CRFPA - Procédure pénale - CRFPA - Examen national Session 2023 - 6e - 83

leçon 4. leS GaranTIeS eT leS ProcéDéS De Preuve
à faire apparaître une infraction qui se serait de toute façon commise et non à provoquer
à la commission de cette infraction. Or, en pratique, la distinction entre la provocation à la
preuve et la provocation à la commission de l'infraction est délicate à mettre en œuvre. En
matière de trafic de stupéfiants, la jurisprudence se réfère au caractère « déterminant » de
l'action policière pour vérifier si la liberté de décision du suspect a été - ou non - annihilée35
.
Ainsi, lorsque l'infraction s'inscrit dans la lignée d'agissements délictueux préexistants, la
provocation est souvent considérée comme révélant une situation qu'elle n'a pas engendrée.
DécrYPTaGe
L'autonomie du principe de loyauté de la preuve
Le recours à des procédés légaux en eux- mêmes peut s'avérer déloyal. C'est ainsi que le
principe de la loyauté de la preuve a permis à la Cour de cassation d'invalider la preuve
obtenue grâce à la sonorisation d'un local de garde à vue, pourtant réalisée conformément
aux prescriptions légales. En l'espèce, le procédé consistant à placer deux suspects dans
des cellules contiguës et préalablement sonorisées, afin d'enregistrer à leur insu les propos
qu'ils pourraient échanger, constitue un stratagème contraire à l'article 6 de la Conv. EDH,
à l'article préliminaire du Code de procédure pénale, au principe de loyauté des preuves
ainsi qu'au droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination36
.
Mais « seul est proscrit le stratagème qui, par un contournement ou un détournement
d'une règle de procédure, a pour objet ou pour effet de vicier la recherche de la preuve en
portant atteinte à l'un des droits essentiels ou à l'une des garanties fondamentales de la
personne suspectée ou poursuivie »37
.
§ 2. Les pouvoirs du juge dans l'appréciation des preuves
213. Si dans un système de preuve légale, le juge n'a aucun pouvoir d'appréciation, tel n'est
pas le cas en droit français où le principe de l'intime conviction est consacré par le Code de
procédure pénale38
élément de preuve présenté devant lui39
. Cette règle confie au juge pénal un pouvoir d'appréciation sur chaque
. La liberté de l'appréciation de la preuve est à
ce point prégnante que la prévision par la loi d'un mode de preuve n'interdit pas au juge
de s'en détourner pour en privilégier un autre. À titre d'illustration, bien que le Code de la
route prescrive, pour établir l'infraction de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état
alcoolique, un dépistage, puis une vérification médicale de l'alcoolémie d'un conducteur de
véhicule40
, les juridictions de jugement peuvent aussi recourir « à tout autre moyen de
preuve pour déterminer d'après leur intime conviction si le prévenu s'est rendu coupable
35. Cass. crim., 16 mars 1972, Bull. n° 108.
36. Cass. crim., 7 janv. 2014, Bull. n° 1. La solution est confirmée par l'Assemblée plénière dans un arrêt du 6 mars 2015,
la cour d'appel de renvoi ayant refusé de se plier à la solution de la chambre criminelle du 7 janvier 2014 (Cass., ass.
plén., 6 mars 2015, n° 14-84339, JCP 2015, 558, note E. Bonis- gArçon ; RSC 2015. 117, obs. P.-J. delAge).
37. Cass., ass. plén., 9 déc. 2019, préc.
38. Art. 427 CPP. V. égal. art. 353 al. 2 CPP à propos de la cour d'assises.
39. Cass. crim., 28 juin 1995, Bull. n° 242.
40. Art. L. 234-3 et L. 234-4 C. route.
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