Cours - Droit pénal général - 5e - 164

DROIT PÉNAL GÉNÉRAL
considération est indifférente - en droit. Le juge doit vérifier la qualification des faits, qui détermine sa
propre compétence. Il est tenu de qualifier exactement les faits qui lui sont soumis397
doit qualifier les faits, sans être lié par les termes de l'acte de saisine398
: non seulement il
, mais il est encore tenu de
retenir la bonne qualification. « Il appartient aux juges du fond (...) de restituer même d'office aux
faits leur véritable qualification »399
. Par conséquent, la qualification pénale ne doit pas être utilisée
à des fins détournées. La jurisprudence prévient ou sanctionne, en ce sens, les détournements de
procédure, qui consistent par les autorités pénales à retenir volontairement une qualification erronée
des faits pour contourner un obstacle à la répression ou pour profiter de prérogatives accrues400
comme ailleurs, la fin (souvent processuelle) ne justifie pas les moyens401
.
301 L'évolution de la qualification. - La qualification est opérée en considération du comportement
délictueux au jour des faits. La disparition ultérieure d'un élément de l'infraction est indifférente, car il
est une règle générale que la consommation de l'infraction s'apprécie au moment de l'action. Le
vendeur impayé, par exemple, qui reprend la chose vendue demeure voleur, malgré l'anéantissement
postérieur du contrat de vente402
.Ce n'est pas dire que la qualification des faits ne peut pas évoluer
lors du procès. Le devoir de qualification impose de la modifier lorsqu'elle est inexacte. La
requalification403
,tout d'abord, permet de réparer l'erreur d'appréciation juridique commise par une
autre autorité répressive. Par exemple, les faits ne sont pas constitutifs d'un abus de confiance mais
d'un vol. La qualification peut ensuite varier en raison de l'évolution d'éléments de fait. En matière
d'infractions de résultat, la gravité de la qualification peut varier si le dommage subi par la victime
s'aggrave au cours de la procédure. Les violences sont ainsi incriminées et punies par plusieurs
textes en fonction de la gravité de leur résultat (durée de l'incapacité de travail ou décès de la
victime)404
.Elle n'est écartée qu'exceptionnelle.Ici
.
À proprement parler, la qualification de « violences » est acquise au jour de l'acte causal.
Mais la détermination exacte du texte adéquat peut changer lors du procès, si l'état de la victime
s'aggrave ou s'avère moins dramatique. En toute hypothèse, cependant, la requalification des faits,
lato sensu, est soumise à plusieurs conditions processuelles405
ment, dans des matières soumises à un régime processuel distinct, telles que les infractions de
presse ou les fraudes406
.
302 La théorie de la peine justifiée. - Le devoir judiciaire de qualification des faits connaît néanmoins
une limite jurisprudentielle : la théorie de la peine justifiée permet à la Cour de cassation de ne pas
sanctionner l'erreur de qualification commise par les juges du fond, dès lors que la qualification
397. R. MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel, Droit pénal général, op. cit., p. 233.
398. Il ne peut par exemple relaxer le prévenu sans avoir vérifié que les faits ne sont constitutifs d'aucune autre infraction que celle qui lui a
été proposée par les parties (Cass. crim., 22janv. 1997, Bull. crim., 1997, nº 31 ; 31 mai 2005, Bull. crim., nº 166). Il existe néanmoins des limites et
des exceptions à cette règle en matière de presse ou de fraude, où l'office du juge est plus contraint (art. 50 à 53, L. 29juill. 1881 - Cass. crim.,
3janv. 1970, Bull. crim., nº 8 ; art. 216- 4 C. conso).
399. Cass. crim., 13 nov. 1962, Bull. crim., nº 316.
400. À ce sujet, v. J. PRADEL, Procédure pénale, op. cit., nº
354.
401. V. supra,nº 39.
402. Cass. crim., 2 oct. 1981, Bull. crim., nº 257.
403. La requalification est un terme général qui peut inclure la « disqualification » (qui consiste à retenir une qualification plus douce des faits).
404. Art. 222-7 et s. C. pén.
405. Notamment, elle ne doit ni porter atteinte aux droits de la défense (v. not. Cass. crim., 16mai 2007, Bull. crim., nº 129), ni conduire le juge à
outrepasser les limites de sa saisine ou, plus encore, sa propre compétence.
406. En matière de presse, la Cour de cassation affirme qu'une poursuite engagée sur le fondement de la loi du 29juill. 1881 ne peut être poursuivie
sous une autre qualification du même texte (Cass. crim., 17juin 2008, Bull crim., 153). Il n'est pas non plus possible de substituer une qualification
de la loi de 1881 à une qualification de droit commun. En matière de fraude, v. art. L. 216-4 C. cons.
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