Cours - Droit pénal général - 5e - 51

L'élaboration de la loi pénale
l'individualisation de la sanction143
condamné, ainsi que son adéquation aux intérêts présents dans l'affaire qui lui est soumise144
,c'est-à-dire son adaptation par le juge aux caractères concrets du
. Cette
individualisation a pour conséquence que la sanction effectivement exécutée par le condamné n'est
guère prévisible au moment de l'infraction : il n'y a pas de peines fixes. Les juridictions de jugement,
au titre des «modes de personnalisation des peines »145
peines146
, comme les juridictions d'application des
possèdent notamment d'importants pouvoirs d'aménagement de la sanction. Ces prérogatives,
pour autant, constituent-elles une atteinte à l'exigence de clarté et de précision de la loi pénale et,
partant, au principedelégalitécriminelle ?
En réponse, ce dernier principe étant libéral et protecteur, il est possible et utile d'en limiter les
conséquences lorsque l'intérêt de la personne condamnée et l'intérêt général le commandent de
façon conjointe147
précis, en ce sens que les procédés de personnalisation sont exactement conditionnés par la loi
elle-même. Le juge ne peut y substituer sa propre appréciation148
. Deplus, lestextesqui favorisent l'individualisation des sanctions sont souvent
. La légalité demeure bien présente.
En revanche, non contentes de favoriser l'imprévisibilité des sanctions, les lois qui déterminent
abstraitement la sanction applicable à l'auteur des faits sont plus imprécises : elles offrent à la juridiction
de jugement un large éventail de possibilité sans, pour autant, fixer exactement les conditions
dans lesquelles la sanction prononcée est identifiée. Tout d'abord, les sanctions abstraitement
prévues par les textes ne sont déterminées par la loi que dans leur nature et leur quantum
maximal, alors que le Code de 1810 prévoyait des sanctions minimales149
. Le Code pénal ne comporte
pas, en ce sens, de « tarification » exacte des faits délictueux. Ensuite, les textes répressifs développent
la fongibilité des sanctions. D'un côté, il est fréquemment prévu que certaines sanctions, dites
« de substitution » ou « de remplacement » peuvent être prononcées à la place des peines prévues à
titre principal par l'infraction150
.D'un autre côté, certains textes répressifs n'attachent pas de sancsont
souvent
tions exactement déterminées à l'infraction. Les sanctions « complémentaires »151
communes à plusieurs infractions, car le Code ne les énumère qu'en fin de section ou de chapitre152
Parfois, la spécialité de la sanction semble encore plus absente. Par exemple, les
.
143. V. infra, nº 623. V. Cons. const., 22juill. 2005, DC nº 2005-52 et 3mars 2007, DC nº 200-553, qui donnent valeur constitutionnelle à l'individualisation
des sanctions. Cela étant, la question n'est pas nouvelle : v. SALEILLES, L'individualisation de la peine, Étude de criminalité sociale, Paris, 1898.
144. Art. 132-24 C. pén. et 707 C. proc. pén.
145. Par exemple, les juridictions de jugement peuvent, dès lors que les conditions en sont réunies, prononcer le sursis (simple - art. 132-29 et s.
C. pén., ou probatoire - art. 132-40 et s. C. pén.), le placement sous surveillance électronique (art. 132-26-1 et s. C. pén.), la semi-liberté et le placement
à l'extérieur (art. 132-25 et s. C. pén.), le fractionnement de la peine (art. 132-27 et s. C. pén.), la dispense de peine ou l'ajournement (art. 13258
et s. C. pén.). V. infra,nº 552 et s.
146. En plus de leurs diverses facultés de conversion (v. par ex. art. 132-57 C. pén. permettant la conversion de l'emprisonnement inférieur à 6
mois en sursis assorti d'un travail d'intérêt général), les juridictions d'application des peines peuvent ainsi prononcer le fractionnement et la
suspension de la peine (art. 720-1 C. proc. pén - rappr. art. 20-10 ord. 2 févr. 1945 à propos du juge des enfants), la réduction de peine (art. 721 et s.
C. proc. pén.), les permissions de sortir (art. 723-3 et 723-27), l'autorisation de sortie (art. 148-5 et 723-6 C. proc. pén.), la libération conditionnelle
(art. 729 et s. C. proc. pén.), la semi-liberté (art. 132-25 C. pén. et 723-1 C. proc. pén.), le placement à l'extérieur (art. 132-25 et s. C. pén.) et le placement
sous surveillance électronique (art. 132-26-1 et s. C. pén. et 723-7 C. proc. pén.). Elles peuvent encore participer à la détermination du contenu
de la probation, le cas échéant (art. 132-45 C. pén.).
147. Par exemple, la rétroactivité de la loi est admise lorsqu'elle plus douce et les lois de procédures sont, en principe, d'application immédiate.
V. infra,nº 100 et s.
148. Cass. crim. 8 févr. 1977, Bull. crim., nº 50, à propos du relevé de la peine ; 6juin 1990, Bull. crim., nº 224, à propos du régime du travail
d'intérêt général.
149. Par exemple, l'article 402 affirmait en 1810 que « les banqueroutiers simples seront punis d'un emprisonnement d'un mois au moins et de
deux ans au plus ». Les sanctions minimales ou « peines planchers » ont été réintroduites par la loi nº 2007-1198 du 10 août 2007, en cas de
récidive criminelle ou délictuelle grave (anc. art. 132-18-1 et 132-19-2 C. pén.). Mais les textes autorisent le juge à passer outre. Ce mécanisme a
été abrogé par la loi nº 2014-896 du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales (art. 7).
150. Art. 131-11 C. pén. V. infra, nº 631 et s.
151. V. infra, nº 632 et s.
152. V. par ex. art. 222-44 C. pén. qui définit les peines complémentaires applicables, tout à la fois, aux infractions de meurtre, atteintes non intentionnelles
à la vie, violences, atteintes non intentionnelles à l'intégrité d'autrui, agressions sexuelles, harcèlement, enregistrement et diffusion
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