribuer à une personne non appelée une part de la succession ou
augmenter la part d'un héritier appelé. On comprend qu'en règle générale on donne à Paul ce qu'on enlève à
Pierre. Le testament est, donc, l'instrument privilégié pour modifier, voire bouleverser, la dévolution légale ; du
moins la dévolution supplétive car, bien évidemment, nul ne peut ébranler la dévolution impérative (en fait le
premier ordre des descendants).
Ainsi le testateur peut décider d'exhéréder ses héritiers. Il les prive alors de leur part de succession, c'est-à-dire,
de leur émolument12
public. Cette exhérédation peut être clairement exprimée dans le testament, par l'exclusion de certains
héritiers13
dation peut résulter de l'institution d'un légataire universel, elle est alors implicite.
II. Désignation du légataire
244 Le bénéficiaire du legs, c'est-à-dire le légataire, doit être expressément désigné par le disposant.
245 Nullité du legs à une personne incertaine. - La personne doit être désignée de manière précise. Le légataire
doit être clairement identifié. Si le legs est fait à une personne incertaine, il est nul. Si le bénéficiaire n'est
pas précisément déterminé, il doit au moins être déterminable. Les juges recherchent alors la volonté réelle du
testateur dans les dispositions de dernières volontés, par des éléments extrinsèques14
bénéficiaire est insuffisamment désigné.
. Il en est de même si le
ou au moins déterminable7
, sauf pour les héritiers réservataires qui ne peuvent être privés de leur réserve, d'ordre
,ce qui permet d'instituer de manière implicite les héritiers de rangs subséquents. De même, l'exhéré7.
Cass. 1re civ., 28 nov. 1972, D. 1973. 462 ; Cass. 1re civ., 20janv. 2004, D. 2004. Somm. 2341, obs. M. Nicod ; Defrénois 2005.224,note Gelot ;v. pour
un objet insuffisamment déterminable : Cass. 1re
civ., 6mars 1984, Bull. civ. I, no
J. Patarin ; Cass. 1re civ., 16mars 1999 : Dr. fam. 1999, no 47 et la note (le testateur a indiqué qu'il faut assurer à une petite fille « une dot très honorable
»).
8. Sur la détermination de la clarté ou l'ambiguïté qui peut poser difficultés : V. par ex. Cass. 1re
Cass. 1re civ.,6janv.1970, Bull. civ. I, no
7; JCPG 1971. II. 16709 ; Cass. 1re civ., 23juin 1971, Bull. civ. I, no
civ., 14 févr. 1984, JCPN 1984. II. 15 ; Cass. 1re
civ., 12janv. 1970, JCPG 1970. II. 16261, n. p ; b ;
213 ; D.1971, somm. 184.
9. Pouvoir souverain des juges du fond : Cass. 1re civ., 9 févr. 1988, D. 1988. IR. 64 ;v. par ex.Cass. 1re civ., 12janv. 1970, JCP1970. II. 16261 (legs en
« ancien » ou « nouveau » francs ?) ; Cass. 1re
civ., 21 mai 1997, Dr. fam. 1998, no
10. Cass. 1re civ., 19janv. 1982 : D. 1982. 589, note Prevault (usages locaux corses, de l'époque de la rédaction de l'écrit) ; Cass. 1re
Bull. civ. I, no 121 ; RTDciv. 1986, 166, obs. J. Patarin ; Cass. req., 10 févr. 1885, DP 1886. I. 111 ; Gaz. Pal. 1885. I. 454.
804, obs. J.-P. Marguenaud (censure de la dénaturation d'un testament par la CEDH).
12. Ils ne peuvent toutefois être privés de leur titre : Cass. req., 8 nov. 1932, DH 1932. 585 ; S. 1933. I. 281, note H. Vialleton.
13. En cas d'exclusion de tous les héritiers, il y a déshérence, et la succession est dévolue à l'État, cf. infra,no
695 s.
14. Cass. req., 21 févr. 1934 : DP 1934. 1. 69, rapp. Pilon (legs au profit d'une personne non dénommée : les juges doivent discerner d'après les
énonciations du testament et les circonstances extrinsèques de la cause, quelle est la personne que le testateur a voulu gratifier) ; Cass. req.,
14janv. 1941 : DA 1941. 102 ; JCP1941. II. 1699, note P. Voirin.
145
94, note Mikalef-Toudic.
civ., 17 avr. 1985,
11. Cass. 1re civ.,5 nov. 1996,précité ;Cass. 1re civ., 9juill. 1958, Bull. civ. I, no 370 ; D. 1958. 583 ; et V. CEDH, 13juill. 2004, Pla et al. c/Andorre, D. 2005.
1832, note E. Poisson-Drocourt, 2124, obs. M. Nicod ; JCPG 2005. I. 103, no 15,obs.F. Sudre ; Defrénois 2005. 1909, obs. P. Malaurie ; RTD civ. 2004.
88 ; R., p. 57 ; D. 1985. 5, note Breton ; RTD civ. 1985. 431, obs.
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