Hors collection - Droit et déontologie des magistrats - 190

DROIT ET DÉONTOLOGIE DES MAGISTRATS
194127 voté sous le régime de Vichy. À cette loi succédera quelques années plus
tard celle du 19 octobre 1946 relative au statut général des fonctionnaires28, puis
celle du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dite « loi
Le Pors »29 qui, régulièrement remaniée, est toujours en vigueur30.
L'article 26 de cette loi pose tout d'abord le principe selon lequel les fonctionnaires
sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le Code
pénal. Le fonctionnaire, agent de service public, s'inscrit donc, par son statut, dans le
sillage des dispositions de l'article 226-13 du Code pénal31.L'alinéa 2 ajoute l'obligation
pour les fonctionnaires de faire preuve de discrétion professionnelle pour tous
les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à
l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Il poursuit en exposant qu'en dehors des
cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière
de liberté d'accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être
déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de
l'autorité dont ils dépendent.
217 › Distinction. - Selon une doctrine classique, le secret professionnel aurait
pour objet la protection des secrets des administrés, alors que l'obligation de
discrétion professionnelle protégerait les intérêts de l'administration32.En
outre, selon Vigouroux les autorités hiérarchiques peuvent délier les agents
publics de l'obligation de discrétion, mais non du secret professionnel33. Rappelons
en particulier que l'article 6 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précise,
in fine, que le magistrat ne peut « en aucun cas » être relevé de son serment, ce
qui démontre ici une différence fondamentale. Enfin « la discrétion est statutaire
et administrative alors que le secret est défini par la loi et sanctionné pénalement.
La discrétion est générale alors que le secret est particulier, défini précisément
par des textes spéciaux »34.
218 › Essai de rapprochement. - Selon Philippe Azouaou, la notion de confidentialité
permettrait d'unir celles de discrétion et de secret. Selon cet auteur, « la
discrétion professionnelle et le secret professionnel sont étroitement liés, non
par un devoir de confidentialité né d'un raisonnement doctrinal inductif, mais
par l'obligation de discrétion elle-même. Celle-ci est le socle du secret
27. Loi portant statut général des fonctionnaires civils de l'État et des établissements publics de l'État, JO, 1er
p. 4211 ; D. 1941. L. 483-489, p. 484.
29. Loi nº 83-634.
30. Sur l'histoire de l'obligation de secret professionnel et de discrétion professionnelle, voir : Ph. Azouaou, « L'indiscrétion
des fonctionnaires », AJFP 2014, p. 268.
31. Bien qu'ancienne, le lecteur se réfèrera avec profit à la thèse de J. Couturon, Le secret professionnel de fonctionnaires,
th. Paris (dactylographiée), 1945.
32. CSM, op. cit., p. 76, « Le magistrat est tenu au secret professionnel ainsi qu'à un devoir de discrétion, qui garantit
son image d'impartialité ». V. également : J.-M. Auby et al., Droit de la fonction publique,7e
éd., Dalloz, 2012,
p. 398-399 ; O. Dord, Droit de la fonction publique,2e éd., PUF, 2012, p. 235 ; D. Jean-Pierre, L'éthique du fonctionnaire
civil. Son contrôle dans les jurisprudences administrative et constitutionnelle françaises, LGDJ, 1999,
p. 175-182 et 195-202 ; F. Melleray, Droit de la fonction publique,2e
C. Vigouroux, Déontologie des fonctions publiques,2e éd., Dalloz Référence, 2012, p. 465.
33. C. Vigouroux, op. cit.
34. C. Vigouroux, op. cit.
190
éd., Economica, 2010, p. 355 ;
oct. 1941,
28. Loi nº 46-2294, 19 oct. 1946 relative au statut général des fonctionnaires, JO, 20 oct. 1946, p. 8910 ; D. L. 410416,
p. 410.
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