Cours - Droit pénal général - 5e - 260

DROIT PÉNAL GÉNÉRAL
obligations précises, telles que l'hygièneet la sécuritédu travail244
, la fiscalité248
. Mais, par cinq arrêts rendus le
11 mars 1993, la Cour de cassation a admis que la délégation en toute matière « sauf si la loi en
dispose autrement »245
que la contrefaçon246
ou la circulation routière249
. Les domaines dans lesquels elle a été acceptée sont donc nombreux, telles
, la publicité illicite247
du chef d'entreprise peuvent en principe en faire l'objet.
496 Le domaine de la délégation de pouvoirs (exclusions). - Malgré les arrêts de 1993 (mais ces
derniers font réserve des textes contraires), certaines prérogatives ne peuvent être déléguées : elles
pèsent personnellement sur l'employeur. L'existence de ces « pouvoirs propres » demeure débattue.
De fait, la jurisprudence a pu s'opposer à l'efficacité de la délégation en matière d'atteinte au fonctionnement
des institutions représentatives du personnel de l'entreprise250
.
497 Conditions relatives à l'acte de délégation. - Tout d'abord, la délégation peut être écrite ou
orale251
,pourvu qu'elle soit certaine et effective252
c'est-à-dire qu'elle doit être limitée à l'accomplissement d'une ou plusieurs tâches déterminées253
respectées255
. Elle doit cependant être spéciale, et non générale,
. Elle
doit ensuite être antérieure à l'infraction - fort logiquement. Enfin, la « subdélégation », c'est-à-dire la
transmission successive du pouvoir reçu par le délégataire à un autre préposé, est admise par la
Cour de cassation254
. Sous la réserve que les conditions communes à toute délégation soient
, le premier délégataire peut échapper de la sorte à la sanction pénale. Bien que discutée
en doctrine, cette faculté paraît conforme à la règle selon laquelle la responsabilité pénale doit être
imputée au détenteur effectif du pouvoir dont l'exercice normal aurait permis d'éviter l'infraction. Au
surplus, il appartient du chef d'entreprise de prohiber les délégations successives.
498 Conditions relatives à la personne du délégant. - La délégation doit provenir du titulaire du
pouvoir délégué ou de celui qui l'exerce régulièrement. De plus, la jurisprudence a paru attentive à sa
244. Cass. crim., 11 mars 1991, Dr. pén. 1991, comm. 326, obs. J.-H. ROBERT ; 17juill. 1990, Bull. crim., nº 287 ; 30 oct. 1990, Dr. pén. 1991, comm. 84,
obs. J.-H. ROBERT. Par exemple, elle n'a pas admis de délégation efficace à propos de la détermination de l'indemnité de congés destinée aux salariés,
car il s'agissait d'une « décision d'ordre général concernant l'ensemble du personnel salarié et qu'il appartenait au seul PDG de
prendre »(Paris, 4 mars 1963, JCP 1963, II, 13259, note H. GUÉRIN).
245. Cass. crim., 11 mars 1993, Bull. crim., nº 112. Rappr. Cass. crim. 25juin 1979, D. 1979, Inf. rap. 527, obs. PUECH ; 19janv. 1988, Bull. crim., nº 29.
246. Cass. crim., 11 mars 1993, préc.
247. Ibidem.
248. Cass. crim., 16 déc. 2009, nº 08-88296.
249. Cass. crim., 15 févr. 1994, Bull. crim., nº 69.
250. Cass. crim., 15mai 2007, nº 06-84318. Rappr. Cass. crim., 3mars 1998, nº 96-85098 ; 14 oct. 2003, nº 03-81366. Mais l'entrave est un ensemble
complexe d'infractions que la simple représentation du dirigeant devant l'institution n'efface pas. Rappr. A. COEURET et É. FORTIS, Droit pénal du
travail, op. cit., p. 194, nº 353 et s. Au demeurant, selon l'ancien Code du travail (art. L. 435-4, L. 434-6, L. 434-8), l'obligation de consultation de l'institution
représentative pesait personnellement sur le chef d'entreprise. Rappr. Y. REINHARD, Délégation de pouvoir et non-consultation du comité
d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, D. 1995, 30.
251. Cass. crim., 27 févr. 1979, Bull. crim., nº 88 ; Douai, 21 oct. 2008, Juris-Data nº 2008-373282.
252. La réalité et la portée d'une délégation de pouvoirs relèvent de l'appréciation souveraine des juges du fond (Cass. crim., 16 avr. 2019, nº 1880982).
253.
V. par ex. Cass. crim., 24janv. 1978, nº 76-93291 : une délégation à un chef de chantier d'organiser le travail ne vaut pas pour la mise en
œuvre des mesures de sécurité imposées par la loi. Rappr. Cass. crim., 8 sept. 2015, nº 13-87410, Dr. pén., 2015, comm. 137, P. CONTE : la délégation
générale (d'origine légale) en matière d'hygièneet desécuritédu capitaine d'un navire ne décharge pas l'armateur de la responsabilité pénale
qu'il encourt personnellement pour des actes et abstentions fautifs lui étant imputables et entretenant un lien certain de causalité avec le
dommage. Rappr. Cass. crim., 28janv. 1975, Bull. crim., nº 32 : délégation inopérante faute d'instructions précises.
254. Cass. crim. 23janv. 1975, Bull. crim., nº 30, JCP 1976, II, 18333, note J.-H. ROBERT.
255. Cass. crim. 30 oct. 1996, Bull. crim., nº 389 : la subdélégation n'a pas à être autorisée par le chef d'entreprise.
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