Cours - Droit pénal général - 5e - 278

DROIT PÉNAL GÉNÉRAL
donner des ordres aux membres du groupe dont on est le meneur79
le supérieur80
ou à un fonctionnaire dont on est
, menacer de licencier un salarié ou de frapper une personne soumise, profiter, en qualité
de professeur, de policier ou de parents, de son autorité de droit ou de fait pour manipuler, respectivement,
un élève, un suspect ou son enfant, etc. Mais les procédés légalement visés recouvrent la plupart
des modalités envisageables de provocation, et sont en outre interprétés largement81
,si bien que le
caractère limitatif de la liste légale est peu gênant. Est cependant ignoré du texte - et n'est donc pas
punissable au titre de la complicité - le fait de donner un simple conseil à l'agent, de lui proposer d'agir
ou encore d'altérer (par exemple en administrant une substance psychotrope) son discernement ; par
comparaison, l'ancien article 60 du Code pénal visait au contraire plus largement les «machinations et
artifices coupables ». La provocation doit par ailleurs s'adresser à une personne ou un groupe de
personne déterminé et ne peut donc pas être « impersonnelle » (viser le public en général). Toutefois,
l'article 23 de la loi du 29juillet 1881 sur la liberté de la presse étend la complicité au fait de provoquer
efficacement à un crime ou un délit « soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux
ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images
ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou
exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au
regard du public, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique »82
.
D'autre part, la « fourniture d'instructions » : elle correspond au fait de donner - quelle qu'en soit la
forme cette fois-ci (malgré la rédaction, défectueuse, de l'alinéa 2) - des consignes, des explications,
des renseignements suffisamment clairs et précis83
suffisent pas), et peut ainsi se confondre, dans certains cas, avec la provocation84
(de vagues recommandations ou informations ne
ou la facilitation85
(alors que cette dernière est exclue en matière contraventionnelle).
Précisons pour finir qu'il résulte de l'article 121-7, alinéa 2 du Code pénal que, en droit pénal français,
l'« auteur moral » de l'infraction est un complice, même si la jurisprudence en fait parfois un auteur. Il
avait cependant été envisagé de faire de l'instigation un mode de réalisation criminelle à part entière,
intermédiaire entre l'action et la complicité ; l'idée reste discutée en doctrine86
.
b. Caractères du fait de complicité
532 Fait positif. - Lestermesemployés par lesdeux alinéas de l'article 121-7 du Code pénal confèrent
aux deux modes de complicité des traits communs. Ainsi, le fait de complicité doit tout d'abord être un
79. Mais l'ordre peut provenir d'unepersonnedépourvue d'autorité de droit ou de fait : dire au conducteur d'un véhicule « fonce, fonce, ne
t'arrête pas », en vue de forcer un barrage routier mis en place par la gendarmerie, suffit à constituer un ordre (Cass. crim., 18mars 2003,
nº 02-85565, Bull. crim.,nº 70).
80. Cass. crim., 13 oct. 2004, nº 03-81763, Bull. crim., nº 243, préfet ordonnant à un gendarme de détruire une paillote.
81. Il y a par exempleordre, pour lepassager d'un véhicule souhaitant forcer un barrage routier, à dire au conducteur « fonce, fonce, ne t'arrête
pas » (Cass. crim., 18mars 2003, nº 02-85565, Bull. crim., nº 70. Contra : Cass. crim., 21 sept. 1994, nº 93-81447, Bull. crim., nº 302).
82. La disposition est cependant inusitée, ce qui peut s'expliquer par les difficultés à caractériser le lien de causalité entre les faits de provocation,
à caractère impersonnel, et l'infraction consécutive.
83. Cass. crim., 16 nov. 2011, nº 10-87629 : est complice l'individu qui emploie clandestinement une personne en tant que démarcheur à domicile
pour vendre des tapis pour son compte selon les méthodes, afin qu'il commette des abus de faiblesses. Cass. crim., 31 janv. 1974, nº 93-92681,
Bull. crim., nº 50, fourniture de renseignements sur les habitudes de la victime.
84. Cass. crim., 26mai 1999, nº 98-84015, directeur de la surveillance d'un magasin ayant ordonné à un subordonné de retenir, sans droit, une
personne suspectée d'usagedefausse monnaie.
85. Cass. crim., 4 oct. 1994, nº 94-83492, approuvant la décision d'une chambre d'accusation ayant jugé que le fait, pour la mère d'un nouveau-né,
d'indiquer au père, qui souhaite tuer l'enfant en le jetant dans un canal, de prendre un sac et de l'enrouler dans une couverture constitue un
acte positif d'aide ou assistance.
86. J. BIGUENET,« De la nécessité d'opérer une distinction entre complicité et instigation », Dr. pén. 2001, ét. 25.
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