Droit civil - Droit des sûretés - 16e - 202

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DROIT DES SÛRETÉS
prise en compte la quote-part de biens indivis lui appartenant238
.
. La sanction n'est
encourue que si la charge du cautionnement est « manifestement disproportionnée
» par rapport au patrimoine de la caution239
Le juge peut-il prendre en considération les perspectives de développement de
l'entreprise créée par la caution, en considérant que c'est le caractère raisonnable
ou non de l'engagement, qui ne sera appelé qu'ultérieurement, qu'il s'agit d'apprécier
? Doit-il, au contraire, considérer qu'il serait illogique de tenir compte du
succès escompté de l'entreprise pour apprécier la proportionnalité d'une garantie
qui ne sera précisément mise en œuvre qu'en l'absence d'un tel succès240
? Cette
dernière conception est celle de la chambre commerciale de la Cour de
cassation241
, mais la première chambre civile y était initialement opposée242
,
avant finalement d'aligner sa jurisprudence sur celle la chambre commerciale et
d'affirmer que « la proportionnalité de l'engagement de la caution ne peut être
appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie »243
.L'avenir
escompté de l'entreprise débitrice principale et, par voie de conséquence, de l'actif
de la caution ne peut donc pas justifier une évaluation plus importante de cet
actif au jour où la caution s'engage. Il ne peut pas, non plus, en justifier une évaluation
plus faible et c'est la raison pour laquelle la chambre commerciale de la
Cour de cassation affirme que, pour déterminer cet actif, il faut prendre en compte
la valeur des parts sociales dans l'entreprise débitrice principale appartenant à la
caution, ainsi que la créance résultant de son compte courant d'associé244
,et ce
en dépit du fait que la valeur de ces éléments d'actifs risque d'être réduite à néant
si l'entreprise débitrice principale connaît d'importantes difficultés financières.
238. Cass. 1re civ., 19 janvier 2022, nº 20-20467 ; Gaz. Pal. 19 avril 2022, nº 13, p. 5, note
Ch. Albiges : « La disproportion éventuelle de l'engagement d'une caution mariée sous le régime de
la séparation de biens s'apprécie au regard de ses revenus et biens personnels, comprenant sa quotepart
dans les biens indivis ».
239. Bien que la jurisprudence ait parfois tendance à se référer à la seule exigence d'une disproportion,
la Cour de cassation a récemment rappelé qu'elle doit être manifeste (Cass. com., 28 févr. 2018,
nº 16-24841, Bull. civ. IV, nº 24 ; Rev. proc. coll. 2018, 112, obs. A. Aynès ; Gaz. Pal. 12 juin 2018,
p. 70, obs. B. Bury ; RTD civ. 2018, p. 457, obs. P. Crocq ; RD imm., 2018, p. 335, obs.
H. Heugas-Darraspen ; RDC 2018, p. 222, obs D. Houtcieff ; RD bancaire et financier mai-juin 2018,
65, obs. D. Legeais), ce qui implique qu'elle ne puisse être prise en considération que si elle saute aux
yeux sans que le juge ait besoin de procéder à un examen substantiel et approfondi, ainsi que la Cour
de cassation l'a notamment affirmé à propos de l'appréciation de l'application de l'art. 1448, al. 1,
CPC (Cass. 1re
civ., 21 sept. 2016, nº 15-28941, Bull. civ. I, nº 166).
240. V., en ce sens, P. CROCQ, obs. sous Cass. com., 4 juin 2013, cité infra ; Y. Picod, « Cautionnement
et droit de la consommation : le régime se précise », Droit et proc. janv. 2015, Cahier Droit de la
consommation, p. 2.
241. Cass. com., 6 févr. 2007, nº 04-15362, RTD civ. 2007, p. 372 et s., obs. P. Crocq ; Cass. com.,
4 juin 2013, nº 12-18216 et 12-15518, D. 2014, p. 1618, obs. P. Crocq ; Dr. et patr. févr. 2014, p. 61,
obs. Ph. Dupichot ; Cass. com., 27 janv. 2015, nº 13-27625 et 13-25202, RD bancaire et financier
2015, comm. 42, obs. D. Legeais.
242. En faveur d'une prise en compte des revenus escomptés de l'opération garantie : Cass. 1re
4 mai 2012, no 11-11461, Bull. civ. I, nº 97 ; Dr. et patr. juill. 2012, obs. L. Aynès ; RTD civ. 2012, 556,
civ.,
obs. P. Crocq ; Chambéry, 18 mars 2014, D. 2014, p. 1037, obs. B. de Boysson.
243. Cass. 1re
civ., 3 juin 2015, nº 14-13126, D. 2015, p. 1268, obs. V. Avena-Robardet, p. 1816,
obs. P. Crocq et p. 2044, note Ch. Juillet ; RDC 2016, p. 54, obs. A.-S. Barthez ; Defrénois 2016,
p. 814, obs. S. Cabrillac ; Banque et droit, nº 163, sept.-oct. 2015, p. 80, obs. E. Netter (JP constante
depuis cet arrêt) ; Cass. com., 7 oct. 2020, nº 19-12949, RD bancaire et fin. 2020, comm. 128, obs.
D. Legeais ; JCPG 2021, I, 418, nº 7, obs. Ph. Simler.
244. Cass. com., 26 janv. 2016, nº 13-28378, Bull. civ. IV, nº 13 ; Defrénois 2017, nº 19, p. 31, obs.
S. Cabrillac (cet auteur indiquant avec raison que la logique voudrait que les parts sociales soient prises
en compte pour leur valeur réelle et non pour leur valeur nominale) ; D. 2016, p. 1964, obs.
P. Crocq ; Dr. et patr., janv. 2017, p. 91, obs. Ph. Dupichot ; Gaz. Pal. 21 juin 2016, p. 31, obs.
M.-P. Dumont-Lefrand ; JCPG 2016, 553, nº 9, obs. Ph. Simler.
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