Cours - Droit pénal général - 5e - 239

L'auteur
organes et représentants - qui sont ainsi sa tête et ses bras, ou ses rouages -, si bien que leur fait à
eux n'est autre que son fait à elle, et qu'il engage ainsi tout naturellement la responsabilité du
groupement. S'ajoute à ces analyses du droit positif, de lege ferenda,l'idée de modifier les termes de
l'article 121-2 pour consacrer une responsabilité totalement directe : la personne morale pourrait se
manifester autrement qu'en la personne de ses organes ou représentants (par exemple par ses salariés),
voire sans aucun substratum humain, desorte quel'implication de ces derniers ne serait même
plus à exiger.
En somme, la responsabilité pénale des personnes morales apparaît constituer une responsabilité du
fait personnel. Plus précisément, lorsqu'il leur est reproché de s'être rendues auteurs d'une infraction,
il s'agit d'une responsabilité par commission et non par participation63
: la personne morale ne participe
pas à l'infraction commise par ses organes ou représentants mais la commet bien elle-même par
leur intermédiaire64
terait aux éléments constitutifs de l'infraction réalisés par la personne physique (tel qu'un défaut
d'organisation ou de fonctionnement intrinsèque au groupement) ; la Cour de cassation juge ainsi
que « la fautepénaledel'organe ou du représentant suffit, lorsqu'elle est commise pour le
compte de la personne morale, à engager la responsabilité pénale de celle-ci, sans que doive
être établie une faute distincte à la charge de la personne morale »65
.
458 Mais s'agit-il bien d'une responsabilité ? - L'on peut toutefois se demander s'il s'agit bien, rationnellement,
d'un mécanisme de responsabilité pénale fondamentalement semblable à celui des
personnes physiques : conçue originellement pour châtier un être humain, la responsabilité pénale
n'est-elle pas dénaturée lorsqu'on entend l'appliquer aux personnes morales au motif qu'elles sont
elles aussi dotées de la personnalité juridique ? L'on pourrait ainsi estimer que, au fond, la responsabilité
pénale des personnes morales constitue un faisceau de sanctions applicables en plus ou à la place
de celles qu'encourent les personnes physiques : la personne morale n'est plus alors conçue comme
unepersonnejuridique à sanctionner mais, demanière objective, commeun patrimoineà ponctionner
(pour que l'amende soit au juste taux au regard de la gravité des faits et des ressources indirectes des
coupables ou des personnes qui profitent plus ou moins directement du fonctionnement du groupement
- dirigeants, actionnaires, etc.) ou un risque à juguler66
(en supprimant ou limitant les possibilités
d'action offertes par le groupement67). L'on se souviendra d'ailleurs qu'il n'a jamais été besoin d'attribuer
. Il serait ainsi possible d'imala
personnalité juridique aux animaux, aux établissements ou aux groupes de combats pour en
permettre, respectivement, la confiscation, la fermeture et la dissolution68
giner que la personne morale puisse être atteinte sans que sa responsabilité pénale ne soit engagée,
en modifiant les dispositions de l'article 121-2 du Code pénal comme suit : « Lorsque l'infraction a été
commise, pour le compte d'une personne morale, par ses organes ou représentants, sont en outre
63. V. supra,nº 438.
64. Mais le dirigeant de la personne morale, dont le fait engage la responsabilité pénale de la personne morale, peut lui-même se rendre auteur
d'une infraction par participation (v. infra, nº 477).
65. Cass. crim., 26juin 2001, nº 00-83466, Bull. crim., nº 161. Cass. crim., 23 févr. 2010, nº 09-81819.
66. Comp. J.-H. Robert, « Les personnes physiques pénalement responsables des infractions commises à l'occasion du fonctionnement des
entreprises », JCPG 1975, II, 11716 ; C. Mangematin, La faute de fonction en droit privé, Dalloz,coll. NBT,2014, nº 728.
67. Ce qui explique que la responsabilité pénale des personnes morales de droit public et de certaines personnes morales de droit privé soit
exclue ou limitée dès lors que l'activité génératrice de l'infraction n'est pas de celles qui peuvent être confiées à un prestataire privé : qui songerait
à dissoudre de l'État ou à retirer à une commune telle ou telle prérogative de puissance publique (rappr. art. 131-39, al. 2 C. pén.) ?
68. Art.L.212-1 CSI (issu de l'article 1er
groupements de faits ».
du décret du 10janv. 1936, sur les groupes de combats et milices privées), visant les « associations ou
239
.Il n'y a donc pas lieu d'établir de sa part un fait de participation propre qui s'ajou

Cours - Droit pénal général - 5e

Table des matières de la publication Cours - Droit pénal général - 5e